Jacqueline Lambert, fondatrice de la SSII Philae
Elle souhaite féminiser le monde informatique. Pas simple. Elle même a dû créer sa propre SSII pour concilier vies personnelle et professionnelle.
Vous venez d'obtenir le prix Excellencia. Que représente-t-il pour vous ?Jacqueline Lambert : Ce prix distingue des femmes dans le secteur des hautes technologies. J'ai été lauréate dans la catégorie Prestataire de services. Cela m'a beaucoup touchée car je ne pensais pas remporter cette récompense face à des candidates de SSII beaucoup plus prestigieuses. J'espère que ce prix attirera d'autres femmes vers les carrières scientifiques, et plus particulièrement informatiques. Le déséquilibre entre les sexes reste trop important dans les SSII. C'est une des raisons qui poussent à la surenchère des salaires, car les hommes privilégient les changements pour augmenter leur rémunération, tandis que les femmes sont plus fidèles.Et vous-même, comment êtes-vous arrivée dans l'informatique ?JL : Au départ, j'étais passionnée d'intelligence artificielle. Une fois mon bac C en poche, je n'ai pas voulu intégrer une ' prépa ' classique. Ne pouvant pas aller à Orsay comme je le souhaitais car je dépendais de l'Académie de Paris, j'ai rejoint un établissement privé, l'Epita. Cette école atypique m'a permis d'assouvir mon penchant pour l'intelligence artificielle, tout en me formant à l'informatique sur du matériel très performant. L'Epita n'étant pas, à l'époque, reconnue par l'Etat, j'ai pour suivi par un DESS en génie logiciel applicatif. C'est durant ce troisième cycle universitaire que j'ai rejoint la SSII Ingenica, spécialisée dans les nouvelles technologies et le génie logiciel, puis la gestion des connaissances.Aviez-vous une âme d'entrepreneur pour fonder votre propre SSII ?JL : C'est arrivé par opportunité, mais aussi pour concilier carrière et vie personnelle ! En 2000, à la naissance de mon premier enfant, je me suis installée en province avec ma famille. J'ai travaillé à distance en tant que directeur de projet. Après plusieurs rachats, ma SSII a été intégrée au groupe Getronics Decan. L'entité knowledge management dont je dépendais a été reprise par ses salariés, et est devenue Sharing Knowledge. En 2002, la société a subi la crise du marché de l'informatique, et la direction a souhaité mettre un terme à mon travail délocalisé. Comme j'ai refusé de revenir à Paris, j'ai été licenciée. J'ai donc créé ma propre structure, Philae.Pourquoi l'avoir baptisée Philae ?JL : Parce que je suis d'origine égyptienne et que l'île de Philae, près d'Assouan, respire la quiétude et la tranquillité. En outre, le temple de Philae fut le dernier bastion du culte de la déesse Isis, une référence féminine qui me plaisait. S'installer dans le Sud de la France n'aide pas à faire croître rapidement sa société, car nombre de projets se réalisent à Paris. Mais il s'agit d'un choix de vie que je ne regrette pas. Au départ, Philae a connu une croissance assez lente. J'ai néanmoins embauché mon premier salarié dès août 2004. Nous avons bénéficié de la clientèle de grands comptes qui ont suivi mon mari, parti lui aussi de sa société. A présent que mes enfants sont plus grands, je me consacre davantage au développement de l'entreprise, qui emploie désormais huit personnes.Comment comptez-vous vous développer ?JL : Je ne recherche pas la croissance à tout prix, et je souhaite mettre l'humain au centre de l'entreprise. J'ai adhéré au Club des jeunes dirigeants d'Aix-en-Provence afin d'étoffer mes compétences de dirigeant d'entreprise et de promouvoir les fonctionnements atypiques.
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