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Retraite

Retraites complémentaires: ce qui va changer pour les salariés

Les régimes fusionneront au 1er janvier 2019

Les régimes fusionneront au 1er janvier 2019 - Philippe Huguen - AFP

Vendredi dernier, les partenaires sociaux ont acté la fusion des régimes de retraites complémentaires Arrco – Agirc pour 2019. Une décision qui va entraîner plusieurs changements, avec notamment l'entrée en vigueur du bonus-malus décidé dès 2015.

La "Madame Social" de la CFTC ne cache pas sa satisfaction. "C'est la preuve que le paritarisme peut très bien fonctionner", clame ainsi Pascale Coton, la négociatrice du syndicat sur les retraites complémentaires. Vendredi, à l'issue d'une réunion éclair de quelques dizaines de minutes, syndicats et patronat ont définitivement acté la fusion des deux régimes de retraite complémentaire du privé à savoir l'Arrco (tous salariés du privé) et l'Agirc (cadres). Cette fusion avait déjà été inscrite dans l'accord de 2015 mais les partenaires sociaux devaient encore fixer certaines modalités. L'enjeu est d'assurer la pérennité de ces régimes, qui cumulaient encore un déficit de 6,7 milliards d'euros en 2015. À ce titre, la fusion des deux régimes va permettre d'avoir des réserves cumulées de 60 milliards d'euros.

Plusieurs modifications vont entrer en vigueur en 2019, dont certaines avaient été actées dès 2015. L'occasion de faire le point.

> Des démarches simplifiées pour les cadres

Pour les cadres, qui cotisaient à la fois à l'Arrco et à l'Agirc cette fusion va rendre les choses un peu plus simples. Ils n'auront ainsi à faire qu'une seule demande pour toucher leur pension.

Rappelons que le système de retraite complémentaire fonctionne par points. En cotisant, un salarié "achète" des points. Et lorsqu'il part à la retraite sa pension est calculée en prenant le nombre de points cumulés que l'on multiplie par la valeur d'un point arrêtée au moment où il quitte la vie active.

Avec la fusion Arrco-Agirc, les points cotisés par les cadres dans les deux régimes seront convertis en points Arrco-Agirc de la façon suivante: points Arrco + (points Agirc x 0,347798289) = points Arrco-Agirc.

Conséquence logique: sur le bulletin de salaire, il n'y aura plus deux lignes distinctes mais une seule.

> Un alignement de l'âge pour toucher les pensions de réversion

La pension de réversion correspond à la part de la pension retraite complémentaire qu'un veuf ou une veuve touche lorsque son(sa) conjoint(e) décède. Son montant est égal à 60%. Il y a une condition d'âge pour pouvoir l'obtenir qui était de 55 ans dans le régime Arrco et 60 ans pour l'Agirc. Avec la fusion des régimes, les partenaires sociaux ont décidé de prendre l'âge le plus favorable, 55 ans donc. Une concession du Medef, un précédent projet prévoyant une solution à mi-chemin à 57 ans.

> Un doublement du plafond pour les majorations familiales

Ces majorations sont accordées aux retraités ayant encore des enfants à charge ou qui ont élevé au moins trois enfants. Dans le cas des retraités ayant encore des enfants à charge au moment où ils quittent la vie active, leurs droits sont majorés de 5% par enfant. Pour ceux qui ont élevé au moins trois enfants, la hausse est de 10%. Ces majorations étaient toutefois plafonnées à hauteur de 1031,15 euros pour l'Arrco et de 1028 euros pour l'Agirc. Avec la fusion, les partenaires sociaux ont décidé, plutôt que de conserver un seul plafond, de doubler la limite à 2000 euros.

> Un système de bonus-malus

Cette mesure avait été décidée dès 2015. Elle vise de fait à inciter les salariés à liquider plus tard leurs pensions. Concrètement, les salariés qui partent dès le moment où ils ont rempli toutes les conditions et atteint l'âge du taux plein feront face à un malus de 10% pendant trois ans, jusqu'à 67 ans maximum. Ce malus s'annule s'ils décalent leur départ d'un an. Un bonus de 10% peut être perçu pendant un an s'ils le reportent de deux ans. Ce bonus passe à 20% si ce report est de trois ans et même 30% dans le cas où il atteint quatre années.

> Pas de baisses des pensions en vue

Durant les ultimes négociations menées entre les partenaires sociaux, la CGT a agité le spectre d'une baisse des pensions avec l'entrée en vigueur du texte de 2015. Une interprétation catégoriquement démentie par la totalité des autres participants, fortement agacés par le comportement de la centrale dirigée par Philippe Martinez. "C'est difficile de combattre la mauvaise foi", s'était désolé Philippe Pihet (FO) auprès de l'AFP. Pascale Coton (CFTC) se dit elle "très en colère". "Ils ont mis le bazar et foutu la trouille aux gens. Il ne fallait surtout pas faire cela", soupire-t-elle.

Dans les faits, la convention prévoit à partir de 2019 de revaloriser la valeur du point (qui permet donc de calculer la pension) à partir non plus de l'inflation, mais de la masse salariale. Le texte donne la possibilité aux partenaires sociaux, en cas de conditions difficiles (forte hausse du chômage) de faire en sorte que la hausse de la valeur du point soit moins forte que celle des salaires, jusqu'à 1,1 point de moins.

Ainsi si la masse salariale augmente ainsi de 3%, les partenaires sociaux peuvent acter une hausse de seulement 1,9%. "Mais il n'est possible ni de geler ni de réduire la valeur du point d'indice", insiste Pascale Coton. "Et ce sont les partenaires sociaux qui décident de ces paramètres. Avec la réforme de 2015, le régime devra au moins avoir l'équivalent de 6 mois de réserves pour payer les retraites. Si on a fait cela ce n'est évidemment pas pour baisser les pensions!", assure la représentante de la CFTC.

Julien Marion