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Un disciple de Piketty prouve que les riches héritiers se marient entre eux

Plus les patrimoines hérités des deux individus sont différents et plus la mise en couple de ces deux individus est improbable.

Plus les patrimoines hérités des deux individus sont différents et plus la mise en couple de ces deux individus est improbable. - Jean-Pierre Dalbéra - Flickr - CC

Plus que les revenus, la composition de l'héritage des individus jouent un rôle prépondérant dans le choix de leur futur époux, notamment chez les très riches.

Dans la France du 21e siècle, les héritiers se marient entre eux. Une fille d'ouvrier au bras d'un fils de grande famille, un séducteur sans le sou qui épouse une riche héritière: les fantasmes d'ascension sociale à la Balzac n'ont plus cours de nos jours, où "les héritiers se marient entre eux", selon un jeune chercheur en mathématiques, disciple de Piketty.

"L'absence de patrimoine hérité est un handicap si l'on veut être en couple avec un héritier", indique l'étude réalisée par Nicolas Frémeaux, de l'université de Cergy-Pontoise, publiée dans le dernier numéro de la revue trimestrielle Population, diffusée par l'Institut national d'études démographiques (Ined).

"Nous montrons et prouvons que l'héritage importe dans les décisions matrimoniales" dans la France du 21e siècle, a déclaré le chercheur de 28 ans, dont le directeur de thèse à l'École d'Économie de Paris a été Thomas Piketty.

Une non-héritière a peu de chance d'être en couple avec un riche héritier

"Il est très improbable pour une non-héritière d'être en couple avec un riche héritier" précise l'étude: "Plus les patrimoines hérités des deux individus sont différents et plus la mise en couple de ces deux individus est improbable".

Il a étudié et quantifié l'importance prépondérante de l'héritage dans la tendance à l'homogamie (proximité d'origine sociale des couples), bien connue des sociologues, qui se basaient jusqu'à présent surtout sur les similarités de revenus, ou de niveaux d'éducation.

"L'homogamie est plus forte pour l'héritage que pour les revenus", ajoute l'étude, notamment chez les très riches, et ce sans discontinuer sur la période étudiée qui s'étale sur près de 20 ans, entre 1992 et 2010.

L'étude prend en compte le fait que le mariage recule considérablement dans la société française, et porte sur les revenus des couples mariés, pacsés ou simples concubins, en se basant sur une vaste enquête réalisée tous les six ans par l'Insee sur le patrimoine des ménages.

"Ce n'est pas une surprise, tous les travaux de Piketty ont montré ce retour du patrimoine et des héritiers dans la société, mais c'est la première fois qu'on le quantifie ainsi", dit Nicolas Frémeaux.

Son étude est aussi très complémentaire des travaux des sociologues Monique et Michel Pinçon-Charlot sur les riches et l'oligarchie en France, montrant l'importance de "l'entre-soi" pour la préservation et la transmission des patrimoines, avec notamment les stratégies organisées autour des "rallyes" pour favoriser les rencontres et les mariages de jeunes issus des mêmes milieux.

N.G. avec AFP