Fleur Pellerin et Emmanuel Macron devront gérer le rapprochement Arcep/CSA

François Hollande est revenu sur le projet de confier au CSA la régulation des télécoms. Il a demandé à ses ministres Fleur Pellerin et à Emmanuel Macron de gérer ce dossier sensible.
Plus d’un an après sa présentation, le rapport Lescure n’est pas enterré. Bien au contraire. Lors de son discours jeudi 2 octobre au Conseil supérieur de l'audiovisuel, François Hollande l’a prouvé. Devant un Olivier Schrameck (président du CSA) ravi, le président de la République est revenu sur un dossier chaud et complexe : celui de faire du CSA, un grand régulateur dont les responsabilités seraient complétées, en plus de l’audiovisuel, par Internet et les télécommunications.
Il l’a clairement dit, sans citer pour autant les propositions que l’ancien patron de Canal+ avait faites en mai 2013 à Aurélie Filippetti, alors ministre de la Culture. A l’époque, cette proposition était largement appuyée par Arnaud Montebourg qui était ministre de l’Economie et du Numérique. Ce dernier a d'ailleurs envoyé des salves contre l'Arcep à qui il reprochait d'être responsable des problèmes des télécoms en acceptant l'arrivée d'un quatrième opérateur, en l'occurence Free Mobile.
Lors de son allocution au CSA, le chef de l'Etat a annoncé qu’il avait demandé au gouvernement de lui faire des propositions dans ce sens.
« Mieux articuler les règles de l'audiovisuel et des télécommunications »
Deux ministres sont au cœur du sujet : Fleur Pellerin, ministre de la Culture, et Emmanuel Macron, ministre de l’Économie. Ils devront donc plancher sur cet épineux dossier. Le président leur a demandé de « faire rapidement des propositions sur cette mutation » pour engager « un débat ».
Dans son rapport, Pierre Lescure proposait déjà d’élargir le champ de compétence du Conseil supérieur de l’audiovisuel. « Le champ de ses compétences serait étendu et ses moyens d’intervention adaptés aux enjeux de la convergence numérique : la loi fixerait le cadre général et confierait au CSA le soin de définir, pour chaque catégorie de services, l’équilibre entre engagements volontaires et contreparties accordées. »
À la différence de Pierre Lescure, il n’est pas (encore) question d’une fusion. Le chef de l’État estime qu’il est « indispensable de mieux articuler les règles applicables à l'audiovisuel et aux télécommunications [qui] ne peuvent plus être pensées de manière dissociée ».
Le président ajoute enfin que les « sujets d'intérêt commun entre l'Arcep et le CSA » induits « par l'évolution des techniques » sont « de plus en plus nombreux avec des acteurs économiques qui se développent à la fois dans les télécommunications et dans l'audiovisuel ».
François Hollande a tout de même pris soin de ne pas lancer le débat trop tôt. Le sujet est tendu et le président ménage les susceptibilités. « Il n'est pas concevable de nier la spécificité de chacun des secteurs ou des différents sujets qui supposent donc des mécanismes spécifiques ».
Les craintes du président de l'Arcep
Si ce projet arrive à se faire, ce sera une grande victoire pour le CSA qui attend un élargissement de ses compétences depuis une décennie. En 2002, il proposait d’intégrer ces modifications dans la loi sur la confiance numérique.
En 2012, il avait rendu au gouvernement un rapport sur son avenir. Il proposait déjà ce rapprochement. En réponse Jean-Ludovic Silicani, président de l’Arcep, avait déclaré lors du Forum des télécoms que, selon lui, l’audiovisuel et Internet sont « aux antipodes ». Il évoquait aussi un danger pour la neutralité du Net si un seul organisme devait réguler l’audiovisuel, les télécoms et Internet.
Enfin, M. Silicani, major de la promotion Voltaire de l'ENA, notait aussi que cette approche « pourrait impliquer la fusion des ministères de l’Économie et de la Culture ».
Le temps a passé. Jean-Ludovic Silicani est en fin de mandat et ce projet risque de se faire sans lui. Mais surtout, l’Europe incite fortement à cette orientation. C’est ce qu’a noté hier le président de la République : « Il est temps de faire évoluer notre régulation dans le sens de l'intégration, comme ça s'est fait dans d'autres pays européens ». Le message est plutôt clair.