Demain c'est votre smartphone qui va remplacer les agences bancaires


La société générale prévoirait de fermer d’ici 5 ans 400 établissements. Les autres banques vont-elles suivre? Est-ce le début d’un grand mouvement ? Les agences bancaires vont-elles être "ubérisées"? L'analyse de Philippe Herlin, économiste, auteur de "Apple, Bitcoin, Paypal, Google : la fin des banques ?" (Ed Eyrolles)
La Société Générale prévoirait de fermer 400 établissements bancaires. Un cas isolé ? Certainement pas. Ce n’est que le début d’un vaste mouvement, car les banques doivent impérativement réduire leurs coûts de fonctionnement. 260.000 salariés travaillent dans la banque de détail, c’est beaucoup, c’est trop, d’autant que les clients se connectent de plus en plus à leur compte via leur ordinateur ou leur smartphones, ils mettent de moins en moins les pieds dans leur agence.
Ces coûts de structure, les banques les répercutent sur leurs clients, les particuliers (à travers les frais bancaires) et les commerçants (à travers les frais de carte bleue, 2 à 3% du prix de vente). Les clients considèrent, à juste raison, qu’ils payent trop cher ces services bancaires. Ce qui décide les banques à se restructurer aujourd’hui, c’est l’arrivée de nouveaux concurrents.
Apple veut endormir les banques
Des concurrents venus du monde de la high-tech et des télécoms. Orange commence à s’implanter en Europe. On connaît également Apple Money qui permet de payer avec son iPhone (aux Etats-Unis pour l’instant). Ces nouveaux acteurs signent des partenariats avec les banques mais, selon moi, surtout pour les endormir. Leur objectif consiste à accompagner le développement du paiement via son mobile, et quand tout le monde paiera de cette façon, le rapport de force aura basculé en leur faveur, il sera alors trop tard pour les banques, elles se seront fait "uberisées". Il existe aussi ce qu’on appelle les Fintechs, des startups spécialisées dans la finance, qui proposent des services innovants et à prix cassés comme le transfert entre pays par exemple, très coûteux actuellement.
Car en France s’il y a trop d’agences bancaires et il n’y a par contre pas assez de banques. Je m’explique: il y a trop d’agences, une structure trop lourde comme on l’a vu, mais pas assez de banques puisqu’en France on compte les grands groupes sur les doigts d’une main, auquel on rajoute les filiales de banques étrangères. Nous sommes dans un oligopole qui profite d’une rente de situation, un peu comme le téléphone portable avant l’arrivée de Free…
Certes, on ne peut pas encore se passer totalement de banque. Notamment parce qu’elles bénéficient de la barrière réglementaire que constitue la licence bancaire, très difficile à obtenir. Mais cette barrière a perdu de sa légitimité depuis la crise de 2008 qui a failli faire tomber le système bancaire. Par contre, techniquement oui, on peut se passer des banques. En Afrique, où le système bancaire demeure embryonnaire mais où tout le monde possède un portable, Orange a développé un système de paiement et de virement via SMS (Orange Money) qui connaît un grand succès (on peut aussi citer le M-Pesa de Vodaphone, en Afrique de l’Est). On peut même souscrire des assurances, placer son argent sur des produits d’épargne, comme dans une "vraie" banque.
Le smartphone, la banque du futur
Internet a bousculé bien des secteurs à commencer par le commerce. Mais ce dernier tente aujourd’hui de trouver une complémentarité entre le site et le point de vente. C’est ce qu’essaient de faire les banques mais leur réseau s’avère trop étendu et trop coûteux pour demeurer compétitif face aux "pure players" qui viennent les concurrencer. Je ne suis même pas convaincu de la validité de cette complémentarité : hormis des prestations pointues (gestion de fortune, emprunt immobilier), a-t-on vraiment besoin d’une banque en "dur", je ne le pense pas.
Finalement si on veut savoir à quoi ressemblera la banque du futur, il suffit de regarder son smartphone. Voilà le futur de la banque selon moi. A l’avenir tout passera par le mobile et les agences, nettement plus rares, seront dévolues aux entreprises et aux prestations à forte valeur ajoutée.