Bâtir un système de notation pertinent
Un nouvel arrêt de la cour d'appel suspend un dispositif d'évaluation des salariés
Le 21 septembre, la cour d'appel de Toulouse a suspendu le système d'évaluation des cadres d'Airbus. Cet arrêt remet sur la sellette des systèmes régulièrement décriés, notamment chez IBM, HP ou encore Microsoft. “ En soi, la notation des salariés n'est pas illicite, rappelle Deborah David, du cabinet Jeantet Associés, et avocate au Barreau de Paris. Ce qui l'est, en revanche, ce sont les systèmes de quotas et les critères d'évaluation comportementaux. ”Le système d'Airbus comprenait en effet des critères liés notamment au courage, une valeur morale, alors que la loi française n'autorise la notation que sur les aptitudes professionnelles en fonction d'objectifs précis. Mais c'est sur le “ forced ranking ”, ou système de quotas, qui consiste à fixer un seuil de mauvaises notes à atteindre lors des entretiens d'évaluation annuels, que les entreprises se font le plus souvent épingler.Dans les deux cas, la loi a prévu des garde-fous. Tout système doit, en effet, être soumis au comité d'entreprise, à la Cnil dès lors que les données personnelles des salariés sont informatisées, et enfin au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), la notation pouvant engendrer un stress chez le salarié.Appliquée selon les principes de la loi française, la notation est un droit de l'employeur qui comporte aussi des obligations. Une solution de remise à niveau (formation, reconversion, etc.) doit être proposée à tout employé rencontrant des difficultés. Les dérives sont souvent le fruit de sociétés américaines ayant des filiales en France ou de sociétés françaises sujettes au “ mimétisme de la réussite américaine ”. Aux Etats-Unis, le système est avant tout utilisé comme une grille d'attribution des augmentations de salaire, voire comme un motif de licenciement. Le “ forced ranking ” n'y est pas interdit. Rien d'étonnant, dès lors, qu'en France, IBM, HP ou Microsoft se fassent régulièrement attaquer sur cette question. L'application de la spécificité hexagonale les oblige à modifier des politiques globales pour une de leur filiale. Mais ici comme là-bas, “ il ne faut pas oublier qu'au-delà des aspects légaux, ces systèmes favorisent la compétition entre les salariés, souligne Deborah David. Poussés à l'extrême, ils peuvent nuire au travail d'équipe et au climat social. Ce sont donc des armes à double tranchant, qu'il faut manipuler avec précaution. ”
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