En 2006, vous introduisiez le concept d'ALM 2.0. Aujourd'hui, pensez-vous que cette vision se soit concrétisée ?Carey Schwaber : La plupart des éditeurs ont encore un long chemin à parcourir avant de parvenir à l'ALM 2.0. Aujourd'hui, aucune des solutions disponibles sur le marché ne répond aux cinq critères que nous avons défini pour l'ALM 2.0. Les progrès les plus significatifs ont été faits dans l'élaboration des plates-formes chargées de délivrer les services communs aux différents outils. En revanche, les projets dédiés aux standards ouverts d'intégration piétinent. De nombreux éditeurs ont néanmoins fait de réels progrès depuis que Forrester a défini sa vision de l'ALM 2.0 en 2006.
Les éditeurs ?" Serena, Borland et IBM ?" semblent embarqués dans des chantiers sans fin. Pensez-vous qu'une de leurs solutions pourrait voir le jour et s'imposer ?CS : Oui, nous nous attendons à ce que Borland et IBM livrent enfin les solutions qu'ils ont promises. Quant à Serena, nous ne pensons pas que le projet Eclipse ALF se concrétise. Il ne finance plus ce programme durablement, et aucun autre éditeur majeur ne semble prendre la relève.
Comment envisagez-vous l'évolution du marché ? Assistera-t-on à une concentration des acteurs ou à l'arrivée de nouveaux venus ?CS : Ces dix dernières années ont été marquées par de nombreuses consolidations. Nous nous attendons à un ralentissement du nombre de fusions-acquisitions dans ce domaine, comme l'année précédente. Les nouveaux venus ne semblent pas s'attaquer à l'ALM, mais à des secteurs tangentiels tels que la gestion des centres de tests. Nombreux sont les nouveaux entrants qui adoptent la même démarche que CollabNet, à savoir l'ALM à référentiel unique hébergé. Cependant, je ne suis pas certaine qu'ils soient en mesure de fournir une fonctionnalité innovante.
A chaque fois que Microsoft investit un domaine en le démocratisant, il influence le marché. Pensez-vous que sa venue dans l'ALM modifiera ce paysage ?CS : Oui. D'ailleurs, nous avons constaté que le changement a déjà commencé. Des entreprises s'intéressent désormais à l'ALM, alors qu'elles ne s'en seraient jamais souciées avant la venue de Microsoft. L'offre de cet éditeur coûte beaucoup moins cher que les solutions concurrentes, et c'est souvent celle que les sociétés choisissent.
Quelles seront les technologies qui composeront le futur de l'ALM ?CS : Aujourd'hui, Saas constitue un mécanisme de fourniture crédible pour des capacités d'ALM. L'innovation majeure portera sur les fonctions de collaboration, et nous pensons qu'IBM vient tout juste d'effleurer le sujet avec Jazz.
Que pourrait être l'ALM 3.0 ? La compréhension sémantique des artefacts de développement ?CS : L'ALM 2.0 est encore loin d'être abouti. Alors savoir de quoi sera fait l'ALM 3.0... Concrétisons d'abord l'ALM 2.0 avant de rêver à l'ALM 3.0. Mais une compréhension de la sémantique des artefacts de développement, ce serait excellent, en effet.
En France, seules 22 % des entreprises recourent à une solution d'ALM. Comment expliquez-vous cette faible adoption ?CS : Nombre d'obstacles à l'adoption de l'ALM n'ont aucun rapport avec le pays. Le plus important, selon moi, concerne la déficience historique des offres des éditeurs. Mais que penser des services informatiques qui entravent leur propre adoption de l'ALM en autorisant les silos fonctionnels à acheter des outils dans leur coin, sans considération pour une vision plus large ? Je ne suis pas sûre, cependant, que cela soit plus avéré pour les services informatiques français.
Quel dernier conseil donneriez-vous aux entreprises ?CS : Je pense qu'il est désormais critique, pour les services informatiques, de se frayer un chemin dans la frénésie marketing et d'étudier avec minutie les produits disponibles sur le marché. Quand ils constateront que les éditeurs ne tiennent pas les promesses de l'ALM 2.0 (et éventuellement 3.0, comme vous l'indiquez), ils devront les remettre au travail. Les éditeurs pourraient nous vendre indéfiniment du marketing : la seule façon de les arrêter consiste à refuser dacheter leurs solutions.
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