George Colony, fondateur et président directeur général de Forrester Research. conjugue la méthode Six Sigma avec les outils collaboratifs 2.0.Malgré la publicité qu'en font tous les médias, la plupart des présidents directeurs généraux se posent encore beaucoup de questions à propos de ces “ sacrées technologies sociales ”, comme Twitter et autres Facebook. Nombre d'entre eux se demandent pourquoi ces “ choses ” sociales portent un nom aussi stupide. Plus sérieusement, ils s'interrogent sur la manière dont l'utilisation de ces réseaux sociaux pourrait favoriser la progression du chiffre d'affaires de leur entreprise. Mais les plus sceptiques ne perçoivent que le mauvais côté de ces médias, à savoir la vidéo désobligeante qui passe en boucle sur Youtube ou l'attaque irrationnelle de leur marque ou leurs produits sur Twitter. Les médias sociaux présentent pourtant des avantages considérables pour développer l'innovation dans l'entreprise et pour augmenter le chiffre d'affaires.
Collecter les signaux des marchés
Prenons le concept que je nomme le Social Sigma. Six Sigma est une méthode qui aide à perfectionner les produits par de meilleurs processus. Sa variante Social Sigma est, elle, destinée à améliorer les produits via “ l'avis social ”. Elle consiste à utiliser les médias sociaux comme un moyen pour les clients et futurs clients de discuter, d'analyser et d'apporter en permanence des suggestions sur les produits de l'entreprise. C'est un puissant outil pour apporter de la valeur.Social Sigma s'appuie tout d'abord sur l'écoute. Il s'agit d'opérer une veille étroite des médias sociaux pour collecter les signaux faibles et forts sur les produits en provenance du marché. De nombreuses entreprises récoltent et résolvent ainsi les plaintes de leurs clients mais sans en extraire des données produits utiles à l'entreprise en rapport avec l'endroit où la requête est exprimée et la circonstance dans laquelle elle est recueillie. Les données utiles, issues de Social Sigma, meurent avant d'avoir atteint les chefs produits ou les équipes R&D. Les bonnes pratiques dans ce domaine proviennent de sociétés comme Zappos et Jetblue, qui ont dédié une équipe à cette activité.Social Sigma aide aussi à solliciter les avis. C'est-à-dire à utiliser activement les médias sociaux pour engager les clients dans un acte de création ou d'amélioration de produit. Ainsi le Crédit Mutuel français, en perte de vitesse à une époque, a amélioré ses offres par la mise en place de programmes sur les médias sociaux. La deuxième banque française de détail a soumis ses clients à un test d'amélioration de produits via un programme intitulé “ Si j'étais banquier… ”. Plus de 50 000 suggestions ont été récoltées, comme : “ Si j'étais banquier, j'expliquerais les frais bancaires en termes clairs. ” Les clients ont ensuite été invités à voter parmi les 30 meilleures suggestions retenues, et la banque a réussi à améliorer ses services. Pour récolter des avis, la manière la plus simple consiste à réserver sur son site internet un endroit où les gens peuvent soumettre leurs idées. Parmi les bons exemples dans ce domaine figure la chaîne de cafés Starbucks.S'afficher sans tabou
Au niveau marketing, le Social Sigma aide à communiquer clairement aux clients qu'une société est à leur écoute, qu'elle opère des changements sur la base des avis recueillis et qu'elle y répond. Il faut s'assurer que tout le monde sait que ce service est une réalité et que ça fonctionne. Une démarche très bien illustrée par Toyota.Mais attention, le Social Sigma ne peut fonctionner qu'avec une prise de risques minimale. Il faut être prêt à exposer ses défauts, lacunes et problèmes à la face du monde. L'essentiel au final étant que l'on parle des produits sans que l'entreprise soit forcément impliquée dans la discussion. Il est parfois recommandé d'être juste présent.Les dirigeants doivent aussi être mis en garde concernant l'exécution d'un programme Social Sigma. Leur entreprise n'est pas dans une communication à sens unique, comme avec la diffusion d'un communiqué de presse. Elle est à l'initiative d'un échange permanent, en temps réel, avec des centaines, voire des milliers de clients. Il est donc inutile de s'impliquer dans ce processus tant que l'on ne se sent pas prêt à conclure une discussion. En d'autres termes, il faut rendre opérationnels ses efforts Social Sigma avec une équipe, un budget, un agenda et une stratégie. Ne pas se lancer dans un Social Sigma est dommageable mais pas autant que si sa mise en œuvre est bâclée.
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