Collectivités locales : des services télécoms à inventer
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Les technologies de l'information et de la communication font partie intégrante du paysage des collectivités locales. Ces dernières rivalisent d'ingéniosité pour déployer les nouveaux services de la relation citoyenne.
Depuis que les collectivités locales sont autorisées à déployer et à gérer des réseaux de télécommunications, elles ne s'en privent pas ! Elles profitent de l'article 1425-1 de la loi sur l'économie numérique (LEN), voté voici
déjà deux ans. Mais fournir du haut débit aux administrés et aux entreprises, c'est bien. Leur proposer des services, c'est mieux. ' Problème : si l'on aborde avec les élus des sujets sur les TIC sous un angle trop
technologique, peu y seront sensibles ', affirme Nicolas Chung, délégué aux TIC à l'Association des régions de France (ARF). Selon lui, il faut leur parler ' de services et d'usages bien calés sur les
problèmes politiques de leur région '. Un nouveau besoin, bien compris par France Télécom. ' Installer des réseaux ne suffit pas. Il faut aussi et surtout développer des services. C'est d'ailleurs dans
la foulée du plan Haut Débit pour tous que nous avons lancé le programme 3X10 ', dit Bruno Janet, directeur des relations avec les collectivités locales. Un nouveau programme que l'opérateur décline sur trois domaines :
la gestion interne de la collectivité locale, l'amélioration de la vie des concitoyens, et le développement économique du territoire. Trois ressorts, que France Télécom a répartis sur trois périodes. Entre 2005 et 2006, il s'engage à développer 10
services ou produits. Entre 2006 et 2007, il en déploiera 10 autres. Les années suivantes, lors d'une troisième phase, apparaîtront 10 nouveaux services.Sur le terrain, initiatives et projets ont déjà débuté. Il y a quinze jours, l'Auvergne annonçait ainsi que la région allait déployer 90 points visio public (PVP) dans le département. Ces bornes interactives recréent des guichets
virtuels, qui aident le public à prendre rendez-vous avec des organismes comme l'ANPE ou la Mutuelle agricole, sans avoir à se déplacer (lire 01 Informatique, n?' 1856, page 22).
Une unité R&D de France Télécom
Pour proposer ce type de nouveautés, France Télécom s'appuie sur l'unité de recherche ' services publics ' de sa division R&D. ' Notre équipe est composée
d'ingénieurs, de chefs de projet, d'ergonomes et de sociologues ', détaille Pascal Boussemart, responsable de l'unité. Dans son laboratoire de Grenoble, l'équipe se penche ainsi sur tous les services que peuvent réclamer les
collectivités dans des domaines aussi divers que le développement durable, les déplacements urbains, le maintien à domicile des personnes ou la citoyenneté. ' Nous innovons, expérimentons, lançons des pilotes et, enfin,
diffusons les nouveaux services. Le plus curieux, c'est que la partie la plus compliquée concerne justement cette même diffusion. Il faut absolument faire évoluer les organisations pour qu'elles adoptent ces nouvelles
technologies ', insiste pourtant Pascal Boussemart. Céline Farges, responsable des TIC de la communauté de communes du Val de Vienne et responsable du développement de la mairie d'Aixe-sur-Vienne avait opté, en 2002, pour
l'offre Intralocal de l'opérateur. Un intranet clés en main facile à personnaliser et, surtout, peu onéreux pour une communauté de communes tout juste naissante. ' France Télécom nous avait précisé que ce produit serait suivi
et qu'il bénéficierait de nouvelles évolutions. ' Mais l'opérateur n'a pas tenu son engagement. La communauté de communes, pourtant la première à avoir sélectionné l'offre de l'opérateur, s'est donc finalement tournée vers
une société de services (Anylog) pour acquérir une nouvelle solution. L'enseignement que Céline Farges en tire est toutefois largement positif : ' Cet outil nous a aidés à fédérer une dizaine de communes qui, auparavant,
ne se parlaient pas. '
Vaincre les réticences
Mais toutes les initiatives ne sont pas aussi rondement menées : manque de personnel, de budget, ou tout simplement d'idées. Lorsqu'il s'agit de déployer des services, les réfractaires au changement ne manquent pas non plus de se
faire connaître. ' Idéalement, les TIC doivent être placées au centre de l'organisation, et les projets portés au moins par le directeur général des services ', explique Nicolas Chung. Un avis que
partage pleinement Bruno Perrin, directeur des systèmes d'information du conseil général du Val-d'Oise : ' Il ne faut surtout pas que les projets comme l'e-Administration soient subis par les directeurs et les élus. Ce
sont des projets qu'ils doivent maîtriser et porter eux-mêmes. ' De même, Claude Lambey, directeur des TIC de la ville de Besançon, reconnaît que ' la résistance au changement fait partie de
l'humain '. Mais tempère toutefois son propos : ' Nous avons connu beaucoup plus de résistance lorsque nous avons lancé l'informatisation, il y a vingt ans, que l'on en rencontre aujourd'hui pour
déployer les services. 'Quant aux partenaires, ' les opérateurs et les SSII ont un rôle à jouer. Peu de collectivités locales ont la capacité de développer elles-mêmes des applications ', poursuit Nicolas Chung.
A l'instar du conseil général du Val-d'Oise, qui a mis en place sa plate-forme WebCT95, bâtie sur des logiciels libres. Cette application complète d'e-Administration autorise les citoyens à accéder aux services scolaires et périscolaires, à toutes
les démarches administratives, etc. Fier de ce bouquet de services, Bruno Perrin a d'ailleurs décidé d'inviter ses collègues des autres départements pour leur proposer de le copier chez eux. ' Comme tout est développé à partir
de logiciels libres, cette plate-forme est très facilement réplicable et personnalisable pour les autres départements. 'Selon Nicolas Chung, les fournisseurs doivent désormais être aussi compétents sur les problématiques des collectivités qu'ils le sont pour les entreprises privées. Pourquoi ne pas considérer la région et le département comme des
grands comptes, les communautés de communes comme des PME, et les communes comme des TPE ? Pour l'ARF, structurer la filière TIC dans les régions est impératif. ' Il faut mener de front le combat de l'infrastructure et
des services. Et faire connaître les acteurs des technologies de l'information et de la communication dans chaque région pour que les personnes en charge des projets trouvent le bon fournisseur pour les accompagner ', affirme
Nicolas Chung. Et si les services tardent à se mettre en place en raison de réfractaires ou par manque de compétences, le risque de voir les services administratifs peu à peu se privatiser deviendra une réalité. A l'instar de Liverpool, qui a confié
sa relation avec les citoyens à une entreprise détenue à 80 % par BT.j.desvouges@01informatique.presse.fr