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En six ans, Bertrand Kientz a construit le système d'information de JCDecaux. Ces derniers mois, ce passionné et très charismatique DSI a travaillé sans relâche avec ses équipes sur le projet Vélib'.
S'il n'avait pas fait carrière dans l'informatique, il aurait peut-être été architecte en bâtiment. ' J'aime assez les côtés créatifs, scientifiques et rigoureux de cette
discipline ', dit Bertrand Kientz, DSI du groupe JCDecaux. Il aurait aussi bien pu être chercheur. ' J'ai démarré dans l'informatique appliquée. Mais le périmètre sur lequel je travaillais
avait beau s'élargir, j'étais embarqué dans une spécialité qui se rétrécissait. Or l'une de mes motivations est de travailler en équipe '. Il entre alors chez Air France en 1983. Il y restera 17 ans.
En 2001, il a envie de changer. Il rejoint JCDecaux, séduit par ses compétences très pointues dans les outils de gestion des revenus commerciaux (Yield Management). Sans transition, il se retrouve dans un groupe en forte croissance, qui entre en
Bourse mais où l'informatique est quasi inexistante. ' J'étais ouvert à plusieurs choses et j'ai trouvé chez JCDecaux une culture, un management et une maturité de l'informatique, mais avec beaucoup
d'années de retard. Le champ était vierge, les utilisateurs pas forcément mûrs, mais l'attente de la direction était très forte. ' Il met de l'ordre dans le réseau mondial et ses 150 points
d'extrémité. VPN, sécurité, accès internet, il construit l'informatique d'un groupe de 8 000 personnes, tout en gérant les attentes variées entre les filiales. ' Il ne faut surtout pas travailler
en mode rouleau compresseur. ' C'est aussi l'heure des premiers bilans. ' La direction générale s'est aperçue que l'informatique coûtait une fortune. Ils m'ont donc
demandé de mutualiser davantage. ' Bertrand Kientz applique alors ses propres principes de gouvernance. ' Je définis la gouvernance comme la copropriété de l'informatique. Les métiers
s'approprient leurs outils. L'informaticien les construit. ' En 2002-2003, le marché de la publicité se durcit. Il faut complexifier le marketing, trouver des combinaisons entre une offre de services et des
techniques de géomarketing notamment. La demande informatique des métiers devient très forte ' et surtout naturelle ', se félicite Bertrand Kientz. Y compris de la part des laboratoires de R&D.
' La créativité est une autre facette forte de JCDecaux. C'est dans nos gènes. Il faut toujours trouver de nouvelles idées pour gagner les concessions dans les villes. A l'instar de Vélib'. Il a fallu
déployer un SI autour des inventions électroniques géniales de la R&D, pour le système de paiement, de géolocalisation, etc. '
Aider les métiers à digérer les projets
Toujours en quête d'excellence opérationnelle, ' la marque du groupe ', aime-t-il à répéter, il étend cette culture à l'ensemble des projets qu'il écrème. Mais avec
170 informaticiens, le DSI de JCDecaux ne peut répondre à toutes les demandes. L'informatique de gestion commerciale stratégique est développée en interne. ' Mais notre but n'est pas d'avoir des
armées d'informaticiens. ' Il fait donc appel à des partenaires, Capgemini (projet SAP), EDS (outsourcing), ou Unilog (développement Java). Sans délaisser la technique pour autant, il insiste sur la maîtrise de
l'architecture applicative. ' L'interconnexion entre SAP et le développement spécifique nous a très vite posé un problème d'architecture. ' De même pour Vélib', connecter des
systèmes logiciels entre eux (IBM et Microsoft, notamment) n'a pas été évident. ' Nous nous sommes appuyés sur un référentiel métiers créé il y a quelques années, qui dialogue avec les commerciaux, SAP, les EAI, les
Middleware. ' A partir d'une architecture modulaire, il fait cohabiter des systèmes de très haute disponibilité (comme la location de vélos, pour Vélib') avec des applications de gestion back office moins
exigeantes. ' Les discours sur les architectures SOA, avec des composants qui interagissent entre eux, ça fait longtemps que je l'applique. Notre modularité est notre agilité ', affirme le
DSI.Ce que redoute Bertrand Kientz, ce sont les effets de rejets. ' J'ai créé des experts métier en maîtrise d'ouvrage capables d'aider les métiers et les patrons des filiales à digérer les
innovations. ' Avec ses partenaires externes, il éprouve d'autres difficultés. ' Il faut, là encore, être agile. Pour Vélib', j'ai dû renégocier avec EDS notre contrat
d'outsourcing signé pourtant pour cinq ans. Si le système s'arrête plus de 10 minutes, j'ai des millions de pénalité... ' Il se plaint aussi du manque de prévisibilité des fournisseurs.
' Nous utilisons beaucoup de produits Microsoft dans Vélib'. On aimerait y voir plus clair. Nous avons besoin d'installer des business models de longue durée. Le simple calcul du ROI est complètement dépassé.
Pour Vélib', personne ne me l'a demandé ! Ce qui est compliqué, c'est la modélisation économique des coûts de nos systèmes dans la durée. ' Des sujets sur lesquels cet infatigable travailleur
s'implique aussi au sein du Cigref. ' Quand on entend les analystes financiers affirmer que telle direction des services informatiques ne serait performante qu'à partir du moment où son TCO est inférieur à
1 % du chiffre d'affaires. Ça ne veut rien dire. J'ai envie de leur expliquer la vérité. '
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