Histoire des interfaces utilisateurs (6) – Les mobiles réinventent le rapport à l’utilisateur

Alors que les géants du logiciel s'affrontent sur les écrans des PC, c'est du mobile, longtemps parent pauvre des interfaces utilisateurs, que va venir la nouvelle révolution des interfaces.

Qui, en 1973, pouvait penser que trente-cinq ans plus tard, le téléphone portable allait révolutionner les interfaces utilisateurs ? En effet, lorsque Motorola présente son DynaTAC, considéré comme le premier téléphone portable au monde, celui-ci ne dispose que d’un minuscule affichage numérique, avec un affichage de sept chiffres par LED rouges au-dessus du clavier. C’est peu, bien peu, pour un appareil qui mesure tout de même 25 cm de hauteur et pèse 783 g. On est plus proche du talkie-walkie militaire que d'un objet grand public. A cette époque, la technologie ne permet pas d’offrir mieux.
La téléphonie mobile végétera jusqu’aux années 90, jusqu'à l’arrivée de la 2G, la seconde génération de téléphonie mobile. Portée par la norme GSM, celle-ci va pouvoir bénéficier d’interfaces utilisateurs un peu plus élaborées : la norme permet évidemment de passer des coups de fils, mais aussi d’envoyer des SMS. L’utilisateur doit donc disposer d’un embryon d’éditeur de texte afin de rédiger ses messages, bref de plusieurs applications sur son mobile.

Peu à peu les écrans vont gagner quelques caractères, quelques lignes, certains vont même devenir graphiques. Les constructeurs peuvent équiper leurs mobiles de véritables systèmes d’exploitation et on commence à voir apparaître des interfaces utilisateurs plus évoluées sur ces terminaux de poche.
Enjeu : être efficace et élégant en restant compact
Si les téléphones mobiles gagnent en puissance et qu'ils peuvent exécuter plusieurs applications, dont des jeux graphiques, l’ergonomie du terminal reste une problématique constante pour les fabricants. Comment équiper des terminaux de si petite taille avec des périphériques d’entrée/sortie permettant une interaction évoluée avec l’utilisateur ?

Les constructeurs, à commencer par Nokia et son modèle 9000 Communicator, vont alors tenter d’installer des claviers Qwerty dans leurs terminaux. Le Nokia 9000, introduit en 1996, lourd, cher et handicapé par les débits de l’internet mobile dérisoires, ne connaîtra qu’un succès d’estime.
C’est le constructeur canadien RIM qui va très vite se démarquer avec une combinaison gagnante : un terminal équipé d’un clavier, couplé à un service de messagerie électronique. Le système tient plus à l’origine du pager amélioré (ce qu’il est encore avec son modèle 850 introduit en 1999), mais la formule rencontre un véritable succès auprès des entreprises et des managers qui veulent rester connectés à leur messagerie internet en permanence. Une vraie nouveauté à l’époque.

Le clavier nécessite une vraie dextérité et il doit être complété par d’autres outils d’interaction. Les systèmes à base d’icônes et de fenêtres apparaissent sur les écrans des smartphones : il faut pouvoir cliquer sur celles-ci de manière simple. Les constructeurs vont alors équiper certaines de leurs modèles de minitrackballs, de joysticks miniatures, de touchpads. Toutes ces solutions présentant l’inconvénient de la miniaturisation, et donc d’une maniabilité réduite.

Naissance des tablettes
Limitée à une zone sensitive sous l’écran sur les Palm Pilot, cette technique va être étendue à tout l’écran des PDA, puis reprise sur les premières tablettes. Sur les TabletPC de Microsoft, ainsi que sur la tablette Nokia 770, ces interfaces fonctionnent globalement comme si le stylet prenait la place de la souris pour déplacer le pointeur à l’écran. Une solution logique et sans rupture avec le desktop mais, au final, peu efficace : les claviers virtuels sont donc plutôt laborieux à utiliser, un peu comme si l’on tapait sur un clavier d’un seul doigt.
C’est à Apple que l’on devra le nouveau bond en avant que vont faire les interfaces mobiles, avec l’arrivée du multitouch sur les smartphones. Une nouvelle fois, la firme à la pomme n’est pas à l’origine de cette invention puisque c’est IBM qui, le premier, sort cette technologie des laboratoires dès les années 60. Mais Apple est celui qui la met en œuvre sur un téléphone portable, l’iPhone, avec le succès que l’on sait. Car outre la technologie multitouch elle-même, qui permet à l’utilisateur d’appuyer sur plusieurs partie de l’écran simultanément, c’est l’interface gestuelle qui lui est associée qui va faire le succès du smartphone d'Apple : selon que l’on sélectionne d’un doigt, que l’on glisse deux doigts sur l’écran ou que l’on pince l’écran, le terminal effectue une action bien définie. Le gain de temps par rapport à une interface basée sur l’utilisation du stylet est appéciable et appréciée, tant sur l'iPhone que sur l'iPad.

Les autres constructeurs de tablettes adoptent à leur tour l’interface multitouch et certains constructeurs, HP en tête, tentent désormais de la proposer sur les desktops et les ordinateurs portables. En effet, Windows 7 et Linux Ubuntu supportent le multitouch et peuvent donc être manipulés depuis un écran de ce type.
L’échec relatif de Microsoft Surface, la table multitouch lancée par Microsoft, a toutefois démontré que cette technologie n’est pas la panacée et que des alternatives pourraient bien, à leur tour, la supplanter dans les années à venir…
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