Icahn/CalPERS : les gros investisseurs se battent autour du pactole d’Apple

Alors que Carl Icahn met la pression sur la direction d’Apple pour qu’elle augmente son programme de rachat d’actions, Tim Cook vient de trouver un soutien de poids. CalPERS rejette en effet la vision court termiste du milliardaire activiste.
Si l’action Apple a baissé (d'environ 8%) après l’annonce de ses derniers résultats trimestriels, un chiffre scintille en bonne place devant les yeux de ses actionnaires : les 159 milliards de dollars de cash que possède Apple désormais, en hausse de 12 milliards par rapport au même trimestre l’année précédente.
Un trésor de guerre qui fait des envieux
Un pactole mirifique qui pose plusieurs problèmes à Apple. Tout d’abord, une grosse partie de ce cash est hors des Etats-Unis. Comme beaucoup de sociétés, Apple laisse une grosse partie de ses revenus, générés à travers le monde, à l’extérieur des frontières américaines pour ne pas avoir à s’acquitter des taxes afférentes, de l’ordre de 35%. Ce cash est donc utilisable mais pas pour tout.

En effet, et c’est le second problème, pour certains actionnaires, cet argent dormant devrait servir à Apple à racheter en masse ses actions, afin de valoriser les parts sur le marché et relancer la croissance du titre. L’année dernière, Tim Cook annonçait la mise en place d’un programme de rachat d’actions valorisé à 60 milliards de dollars sur deux ans. Un programme que la firme de Cupertino applique avec zèle. Ce sont déjà 40 milliards de dollars qui ont été utilisés pour acquérir des actions sur le marché. Au cours de deux dernières semaines ce sont 14 milliards de dollars de ses propres actions qu’Apple a récupéré en deux temps, 12, puis deux milliards.
Pour autant, pour le milliardaire activiste Carl Icahn, cet effort n’est pas suffisant. Lui, qui a récemment porté à plus de 3 milliards de dollars le poids de sa présence dans l’actionnariat de la firme de Cupertino voudrait qu’Apple amende son projet de 50 milliards supplémentaires et utilise 110 milliards de dollars au total pour racheter ses actions. Une somme qui pourrait même être revue à la hausse, si Carl Icahn trouvait des oreilles attentives.
Contre le court termisme
Dans un entretien récent au Wall Street Journal, reprenant une position déjà assumée en public, Tim Cook déclarait qu’Apple a besoin d’être « à même de s'adapter à l'intérêt à long terme des actionnaires, pas à celui d'un actionnaire à court-terme, pas à un trader d'un jour ». Pour Tim Cook, le trésor de guerre de son entreprise doit pouvoir servir à de grosses acquisitions, de plusieurs milliards de dollars. Depuis des années, Apple s’est contentée de mener de « petites opérations », de quelques centaines de millions de dollars.
Jusqu’à présent, seul Tim Cook avait pris position contre la vision de Carl Icahn, souvent qualifiée de court-termiste. Mais le directeur général d’Apple a trouvé un soutien de poids dans la dernière ligne droite avant l’assemblée des actionnaires prévues le 28 février prochain. Dans une interview accordée à CNBC, Anne Simpson, une représentante de CalPERS, le fond de retraite des fonctionnaires de l’état de Californie, s’en est prise à la position court termiste de Carl Icahn. « Se tenir dehors et lancer une brique à travers la fenêtre n’est pas la manière la plus raisonnable d’engager une conversation. Nous ne pensons pas que Carl Icahn, qui est un investisseur relativement petit avec une vision à court terme, devrait cornaquer le comité de direction d’Apple, qui est une très grosse entreprise, avec un futur inscrit dans le long terme sur lequel beaucoup de personnes comptent ».

Deux visions
Carl Icahn regrette évidemment cette prise de position, arguant que CalPERS pourrait aider à améliorer la gouvernance des entreprises, ou plutôt en ce qui le concerne la redistribution d’une grosse partie de ses fonds. Une attaque qui prouve toutefois que l’investisseur à la mémoire courte. En 2012, peu de temps après la mort de Steve Jobs, CalPERS avait pesé de tout son poids pour qu’Apple modifie en profondeur ses règles de gouvernance, notamment en ce qui concerne l’élection des membres du board.
Mais en définitive, la sortie d’Anne Simpson dit tout de la différence de vision et d’intérêts entre CalPERS et Carl Icahn. Même si ce dernier investit parfois pour plusieurs années, il agit toujours par pression et agitation. Tandis que CalPERS représente pas moins de 277 milliards de dollars d’investissements dans différentes sociétés, dont Apple, où le fond pèse pour environ 1,6 milliard de dollars d’actions.
Le fond de pension mise sur le long terme, sur la pérennité d’une entreprise et peut se permettre de voir le cours fluctuer, l’essentiel étant en définitive la stabilité, voire la progression de la valeur sur le long terme.
Pour autant, selon CNBC, sur les dix dernières années, Icahn Entreprises affichait un retour sur investissement de 26,6% contre 7,1% pour CalPERS. Les actionnaires d’Apple pourraient donc choisir la voie du retour sur investissement le plus rapide, au détriment d’un développement potentiel d’Apple via des acquisitions, de la R&D et de gros investissements dans des usines spécifiquement équipées pour permettre la création de nouveaux produits. Ou alors, ils feront confiance à Tim Cook et à ses équipes, et attendront de voir ce que la firme de Cupertino va sortir dans les prochaines années pour trouver de nouveaux leviers de croissance. On a, d'ici là, pas fini d’entendre parler du pactole d’Apple…
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Source :
CNBC