Didier Lambert* : ' les utilisateurs exigent de nous plus d'engagement de résultats '
Aucune entreprise ne pourra innover sans maîtriser la valeur du système d'information. Didier Lambert défend cette position face à ses fournisseurs, utilisateurs, et dirigeants.
L'assemblée générale du Cigref, le club informatique des grandes entreprises françaises que vous présidez, vient de se tenir. Quelles sont vos priorités en 2008 ?Didier Lambert : en ce qui concerne les technologies, je pense qu'il faut s'intéresser de près au phénomène de virtualisation. Il va provoquer un mouvement de fond dans les infrastructures des salles machines. Le modèle du Software as a Service (SaaS) constitue également une tendance intéressante pour externaliser les fonctions qui peuvent l'être. Mais ce marché a encore besoin d'un peu de maturité en termes de disponibilité des applications et de sécurité des données. Une autre priorité concerne les logiciels libres. Les DSI doivent se les réapproprier. Enfin, il convient d'être vigilant sur les batailles de standards.Exigerez-vous davantage des fournisseurs ?DL : ce n'est pas la qualité de service qui chute, mais nos utilisateurs qui exigent davantage. Ils veulent des contrats d'engagement de résultats. Logiquement, nous demandons la même chose à nos fournisseurs. Ils doivent comprendre que nous sommes les premiers revendeurs de leurs solutions dans l'entreprise. Seuls les constructeurs de matériels ont répondu présent. Les éditeurs et les SSII traînent encore des pieds.Que reprochez-vous aux SSII ?DL : les grandes SSII doivent se remettre en cause. Avoir pour seul argument un engagement de moyens ne suffit plus. Aujourd'hui, le modèle de la régie n'est plus viable à long terme. Les utilisateurs exigent de plus en plus de prestations au forfait, avec un engagement de résultats.Quant aux éditeurs, pensez-vous que les vagues de consolidation ?" rachat de Business Objects par SAP, BEA courtisé par Oracle ?" amélioreront les choses ?DL : nous apprécions les synergies lorsqu'elles ont du sens. Mais la création de valeur ne doit pas satisfaire uniquement les actionnaires. Elle doit aussi exister pour les clients. Les DSI ont besoin de stabilité, que ce soit sur la pérennité des produits ou le maintien des efforts de R&D. Il faut développer ensemble des solutions ' orientées métier ' et ne pas s'arrêter aux seuls bénéfices produits. Les éditeurs doivent mieux nous comprendre et anticiper nos enjeux. Ils doivent simplifier leur stratégie de vente de licences et nous traiter commercialement de façon beaucoup plus globale.Le débat sur l'offshore figure-t-il parmi vos priorités en 2008 ?DL : en France, les délocalisations informatiques restent assez confidentielles. Le Cigref n'a pas de parti pris et reste pragmatique. Nous comparons nos expériences. Nous devons nous méfier de ce marché très évolutif. Nous ne pouvons pas maîtriser le turn-over en Inde et en Chine, ainsi que la hausse rapide des salaires. Travailler en offshore nous oblige à être plus innovant en termes d'organisation. Cela nous contraint à formaliser davantage nos cahiers des charges. Mais, c'est un métier compliqué, qui s'apprend.Pragmatisme et innovation constituent-ils les mots forts du Cigref pour l'année à venir ?DL : j'ajouterai aussi le terme usage. La vraie ' cuisine des DSI ' consiste à éduquer les utilisateurs sur l'usage des technologies de l'information. Objectif : faire progresser l'ensemble des salariés, et pas seulement les informaticiens. Nous devons donc être innovants en associant les fonctions de la DSI, les fonctions métier, et... les fournisseurs. Il convient d'insister sur la formation et de valoriser la maîtrise du SI dans l'entreprise. Il s'agit là d'un gros chantier.* Président du Cigref (Club informatique des grandes entreprises françaises) et DSI d'Essilor
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