BFM Patrimoine
Immobilier

L'OFCE suggère de surtaxer les propriétaires qui n'ont ni crédit ni loyer à payer

Les propriétaires vont-ils devoir payer une nouvelle taxe?

Les propriétaires vont-ils devoir payer une nouvelle taxe? - Bertrand Guay - AFP

L'idée derrière ce que les économistes appellent la "taxe sur les loyers implicites" est de rétablir une forme d'équité fiscale entre les locataires dont les revenus sont amputés par leur loyer et les propriétaires qui occupent leur logement sans rien payer.

L'idée a les faveurs de nombreux économistes de gauche. L'OFCE, Observatoire français des conjonctures économiques, vient à son tour de préconiser la "taxation des loyers implicites". Il s'agit d'ajouter un revenu fictif aux propriétaires correspondant aux montant des loyers qu'ils paieraient pour occuper leur logement. Et de fiscaliser ce revenu. Cette "taxe" a d'ailleurs déjà existé en France, de 1914 à 1964, jusqu'à ce que Valéry Giscard D’Estaing l'abroge 1965.

Son retour a notamment été évoqué par Thomas Piketty en 2011 dans son livre "Pour une révolution fiscale", en mars 2013 par l'OCDE, en juin 2013 par le Haut conseil du financement de la protection sociale, ou encore en septembre 2013 par le Conseil d'analyse économique. Dans une réponse ministérielle publiée au Journal officiel en novembre 2014, le gouvernement avait pensé enterrer pour de bon l’idée d’une taxation des revenus implicites 

Mais le think tank Terra Nova a remis l'idée sur la table en février 2015. Un mois plus tard, le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, a définitivement mis fin à cette "folle rumeur" en déclarant à l'Assemblée nationale: "La réponse est non! Jamais il n'y a eu le moindre début du commencement de l’étude de cette mesure par un quelconque service de mon ministère".

"Deux grands absents"

C'était donc sans compter sur l'OFCE qui remet le sujet sur la table à l'approche de l'élection présidentielle. L'institut estime que la fiscalité du capital en France, qui se caractérise par un niveau élevé de prélèvements, devrait être "rationalisée et simplifiée". Dans une note intitulée "quelles réformes de l'imposition sur le capital pour les hauts revenus?", l'Observatoire souligne que la France est "le deuxième pays de l'Union européenne ayant le plus fort taux moyen de prélèvement sur le capital derrière le Luxembourg".

Mais "les deux grands absents de la taxation du capital sont le logement principal (et les plus-values réalisées sur celui-ci) et les plus-values non réalisées", ajoutent-ils. Dans la perspective d'aboutir à "une plus grande neutralité fiscale", l'OFCE préconise donc d'introduire une "taxation des loyers implicites", en faisant par exemple payer aux propriétaires des prélèvements sociaux, et une "taxation des plus-values sur la résidence principale au-delà d'une certaine rentabilité".

"Il n'est guère équitable que deux familles de mêmes revenus salariaux payent le même impôt si l'une a hérité d'un appartement tandis que l'autre doit payer un loyer", soulignent les auteurs de l'étude.

Risque d'exil fiscal

L'institut juge aussi "légitime de faire payer l'impôt sur les plus-values latentes en cas de transmission par donation ou héritage". "Aujourd'hui, un riche actionnaire peut loger ses titres dans une société ad hoc qui reçoit ses dividendes, utiliser les titres de cette société comme caution pour obtenir des prêts de sa banque qui lui fournit les sommes dont il a besoin pour vivre et ainsi ne pas déclarer de revenu, puis léguer les titres de cette société à ses enfants, qui ne paient pas d'impôts sur les plus-values", font-ils valoir.

Concernant l'ISF, l'OFCE observe que "ses recettes sont faibles au regard d'autres impôts sur le capital" et qu'il pose un risque d'exil fiscal. Cet impôt n'a rapporté que 5,2 milliards d'euros en 2014, alors que les taxes foncières payées par les ménages s'élevaient à 18,7 milliards.

Trois stratégies s'offrent dès lors à la France, selon l'OFCE: soit "supprimer l'ISF pour augmenter l'attractivité tout en compensant les pertes de recettes par des réductions de dépenses publiques et sociales", ce qui risque d'accroître les inégalités. Soit le supprimer en compensant notamment "par une certaine taxation des loyers implicites, la généralisation de la taxation des plus-values latentes"; ou enfin le maintenir en abaissant notamment à 1% le taux maximum et en imposant une taxation mondiale des Français, quel que soit leur lieu de résidence.

Diane Lacaze avec AFP