Charles Beigbeder et Bruno Chomel (Poweo) : ' notre système d'information nous crédibilise '
A partir du 1er juillet 2007, les particuliers choisiront librement leur fournisseur de gaz et d'électricité. Poweo compte profiter de cette libéralisation pour détourner plusieurs millions de clients d'EDF et de GDF. En s'appuyant notamment sur les technologies de l'information.
Comment une PME peut-elle rivaliser avec des entreprises de la taille d'EDF ou de GDF ?
Charles Beigbeder : nous bénéficions d'une première expérience sur le marché professionnel. Depuis 2004, les sociétés choisissent leur prestataire pour s'approvisionner en gaz et en électricité. Elles sont 80 000 à avoir opté pour nos services. Le 1er juillet 2007 s'ouvre le marché de masse des particuliers, qui se chiffre en millions de clients potentiels. En ce qui nous concerne, nous devrions démarrer avec plusieurs dizaines de milliers de foyers dès le début de l'été. Outre la qualité de notre offre commerciale, c'est notre capacité à traiter ces clients sans rupture de leur approvisionnement qui établira notre réputation. Et pour cela, nous devons nous appuyer sur un système d'information très performant.
Bruno Chomel : pour faire preuve de réactivité, Poweo a misé sur des processus automatisés au maximum. Par exemple, toutes les démarches d'inscription s'effectuent sur internet. Nous visons un objectif de 100 000 nouveaux clients cette année. La moitié devraient venir directement du net, via notre site Poweo.com. Et si nous avons renoncé à lancer un réseau de boutiques, nos abonnements devraient prochainement se voir commercialiser par un réseau de partenaires : grandes surfaces, magasins de proximité... L'important étant que, lorsque des consommateurs décident de souscrire à nos services, nous puissions les accueillir sans délai, et sans interruption dans l'alimentation en électricité.Votre expérience à la tête de Selftrade, entreprise à succès des débuts de l'ère internet, vous a-t-elle servi au cours de ce lancement ?
C.B. : cette comparaison me semble pertinente, car les ordres boursiers d'achat et de vente à des cours précis exigent la même connaissance en matière de volumes transactionnels. C'est un marché entièrement dématérialisé, et les clients exigent que leur ordre soit considéré à la minute près. Si l'ouverture totale à la concurrence du marché de l'énergie sera juridiquement effective dès le début juillet, je pense que l'été sera encore une période d'observation et de pédagogie. Les familles vont en entendre parler, se renseigner et ne songeront à changer d'opérateur qu'à partir de la rentrée. Ce contexte devrait faciliter le lancement sans heurts de notre activité.D'un point de vue technologique, en quoi se distinguent la plate-forme professionnelle et celle appelée à s'occuper du grand public ?
B.C. : en 2004, nous avons préféré partir de zéro et développer notre propre solution propriétaire. Nous savions précisément ce dont nous avions besoin et nous ne trouvions rien de satisfaisant sur le marché. Aujourd'hui, cette plate-forme gère quelque 3,4 millions d'utilisateurs. Néanmoins, nous avions pleinement conscience qu'elle ne pourrait pas fonctionner à l'échelle d'un marché plus vaste, tel que celui des particuliers. Et vu le risque couru, nous ne tenions pas à recourir à des solutions qui n'auraient pas déjà fait leurs preuves. Pas question d'essuyer les plâtres technologiques, surtout quand on traite avec Madame ou Monsieur Tout-le-monde. C'est la raison pour laquelle nous avons investi sept millions d'euros dans un nouveau système d'information approprié. En achetant des logiciels standards, par exemple pour la facturation ou la gestion de la relation client (GRC), fonctions auxquelles nous ne pouvions apporter aucune valeur ajoutée. En revanche, le portail internet, notre vitrine et espace de commercialisation principal, ainsi que la Poweo Box ont été développés en interne. Nous en connaissons tous les rouages, et pouvons le réparer nous-mêmes à tout instant en cas de panne.Comment fonctionne la Poweo Box ?
B.C. : en matière de système d'information, notre marché d'inspiration est assurément celui des télécoms. Nous vivons actuellement dans le secteur de l'énergie les mêmes bouleversements économiques et juridiques que ceux qu'a connus le marché des télécommunications voici dix ans. Alors, nous avons concentré notre technologie dans un boîtier fabriqué par Sagem, qui sera connecté au compteur électrique du consommateur. Un petit terminal autorisera chaque client à suivre sa consommation, les relevés étant effectués toutes les dix minutes. Il saura ainsi précisément ce que lui coûte sa consommation. Et il aura accès à son historique sur son compte, qui est accessible à partir du site internet.Avez-vous déposé un brevet pour cette technologie ?
C.B. : non. Lorsqu'on procède à un dépôt de brevet pour un produit, le problème est que l'on doit communiquer par le détail son contenu. Alors que, plus que la protection juridique, dans notre métier, c'est l'imagination dans le service et la rapidité de mise à disposition du marché qui font la différence. En outre, l'innovation demeure ici avant tout une question de processus, lesquels sont de toute façon non brevetables. Toutefois, nous avons créé un poste de responsable innovation et recherche et développement au sein de l'équipe informatique.En ne recourant pas au brevet, n'êtes-vous pas en contradiction avec votre responsabilité de président de la commission Innovation, recherche et nouvelles technologies du Medef ?
C.B. : je ne le pense pas. Car l'innovation ne doit certainement pas se résumer à la recherche et au développement ou à des questions technologiques. Il peut s'agir de nouveaux processus de marketing, de nouveaux modèles économiques ou de nouveaux procédés commerciaux.Quelle est votre implication personnelle dans la gestion de l'informatique de la société ?
C.B. : vous l'avez rappelé, à l'origine, je suis un entrepreneur issu d'internet. Je me montre donc très attentif aux possibilités que procurent les technologies de l'information. Tant du point de vue de la gestion de l'entreprise que des services qu'elles permettent de fournir aux consommateurs. Pour la technique pure, je suis un fervent partisan de la subsidiarité : chaque niveau de compétence doit être responsable de son domaine. Sans que tous les sujets aient besoin de remonter systématiquement jusqu'au PDG. C'est un choix de management.
B.C. : je passe beaucoup de temps à soigner les recrutements et à rencontrer les consultants externes qui travaillent pour nous. Ils sont environ une trentaine à ce jour. Dans notre activité, le système d'information représente un gage de crédibilité vis-à-vis des marchés financiers. Et le degré de technicité nécessaire constitue une sérieuse barrière à l'entrée pour un nouvel arrivant sur ce marché, Qui peut se résumer à un dispositif de gestion des flux.Un dispositif de gestion des flux ?
B.C. : Poweo transmet ses prévisions d'achat d'électricité à RTE, l'opérateur de transport électrique. Si nous ne respectons pas ces prévisions, nous devons lui verser des pénalités. Cela suppose donc que nous sachions prévoir au mieux les volumes d'énergie que vont consommer nos clients en fonction de leur situation géographique, du climat ou de l'heure de la journée. En 2004, quand nous avons débuté, ces écarts nous coûtaient l'équivalent de plusieurs points de nos achats globaux. Aujourd'hui, cela se limite à 1 %. L'électricité n'est pas un bien que l'on peut stocker. Il faut savoir gérer les quantités au plus juste des besoins.Fixez-vous des objectifs chiffrés à la DSI de Poweo pour qu'elle contribue à la rentabilité de l'entreprise ?
C.B. : l'objectif de la DSI pour 2007 est d'abord que le système d'information fonctionne sans accroc. Et que l'ensemble de la structure absorbe sans peine la montée en charge liée à l'ouverture à la concurrence. Ensuite, nous avons bâti un ratio de performance du coût d'exploitation dans le cadre d'un plan sur cinq ans. Nous nous sommes inspirés de ce qui se faisait en Grande-Bretagne, le pays d'Europe qui dispose de l'expérience la plus ancienne en matière de concurrence.Quelle est votre approche logicielle ?
B.C. : nous ne défendons aucun dogme à ce sujet. Libre ou propriétaire, nous regardons ce qui existe de plus pertinent dans chaque domaine. Ainsi, pour effectuer les opérations de facturation, je préfère un progiciel stabilisé. Car c'est un outil de productivité, et je ne souhaite pas prendre de risque technologique. Pour notre portail, nous nous appuyons largement sur des plates-formes de logiciels libres. Mes expériences passées dans les télécoms - j'ai participé aux lancements en France de grands projets comme AOL, Orange ou Wanadoo - m'ont appris que l'innovation est surtout un état d'esprit. Et qu'en matière de technologies, il ne doit pas y avoir de solutions de type ' vache sacrée '.Que reste-il de l'esprit start up du début des années 2000 ?
C.B. : une vraie capacité à se remettre en cause. A ne jamais croire qu'une situation ou un marché restera figé. De plus, cette période particulière nous a appris à veiller à la qualité du recrutement des équipes. En recherchant certes la compétence, mais aussi la motivation personnelle. De l'interaction entre les collaborateurs naîtra la réussite collective.
B.C. : c'est sans doute aussi pour cela que nous choisissons nos prestataires plutôt parmi les structures de petite taille. Elles se montrent souvent plus réactives et imaginatives. Même si, pour certains chantiers, notamment pour se faire assister sur la conduite de projet, nous faisons appel à des entités plus étoffées telles qu'Unilog ou Cap Gemini.
Charles Beigbeder : nous bénéficions d'une première expérience sur le marché professionnel. Depuis 2004, les sociétés choisissent leur prestataire pour s'approvisionner en gaz et en électricité. Elles sont 80 000 à avoir opté pour nos services. Le 1er juillet 2007 s'ouvre le marché de masse des particuliers, qui se chiffre en millions de clients potentiels. En ce qui nous concerne, nous devrions démarrer avec plusieurs dizaines de milliers de foyers dès le début de l'été. Outre la qualité de notre offre commerciale, c'est notre capacité à traiter ces clients sans rupture de leur approvisionnement qui établira notre réputation. Et pour cela, nous devons nous appuyer sur un système d'information très performant.
Bruno Chomel : pour faire preuve de réactivité, Poweo a misé sur des processus automatisés au maximum. Par exemple, toutes les démarches d'inscription s'effectuent sur internet. Nous visons un objectif de 100 000 nouveaux clients cette année. La moitié devraient venir directement du net, via notre site Poweo.com. Et si nous avons renoncé à lancer un réseau de boutiques, nos abonnements devraient prochainement se voir commercialiser par un réseau de partenaires : grandes surfaces, magasins de proximité... L'important étant que, lorsque des consommateurs décident de souscrire à nos services, nous puissions les accueillir sans délai, et sans interruption dans l'alimentation en électricité.Votre expérience à la tête de Selftrade, entreprise à succès des débuts de l'ère internet, vous a-t-elle servi au cours de ce lancement ?
C.B. : cette comparaison me semble pertinente, car les ordres boursiers d'achat et de vente à des cours précis exigent la même connaissance en matière de volumes transactionnels. C'est un marché entièrement dématérialisé, et les clients exigent que leur ordre soit considéré à la minute près. Si l'ouverture totale à la concurrence du marché de l'énergie sera juridiquement effective dès le début juillet, je pense que l'été sera encore une période d'observation et de pédagogie. Les familles vont en entendre parler, se renseigner et ne songeront à changer d'opérateur qu'à partir de la rentrée. Ce contexte devrait faciliter le lancement sans heurts de notre activité.D'un point de vue technologique, en quoi se distinguent la plate-forme professionnelle et celle appelée à s'occuper du grand public ?
B.C. : en 2004, nous avons préféré partir de zéro et développer notre propre solution propriétaire. Nous savions précisément ce dont nous avions besoin et nous ne trouvions rien de satisfaisant sur le marché. Aujourd'hui, cette plate-forme gère quelque 3,4 millions d'utilisateurs. Néanmoins, nous avions pleinement conscience qu'elle ne pourrait pas fonctionner à l'échelle d'un marché plus vaste, tel que celui des particuliers. Et vu le risque couru, nous ne tenions pas à recourir à des solutions qui n'auraient pas déjà fait leurs preuves. Pas question d'essuyer les plâtres technologiques, surtout quand on traite avec Madame ou Monsieur Tout-le-monde. C'est la raison pour laquelle nous avons investi sept millions d'euros dans un nouveau système d'information approprié. En achetant des logiciels standards, par exemple pour la facturation ou la gestion de la relation client (GRC), fonctions auxquelles nous ne pouvions apporter aucune valeur ajoutée. En revanche, le portail internet, notre vitrine et espace de commercialisation principal, ainsi que la Poweo Box ont été développés en interne. Nous en connaissons tous les rouages, et pouvons le réparer nous-mêmes à tout instant en cas de panne.Comment fonctionne la Poweo Box ?
B.C. : en matière de système d'information, notre marché d'inspiration est assurément celui des télécoms. Nous vivons actuellement dans le secteur de l'énergie les mêmes bouleversements économiques et juridiques que ceux qu'a connus le marché des télécommunications voici dix ans. Alors, nous avons concentré notre technologie dans un boîtier fabriqué par Sagem, qui sera connecté au compteur électrique du consommateur. Un petit terminal autorisera chaque client à suivre sa consommation, les relevés étant effectués toutes les dix minutes. Il saura ainsi précisément ce que lui coûte sa consommation. Et il aura accès à son historique sur son compte, qui est accessible à partir du site internet.Avez-vous déposé un brevet pour cette technologie ?
C.B. : non. Lorsqu'on procède à un dépôt de brevet pour un produit, le problème est que l'on doit communiquer par le détail son contenu. Alors que, plus que la protection juridique, dans notre métier, c'est l'imagination dans le service et la rapidité de mise à disposition du marché qui font la différence. En outre, l'innovation demeure ici avant tout une question de processus, lesquels sont de toute façon non brevetables. Toutefois, nous avons créé un poste de responsable innovation et recherche et développement au sein de l'équipe informatique.En ne recourant pas au brevet, n'êtes-vous pas en contradiction avec votre responsabilité de président de la commission Innovation, recherche et nouvelles technologies du Medef ?
C.B. : je ne le pense pas. Car l'innovation ne doit certainement pas se résumer à la recherche et au développement ou à des questions technologiques. Il peut s'agir de nouveaux processus de marketing, de nouveaux modèles économiques ou de nouveaux procédés commerciaux.Quelle est votre implication personnelle dans la gestion de l'informatique de la société ?
C.B. : vous l'avez rappelé, à l'origine, je suis un entrepreneur issu d'internet. Je me montre donc très attentif aux possibilités que procurent les technologies de l'information. Tant du point de vue de la gestion de l'entreprise que des services qu'elles permettent de fournir aux consommateurs. Pour la technique pure, je suis un fervent partisan de la subsidiarité : chaque niveau de compétence doit être responsable de son domaine. Sans que tous les sujets aient besoin de remonter systématiquement jusqu'au PDG. C'est un choix de management.
B.C. : je passe beaucoup de temps à soigner les recrutements et à rencontrer les consultants externes qui travaillent pour nous. Ils sont environ une trentaine à ce jour. Dans notre activité, le système d'information représente un gage de crédibilité vis-à-vis des marchés financiers. Et le degré de technicité nécessaire constitue une sérieuse barrière à l'entrée pour un nouvel arrivant sur ce marché, Qui peut se résumer à un dispositif de gestion des flux.Un dispositif de gestion des flux ?
B.C. : Poweo transmet ses prévisions d'achat d'électricité à RTE, l'opérateur de transport électrique. Si nous ne respectons pas ces prévisions, nous devons lui verser des pénalités. Cela suppose donc que nous sachions prévoir au mieux les volumes d'énergie que vont consommer nos clients en fonction de leur situation géographique, du climat ou de l'heure de la journée. En 2004, quand nous avons débuté, ces écarts nous coûtaient l'équivalent de plusieurs points de nos achats globaux. Aujourd'hui, cela se limite à 1 %. L'électricité n'est pas un bien que l'on peut stocker. Il faut savoir gérer les quantités au plus juste des besoins.Fixez-vous des objectifs chiffrés à la DSI de Poweo pour qu'elle contribue à la rentabilité de l'entreprise ?
C.B. : l'objectif de la DSI pour 2007 est d'abord que le système d'information fonctionne sans accroc. Et que l'ensemble de la structure absorbe sans peine la montée en charge liée à l'ouverture à la concurrence. Ensuite, nous avons bâti un ratio de performance du coût d'exploitation dans le cadre d'un plan sur cinq ans. Nous nous sommes inspirés de ce qui se faisait en Grande-Bretagne, le pays d'Europe qui dispose de l'expérience la plus ancienne en matière de concurrence.Quelle est votre approche logicielle ?
B.C. : nous ne défendons aucun dogme à ce sujet. Libre ou propriétaire, nous regardons ce qui existe de plus pertinent dans chaque domaine. Ainsi, pour effectuer les opérations de facturation, je préfère un progiciel stabilisé. Car c'est un outil de productivité, et je ne souhaite pas prendre de risque technologique. Pour notre portail, nous nous appuyons largement sur des plates-formes de logiciels libres. Mes expériences passées dans les télécoms - j'ai participé aux lancements en France de grands projets comme AOL, Orange ou Wanadoo - m'ont appris que l'innovation est surtout un état d'esprit. Et qu'en matière de technologies, il ne doit pas y avoir de solutions de type ' vache sacrée '.Que reste-il de l'esprit start up du début des années 2000 ?
C.B. : une vraie capacité à se remettre en cause. A ne jamais croire qu'une situation ou un marché restera figé. De plus, cette période particulière nous a appris à veiller à la qualité du recrutement des équipes. En recherchant certes la compétence, mais aussi la motivation personnelle. De l'interaction entre les collaborateurs naîtra la réussite collective.
B.C. : c'est sans doute aussi pour cela que nous choisissons nos prestataires plutôt parmi les structures de petite taille. Elles se montrent souvent plus réactives et imaginatives. Même si, pour certains chantiers, notamment pour se faire assister sur la conduite de projet, nous faisons appel à des entités plus étoffées telles qu'Unilog ou Cap Gemini.
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