Les directions générales veulent comprendre ce qui se passe
' à l'informatique '. Ou, plus exactement, s'assurer qu'il y a bien un pilote dans ce supertanker qu'est une DSI. Pour
satisfaire une demande aussi légitime, certains directeurs des systèmes d'information ont imaginé faire comprendre leur rôle en positionnant leur structure comme une sorte de
' SSII ' interne. Recourir
à un modèle extérieur (nul n'est prophète en son pays) qui rassemble trois ingrédients marquants ?" l'informatique, le professionnalisme, et l'esprit de services ?" s'avère assez habile pour rassurer des directions générales promptes à
s'inquiéter que la DSI n'échappe à tout contrôle. Cette idée de positionner la DSI comme une
' SSII interne ' a d'ailleurs été généralement bien accueillie. Un succès facile, qui aurait peut-être dû
mettre la puce à l'oreille...Certes, les DSI qui opèrent sous forme d'un GIE ou d'une filiale informatique bénéficient, elles, de quelques moyens d'action équivalents à ceux d'une SSII. Mais la comparaison globale reste néanmoins très discutable. Comment les DSI
pourraient-elles sortir gagnante d'un comparatif tronqué ? La réponse est claire : elles ne le peuvent pas. Et d'ailleurs, cette référence est dans la plupart des cas purement déclarative et incantatoire...
Une fausse bonne idée
Si l'on considère les
' vraies DSI ', on constate qu'elles ne maîtrisent que très peu leur politique de ressources humaines, levier pourtant essentiel au métier de SSII. Elles ne
contrôlent pas non plus leurs actifs (compte de bilan), condition capitale pour déplacer des coûts annuels en coûts pluriannuels, véritable prérequis pour s'engager dans les services récurrents de type infogérance. En clair, les DSI ne disposent
d'aucune des marges de man?"uvre technique, économique, financière, organisationnelle ou sociale d'une SSII.Si se référer au modèle SSII apporte un rapide succès d'estime, celui-ci tourne vite au cauchemar. Notamment lorsque l'entreprise met en concurrence ce qui ne devrait pas l'être dans le cadre d'une relation
' client-fournisseur ' souvent immature. Mais lorsque l'on propose à son patron un mauvais référentiel (même avec de bonnes raisons), on ne peut pas lui reprocher, par la suite, qu'il l'utilise...
Il devient donc urgent de ranger le concept de
' SSII interne ' dans le placard des fausses bonnes idées !L'entreprise a besoin de maîtriser globalement son système d'information (SI). Elle doit pouvoir compter sur des conseillers certes dévoués et serviables, mais surtout compétents et habiles ! Il convient donc de l'impliquer dans
la réussite de l'entreprise. Une réussite qui passe, on le sait, de plus en plus par la maîtrise globale du SI. Ces conseillers doivent donc se concentrer sur les problèmes globaux tels que l'urbanisation du SI, l'innovation et le développement des
usages, entre autres. Des préoccupations totalement étrangères aux SSII, car hors de leur modèle.
Un quiproquo de plus en plus pesant
Une question se pose alors aux DSI : peut-on cumuler ces missions de la plus haute importance et celles, plus traditionnelles, de développement informatique et de qualité de service ? Une interrogation d'autant plus cruciale
que ces activités classiques peuvent, elles, être opérées par des SSII. Bien sûr, l'externalisation n'est pas la panacée, surtout lorsqu'elle est pratiquée de manière globale. Mais elle est domesticable lorsque l'on maîtrise l'architecture de son SI
et que l'on contribue significativement à l'innovation...Il serait donc dommage que les progrès réalisés ces dernières années par la plupart des DSI en matière d'urbanisation et de gestion de la transformation ?" et qui méritent d'être poursuivis ?" soient
' plombés ' par ce quiproquo de plus en plus pesant ! Nombre de DSI méritent d'être jugées sur des critères autres que ceux que l'on prête un peu facilement aux SSII, à savoir professionnalisme et
serviabilité. Les entreprises y gagneraient également. Car pourquoi s'embarrasseraient-elles d'une SSII interne, alors qu'il y en a autant qui frappent à leur porte pour devenir partenaires stratégiques ?
* Cristophe Deshayes, président de Documental, observatoire impertinent des systèmes dinformation (www.documental.com)
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