3GSM World Congress : la téléphonie mobile accélère la convergence des médias
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N'importe où, à n'importe quel moment et sur n'importe quel terminal. Cette révolution, qui nécessite une refonte des équipements télécoms présents, a pris corps à Barcelone du 13 au 16 février dernier, lors du salon 3GSM, qui aura réuni plus de cinquante mille visiteurs.
Principaux clients et visiteurs du premier grand salon de l'année dédié aux télécommunications, les opérateurs mobiles pourront fournir d'ici peu tous les services dont on dispose sur les postes fixes. À condition toutefois de restructurer les réseaux autour du protocole IP et de l'architecture IMS (IP multimedia subsystem), socle des nouvelles offres. Avant la fin de cette année, le haut débit mobile va se concrétiser sur les téléphones et les PC portables grâce au HSDPA (High speed downlink packet access). Mais les services devront attendre les prochains réseaux IMS pour atteindre une nouvelle dimension. ' Tout le monde est désormais convaincu que l'avenir des réseaux appartient à IP, le tout est des avoir quelle méthode on utilisera pour relier les anciens réseaux à IP ', a déclaré Ling Chen, président européen de ZTE, l'un des deux principaux équipementiers chinois avec Huawei. Rappelons que la disponibilité du triple play (vidéo, internet et téléphone), liée à la nécessité d'accroître les débits, représente surtout pour les opérateurs une manière de compenser les baisses des revenus habituels de la voix.
Des étapes vers le très haut débit mobile
Première figure imposée et omniprésente sur les murs et les autobus de Barcelone : le téléchargement en haut débit mobile HSDPA. De nombreux équipementiers ont présenté des démonstrations. Trois fournisseurs, Option, Sierra Wireless et Novatel, proposent déjà des cartes HSDPA pour PC portables. Siemens a ainsi utilisé la carte Novatel ; et Nortel Networks, celle d'Option.Ericsson a réalisé des démonstrations avec ces trois fournisseurs. Le débit annoncé ?" et vérifiable en temps réel lors de téléchargements de vidéos en streaming ?" était de 3,6 Mbit/s. Qualcomm a même présenté un test à 7,2 Mbit/s (en additionnant la puissance de 2 antennes W-CDMA voisines), mais les premiers réseaux HSDPA commerciaux permettront d'ici quelques mois un débit de seulement 1,8 Mbit/s. Un bémol toutefois : cette vitesse est un débit crête, et le débit réel sera dépendant de la distance à l'antenne et du nombre d'utilisateurs connectés.Samsung, NEC ou LG ont, pour leur part, montré des téléphones mobiles HSDPA, qui diviseront donc par cinq le délai de téléchargement d'une vidéo, d'un film ou d'un fichier MP3 par rapport à la 3G. Par ailleurs, la vitesse du lien montant devrait également être améliorée grâce au standard HSUPA (High speed uplink access), attendu commercialement en 2007. Siemens et Nortel, par exemple, ont présenté des démonstrations de HSUPA pour des débits montants dopés à environ 1,5 Mbit/s, au lieu des 32 à 384 kbit/s actuels.Et le futur porte déjà un nom : HSOPA (High speed OFDM packet access). ' Ce qui devrait donner un débit de 37 Mbit/s en descendant et 25 Mbit/s dans le sens montant, souligne-t-on chez Nortel, en s'appuyant sur les technologies radio OFDM. '
De nouvelles interactions grâce à IMS
Pour créer de nouveaux services en intégrant les anciens, le futur réseau reposera sur IMS, l'acronyme le plus utilisé à Barcelone après le HSDPA. C'est lui qui permettra au téléphone mobile de devenir un as de la communication multimédia interactive en peer-to-peer. Sur le salon, mieux que des explications, des démonstrations sur les stands de Siemens, Nokia, Nortel, Ericsson ou Motorola ont stimulé les imaginations. Supposez que vous voulez indiquer à un ami ou à un contact professionnel un lieu de rendez-vous. Vous envoyez sur son téléphone le plan du quartier, vous dessinez via l'écran tactile de votre terminal le chemin à suivre, ce qu'il visualise tout en discutant avec vous. Ce service délivré en peer-to-peer sera rendu possible grâce à IMS.Techniquement, IMS revient à accoler un puissant canal de donnés transportant des paquets IP à la communication téléphonique, qui reste en mode circuit. De multiples usages du peer-to-peer entre tous types de terminaux (mobile, PC, TV) viendront enrichir les simples appels téléphoniques actuels. On pourra transmettre sa carte de visite, partager un fichier bureautique, une photo, une vidéo (filmée en temps réel avec le téléphone), de la musique, une émission de TV ou un jeu en réseau, et dialoguer par messagerie instantanée compatible avec GoogleTalk ou MSN Messenger. IMS amènera également une standardisation des services push-to-talk ou push-to-view.IMS ne sera pas indispensable pour tous ces nouveaux services ?" le push-to-talk est déjà disponible sous différentes formes, et on dispose de la messagerie instantanée selon la norme Wireless Village ?" mais il simplifiera grandement leurs déploiements. Chez les équipementiers, la course aux contrats IMS est lancée. Ericsson a marqué des points en annonçant avoir été retenu par l'opérateur Vodafone Group, et débutera par la mise en place de sa filiale japonaise. Autre révolution à venir, présente sur de nombreux stands : la convergence fixe-mobile. Elle consiste à utiliser le même combiné pour téléphoner moins cher sur une ligne fixe via internet ou sur un réseau cellulaire, GSM ou 3G. Un moyen d'y parvenir s'appelle UMA (Unlicensed mobile access). Concrètement, cela reviendra à transformer, par simple extension logicielle, le point d'accès Wi-Fi (qu'il s'agisse d'une Freebox, d'une Livebox ou d'un hot spot) en antenne GSM du réseau de l'opérateur mobile. La communication GSM sera encapsulée dans de l'IP. Conséquence : les services ainsi accessibles seront les mêmes que ceux du réseau GSM, et on conservera le même numéro d'appel.
Premier téléphone UMA chez Nokia
Lors du salon, Nokia a présenté le premier téléphone UMA grand public, le 6136, qui sera lancé commercialement au deuxième trimestre 2006. Le modèle est quadribande GSM et Wi-Fi. LG a également dévoilé un téléphone UMA Wi-Fi, et Motorola a présenté son A910 destiné aux services BT Fusion. Alcatel, pour sa part, a réalisé sur son stand une démonstration de la fonction précieuse de hand-over entre le réseau Wi-Fi et le réseau GSM, qui permet de basculer de façon transparente entre les deux réseaux sans interrompre une conversation lorsqu'on quitte son domicile. Le combiné mobile était fourni par Motorola. Chez Cisco Systems, une adaptation des logiciels UMA de Kineto sur une évolution des commutateurs-routeurs 7600 permet aussi d'intégrer toutes les communications GSM de portables bimodes Nokia. Les données transitent en interne dans les flux IPSec sans facturation, une économie énorme si l'on considère les nombreux échanges en entreprise. L'offre de Cisco est en cours de négociation chez l'opérateur Telefónica, qui vient déjà d'adopter ses infrastructures IP pour les réseaux GSM et 3G.
SIP-IMS, une convergence fixe-mobile en attente de normalisation
Reste que nombre d'équipementiers boudent UMA. ' C'est une solution de niche ', déclare-t-on chez Siemens, qui opte pour une convergence fixe-mobile fondée sur SIP-IMS. ' SIP-IMS permet des services d'interaction plus étoffés qu'UMA, et cela entre des terminaux aussi divers qu'un mobile, un PC, la TV, et quel que soit le réseau d'accès HSDPA, WiMAX ou Wi-Fi ', reprend-on chez Nortel, qui suit la même voie et rappelle qu'il est partenaire de Neuf cegetel avec son expérimentation Beautiful Phone. Le maintien de session propre à IMS devrait même permettre, en arrivant chez soi de basculer sur sa TV la vidéo que l'on regardait en streaming sur son mobile. Sur ses terminaux de démonstration sous pocket PC, Nortel utilisait les logiciels clients SIP (Session initiation protocol) de SIPquest et Cicero Networks.L'approche semble cependant moins aboutie qu'UMA. En particulier, la question du hand-over est loin d'être réglée. Siemens en a toutefois fait une démonstration à partir d'une implémentation propriétaire. On pouvait voir la conversation basculer du Wi-Fi sur le GSM. ' Une normalisation reposant sur le standard VCC (Voice call continuity) devrait voir le jour d'ici quelques mois ', dit-on chez NEC. Nortel est plus optimiste, qui table sur le deuxième trimestre de cette année. Chez Siemens, la démonstration a été réalisée avec un PDA 6915 de HP sous pocket PC, à la fois Wi-Fi et GSM, et doté d'un client logiciel SIP. Sur le stand de Nokia, cette même convergence était présentée sur un téléphone Wi-Fi/GSM, mais sans gestion du hand-over. À noter ?" et c'est habituel sur ce type d'équipement ?" que la voix sur Wi-Fi sur le PDA de HP était de mauvaise qualité, alors quelle était d'excellente facture sur les téléphones Nokia ou Motorola.
La convergence mobile-internet s'amplifie
Au-delà des sonneries, le téléchargement de clips de chansons à la demande, comme le font déjà SFR et NRJ, a également animé de façon très remarquée la plupart des stands. Les informations sur mesure de localisation sur sites web optimisés pour mobiles et les récentes interfaces utilisateurs ont renouvelé les écrans habituels des mobiles. Ces nouvelles enveloppes logicielles ne sont d'ailleurs plus forcément liées au format i-mode. Pour Gary Kovacs, vice-président d'Adobe Systems, qui vient de signer un partenariat avec les fabricants de mobiles Motorola, LG et Samsung, ' les jeunes veulent se distinguer avec des environnements spécifiques à leurs passions. Avec des interfaces interactives écrites en Flash et intégrant des clips, on a déjà plus d'un million d'utilisateurs au Japon. Cela intéresse les opérateurs en quête de fidélisation '.Chez les fournisseurs, la mode est aux téléphones baladeurs MP3, aux appareils photos mégapixels et aux accès internet. ' On lance des versions économiques de nos premiers PDA pour que les jeunes puissent accéder à internet aussi facilement dehors que chez eux, précise Sven Totte, directeur de la communication de Sony Ericsson. C'est la génération Now. Elle ne veut plus attendre. C'est tout, et tout de suite. ' Tout doit être disponible instantanément. Dans les rues barcelonaises, on découvrait d'ailleurs d'immenses affiches aux couleurs de Motorola et Samsung, qui ne vendaient pas seulement des produits fun, mais aussi un style de vie branché, dynamique, chatoyant. Une vision idyllique des télécoms qui se situe aux antipodes de la réalité des cascades de commutateurs d'Alcatel, Siemens, Lucent, Nokia ou Ericsson, capables de gérer des millions d'appels sans sourciller et d'en permettre la facturation instantanée, une des obsessions de tous les participants.