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Pendant de l'externalisation de l'informatique, celle du transport de la voix et des réseaux de télécommunication est irréversible. Deux différences notables : une plus grande souplesse de renégociation et l'assimilation plus
aisée des innovations.
' Personne n'imagine plus posséder un réseau étendu au-delà des limites de l'entreprise, assure Stéphane Duret, patron du pôle consulting chez BT France. Le réseau WAN (Wide Area
Network) n'est pas véritablement dans le c?"ur de métier et ne dégage pas vraiment de valeur ajoutée. ' Ce que confirme Jean-Pierre Cointre, DSI de la société de services parapétroliers Geoservices.
' Posséder notre propre réseau n'est pas une priorité stratégique. Nous avions besoin, en 2003, d'un réseau disponible et dimensionné pour intégrer SAP. L'externalisation était le seul moyen de faire vite et
bien. 'Si Geoservices ne disposait pas d'infrastructures informatiques, l'externalisation implique parfois une reprise d'infrastructures existantes. C'est ainsi que les opérateurs de télécommunication ont procédé ces dernières années à
de nombreuses acquisitions. Leurs cibles privilégiées ? Les filiales de télécommunication des grands groupes multinationaux. ' Un projet d'externalisation des télécommunications se gère à la manière d'une
fusion-acquisition ', assure Stéphane Duret. Lors de la seule année 2005, BT a racheté Radianz, le réseau de l'agence de presse Reuters (175 millions de dollars), ainsi qu'Altanet, la filiale du groupe automobile Fiat (80
millions d'euros). En retour, BT s'est octroyé les contrats de fourniture de services de télécommunication pour des montants de 3 milliards de dollars et de 450 millions d'euros. ' Dans ce type de contrat, vous récupérez une
partie du réseau de votre client, avec, parfois, un transfert de personnel. Vous êtes obligé de calculer au plus juste les coûts de ce que vous allez racheter ', commente Stéphane Duret.
Six personnes en interne pour gérer un contrat de 10 millions d'euros
Pour ces opérations lourdes, la phase de négociation peut durer longtemps. ' Entre six à douze mois, prévient Gilles Prunier, directeur des services outsourcing chez Orange Business Services.
Nous devons établir le périmètre technique et financier que souhaite nous confier le client. ' S'astreindre à dresser un état des lieux le plus précis possible est une nécessité payée de retour. Car le risque est
d'ignorer ce qui se passe dans une région donnée, sur les plans technique et contractuel. Une différence évidente avec l'infogérance, où le client connaît et maîtrise son infrastructure et ses applications.Pour les télécommunications comme pour l'informatique, l'externalisation nécessite de garder le contrôle, et le contrat requiert une gestion au quotidien. Depuis le rachat de Rhône Poulenc Telecom par Equant, en 1998, le groupe
chimique Rhodia externalise ses infrastructures de télécommunications (Wan au niveau mondial, messagerie, pare-feu internet). Une seule personne, au profil achat, était impliquée dans la gestion de ce contrat d'un montant de 10 millions d'euros.
' J'ai dû étoffer l'équipe. Dorénavant, six personnes en interne gèrent ce contrat, une par zone géographique ', rapporte Xavier Rambaud, DSI de Rhodia.Les comités de pilotage sont indispensables, confirment les opérateurs télécoms. ' Au début du contrat, un comité opérationnel se rassemblera chaque semaine ', conseille Gilles
Prunier. En parallèle un comité financier réunira le directeur financier et un représentant de la fonction achat. ' Dans un contrat d'externalisation avec transfert de personnel, pour cent personnes transférées, quatre à cinq
personnes sont nécessaires, en interne, à la gestion du contrat ', estime Stéphane Duret.
Négocier et renégocier...
Un contrat d'infogérance fournit également l'occasion de procéder à une simplification des processus d'achat, de livraison et de facturation. ' Historiquement, Geoservices n'avait pas de réseau. Mon
objectif était de disposer d'un prestataire unique. Si nous n'avions pas externalisé nos télécommunications chez BT, jamais nous n'aurions pu déployer nous-mêmes notre réseau dans une cinquantaine de pays et négocier autant de contrats
locaux ', affirme Jean-Pierre Cointre.La durée des contrats d'externalisation semble diminuer au fil du temps. ' Le premier est signé pour une durée de huit à dix ans, indique Gilles Prunier. Puis lors de la phase de
renouvellement, la période d'engagement tombe à trois ou quatre ans. ' Les entreprises n'hésitent pas à renégocier les contrats. Elles aménagent même des clauses spécifiques à cet effet. ' Nous avons
signé pour cinq ans avec BT, avec une clause de renégociation tous les deux ans après un état des lieux des prix du marché ', rapporte Jean-Pierre Cointre. Avec ou sans clause de renégociation, les DSI ne rechignent pas à
solliciter régulièrement leurs prestataires afin d'obtenir des révisions de tarifs ou l'amélioration de la qualité de service. ' En 2004, j'ai fait un appel d'offres qui a rendu Equant très créatif, raconte Xavier
Rambaud, DSI de Rhodia. Et j'ai renégocié des indicateurs de performances là où ils me paraissaient les plus faibles. C'est un bon moyen pour pousser son prestataire à améliorer sa qualité de service tout en pensant à l'évolution de
l'architecture. 'Savoir tirer parti des circonstances fait partie du jeu de la négociation. Jean-Pierre Cointre, qui a entamé une discussion avec BT début 2006, avait un souci. ' Nous avions sous-dimensionné notre réseau,
la bande passante était trop juste ', avoue-t-il. Avec opportunisme, il a proposé à BT ' d'inclure la gestion de la téléphonie dans le contrat et de renégocier le tout. ' Au bout
du compte, le coût des réseaux téléphonie et données a augmenté de 4 % pour Geoservices. ' Mais nous avons accru de 117 % la capacité de notre bande passante ', se réjouit Jean-Pierre
Cointre.
Des intérêts convergents en matière d'innovation technologique
Si les contrats d'externalisation font l'objet de fréquentes renégociations, celles-ci ne concernent pas forcément l'innovation technologique, une composante pourtant importante de l'externalisation des télécommunications.
Prônée par les prestataires, elle semble, en effet, plus simple à instaurer que dans le cadre d'une simple infogérance. Pour Pierre Gressier, DSI de Canal Plus : ' Les nouvelles technologies vont généralement dans le sens
de la mutualisation. Les prestataires y trouvent donc leur compte. ' Jean-Pierre Cointre concède ne pas trop se préoccuper de la question : ' BT définit la technologie qui semble le mieux convenir
à nos besoins, nous négocions ensuite. ' Xavier Rambaud fait montre de la même distance : ' Une réunion annuelle est prévue durant laquelle France Télécom vient présenter ses innovations. S'y rend
qui veut. ' Rien de contractuel, donc. Il n'empêche que Xavier Rambaud travaille avec le service de recherche et développement de France Télécom, notamment sur le thème du nomadisme.
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