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Un simple capteur relié par télécommunication à un système d'information central, c'est le schéma gagnant du machine to machine, ou M2M. Moindres interventions humaines, optimisation des processus et réactivité accrue, nouveaux
services... Les applications percent dans tous les secteurs d'activité.
Dans le conteneur, la température monte, les caisses de chocolat chauffent... Un capteur émet un signal, transmis par satellite au grossiste en confiserie qui attend sa commande. Celui-ci, jugeant l'avarie probable, renouvelle la
commande sans attendre, et son service juridique se prépare à faire jouer l'assurance. Certes, ce scénario n'est pas encore banal, mais les dispositifs de ce type se multiplient. Ils visent à l'automatisation de processus tels que la gestion des
alertes techniques dans les usines et les bâtiments, la géolocalisation de véhicules et la télérelève de compteurs domestiques (eau, électricité, gaz...). Autant d'applications bien rodées qui ne demandent qu'à être perfectionnées et déployées
massivement.Le concept de machine to machine rassemble des dispositifs qui associent l'informatique et les télécommunications. Leur principe : relier un capteur ou un objet fixe ou mobile à un système d'information central. L'explosion,
partout en Europe, des réseaux à haut débit sans fil (GPRS, UMTS, Wi-Fi, Wimax...) et la miniaturisation des équipements électroniques embarqués favorisent une croissance exponentielle. Le marché mondial pèse déjà 20 milliards d'euros. Il
dépassera 220 milliards en 2010. Selon le cabinet d'analyse Abi Research, le nombre des objets communicants dans le monde devrait atteindre 100 milliards d'ici à 2010 (on en prévoit plus de 13 milliards en Europe, surtout en RFID). Le seul suivi des
véhicules d'entreprise devrait en mobiliser près de 3 millions en Europe, contre moins de 600 000 aujourd'hui.Une fois n'est pas coutume, le secteur du transport fait figure de pionnier. Giraud International a totalement informatisé sa flotte. Ses 3 500 remorques et 2 000 camions embarquent des boîtiers électroniques fournis par
l'Américain Qualcomm. Ce dispositif couplant un GPS à un modem satellite autorise, entre autres, un contrôle à distance de l'activité du camion. L'exploitant sait si le chauffeur se repose, décharge son véhicule, ou s'il a quitté le trajet
initialement assigné. ' Ce système nous a aidés à éliminer 80 % des kilomètres " parasites ", car le chauffeur fait plus attention. Il en va de même pour la consommation de carburant : nous
savons combien de litres ont été consommés entre chaque plein ', indique Fabrice de Biasio, le DSI du transporteur, qui a consacré 3 millions d'euros aux développements informatiques de ces technologies.Les données des camions sont remontées plusieurs fois par jour via le satellite Eutelsat au système d'information. Lequel relie les 66 agences du groupe, implantées dans 15 pays. Point fort du système, l'affectation des missions tient
compte de la position des camions, mais aussi des heures de conduite effectuées par les chauffeurs. Cela évite de dépasser le nombre d'heures légal. Autre avantage, ces informations facilitent la préparation des fiches de paie des
conducteurs.Simplifier l'intervention des équipes sur le terrain constitue un autre enjeu stratégique. ' Le monde aéroportuaire fait travailler énormément d'acteurs sur les processus, explique Jean Verdier, le
DSI d'Aéroports de Paris. Citons les compagnies aériennes, les agences de manutention, les fournisseurs de carburant ou de plateaux-repas... Autant d'intervenants qu'il faut coordonner pour ne pas retarder les
décollages. ' Sa société a mis en place une plate-forme d'information à laquelle sont connectés les systèmes d'information des divers acteurs. Ce qui facilite l'automatisation et l'enchaînement des processus.
' Près de 80 % des personnes travaillant dans un aéroport sont nomades ', poursuit Jean Verdier, qui mise sur le déploiement de boîtiers GPS, d'étiquettes RFID, et la distribution d'assistants
personnels pour raccourcir les délais de prise de décision en ' acheminant les données au plus près des intervenants '. Et gagner ainsi en productivité. Ces efforts ont un coût : 4 millions
d'euros, investis notamment dans la géolocalisation des véhicules par satellite et le repérage par puces RFID des engins fixes, comme les groupes électrogènes. Désormais, les manutentionnaires se contentent de consulter leur assistant personnel pour
localiser l'endroit où se situe l'équipement dont ils ont besoin. De leur côté, les compagnies aériennes pourraient tirer profit de ces dispositifs en mutualisant leur équipement dans une optique de réduction des coûts.
Un lien entre le monde physique et le système nerveux des entreprises
Si les industriels n'ont pas de souci pour localiser leurs actifs, ils aimeraient détecter les pannes avant qu'elles ne se produisent. La majorité des usines disposent d'automates de gestion associés à de multiples capteurs, mais
rares sont celles qui bénéficient d'une maintenance prévisionnelle sur l'ensemble de leur parc. Principale raison : pour l'heure, les capteurs et autres équipements électroniques communiquent avec les applications métier au travers de
protocoles propriétaires. Une difficulté contournée par l'installation d'un modem GSM, GPRS ou Wi-Fi qui rendra communicant n'importe quel équipement, qu'il s'agisse de chaudières, de centrales de télésurveillance, de machines-outils, de
photocopieurs ou de tout autre appareil bureautique.Grâce à ces nouveaux modems, ces équipements dialogueront désormais via IP (Internet Protocol) avec n'importe quel système d'information. Il s'agit d'une véritable révolution, qui instaure un lien entre le monde physique des machines
et le système nerveux central des entreprises, comme le souligne Naji Najjar, directeur chez IBM de l'entité spécialisée dans les solutions alliant capteurs intelligents et instrumentation mécanique.Thierry Péreault, coordinateur des activités M2M chez Steria, entrevoit une multiplication des applications médicales. Grâce à la collecte d'informations recueillies par des capteurs disséminés auprès des malades, une poignée d'agents
suffira pour effectuer une télésurveillance et assurer une continuité de services. ' Le démarrage reste lent, mais j'ai la conviction que les applications de ce type vont exploser afin de répondre à des problèmes
d'optimisation des processus métier et de réduction des coûts ', jubile Thierry Péreault.Naji Najjar estime que ces processus profiteront pleinement de l'utilisation massive des briques intergicielles (ou middleware), considérées comme le pivot des applications de communication entre machines. L'expert d'IBM en déroule le
schéma : ces briques collectent, auprès de nombreux capteurs, les informations relatives à la pression ou à la température des machines, puis les dirigent, via un réseau sans fil, vers les applications métier, où elles sont traitées par un
outil d'analyse. Ce dernier produira des recommandations. Par exemple, la détection d'une anomalie déclenchera une alerte auprès du responsable des achats, qui commandera, si nécessaire, une pièce de rechange ou demandera un réapprovisionnement en
marchandises ou en consommables. A l'exemple de ces imprimantes Konica-Minolta fournies avec un modem GSM-GPRS capable de commander de cartouches d'encre au-dessous d'un certain seuil de remplissage, et de solliciter, en cas d'anomalie, une demande
d'intervention du constructeur, qui optimise ainsi les coûts d'intervention.
Des remontées à l'origine de services personnalisés
Konica-Minolta figure parmi les premiers utilisateurs de l'offre M2M mise en place par Orange. ' Nous avons déterminé six domaines d'application. Dont la gestion de flotte, la télésurveillance de bâtiments ou
d'équipements électroniques, la gestion de la chaîne logistique ou la surveillance des patients hospitalisés à domicile. Autant d'applications qui seront successivement lancées d'ici peu jusqu'en 2008 ' , indique Nicolas
Levi, directeur marketing international de l'offre M2M d'Orange. Cet opérateur de télécommunications se distingue de ses concurrents par une plate-forme intergicielle qui fait transiter les données provenant des machines jusqu'aux applications de
ses clients. Evidemment, Orange n'est pas le seul à s'intéresser à ce marché qui promet des revenus récurrents. Tous les opérateurs de téléphonie mobile de France proposent d'ailleurs des bouquets de forfaits données pour des sommes allant de 5 à 50
euros. De quoi satisfaire tous les besoins.Non contentes de générer des gains de productivité, ces technologies ont vocation à créer de nouveaux services. En témoigne l'opérateur autoroutier Cofiroute, qui les met en avant pour commercialiser son offre de télépéage
automatique. A la clé, des tarifs personnalisés pour ses abonnés. A l'origine, il s'agissait de fluidifier et de sécuriser le trafic en distribuant des badges évitant de faire la queue aux péages. Grâce à ce système d'identification, l'opérateur
acquiert une meilleure connaissance des habitudes de ses abonnés, auxquels il adresse des offres individualisées selon leurs profils et trajets habituels.Améliorer le service rendu au client sans augmenter les tarifs, tel est le tour de force réalisé par le Strasbourgeois EPS, première entreprise française de télésurveillance dans le domaine résidentiel avec 100 000 abonnés.
' Depuis dix ans, nos tarifs n'ont pas bougé, alors que notre offre de services s'est étoffée ', souligne fièrement Jean-Christophe Simon, le directeur produits. Depuis un an et demi, ses clients
disposent de systèmes connectés, non pas à un modem filaire, mais à un boîtier GPRS qui les lie à l'informatique de l'entreprise. Cette dernière en tire plusieurs avantages : elle peut paramétrer à distance les capteurs et, surtout, faire
remonter les données enregistrées par les capteurs et systèmes d'alarme. EPS a poussé assez loin l'automatisation des procédures. Quand une alarme se met en branle, elle remonte au système d'information, qui analyse les données et les transmet à la
personne concernée. Cela engendre divers scénarios, depuis le déplacement d'un agent sur place jusqu'à l'envoi à l'abonné d'un simple courrier pour lui signaler qu'il faut changer la pile. ' Tout est traité automatiquement,
même lorsqu'un déplacement donne lieu à une facturation ', se félicite Jean-Christophe Simon, qui travaille main dans la main avec la DSI.
Des données confidentielles sous contrôle de la Cnil
Même constat pour Hervé Sabiaux, directeur technique d'Hervé Consultants, spécialisé dans le conseil en nouvelles technologies pour l'industrie. Celui-ci souligne que la DSI est concernée à plusieurs titres. Elle doit veiller à la
sécurité des protocoles, se préoccuper des problématiques d'accès et de l'intégration des données issues des capteurs. Mais elle doit aussi se poser des questions concernant l'usage et la rentabilité attendue des projets de ce type. Il ne s'agit pas
de problèmes spécifiques, précise Thierry Péreault, qui préconise de s'enquérir auprès de la Cnil des droits des usagers en termes de confidentialité des données. Un problème auquel les clients peuvent se montrer particulièrement
sensibles !