La complexité du simple
Dans l'informatique, on trouve plein de gros mots. Pas des insanités, des vulgarités, ni des grossièretés, non. Des mots gros parce que pondéralement surchargés de flou, au sens plus ou moins exact ?" et tout autant
approximativement partagé ?" remplis de concepts toujours précis, mais rarement clairs, qui désignent des processus infaillibles, mais souvent bogués. Sans parler du mot ' valeur ', qui n'a
finalement pour seule morale que d'être voué à la création.Le propre, si l'on peut dire, de ces gros mots est bien de biaiser pour contrarier l'entendement commun. Et, facteur aggravant, c'est souvent en compagnie de faux amis qu'ils s'affranchissent de nos frontières. Sans visa de bonne
traduction. Notons au passage que ces clandestins n'ont aucun mal à trouver rapidement leur place dans le périmètre d'une langue, le français, de plus en plus vernaculaire, du moins en ce qui concerne le parler technologique.Piochons deux exemples dans les pages de ce magazine pour illustrer notre propos. Voilà, tout frais émoulu de la machine à marketer les mots, un ' M2M ' du plus bel effet, dont on
expliquera au vulgaire (Le directeur général ? Le directeur commercial ?) qu'il s'agit tout simplement de ' machine to machine '. Oui, mais encore ? De systèmes embarqués sur des systèmes
de préférence en mouvement, susceptibles de communiquer des informations ou bien d'en recevoir, pour améliorer des processus, voire inventer de nouveaux services.L'autre exemple nous est fourni par le merveilleux SOA. Traduit en bon français cela donne architectures orientées services. Que sont ces services ? En fait, des ensemble de données et de mécanismes informatiques censés optimiser
les processus métier. Métier signifiant indistinctement, selon la vocation de l'entreprise considérée : le transport, la distribution... les services ; ou la fonction de ses propres services internes : la vente, le marketing, les
ressources humaines. Il faut suivre...La vocation de l'informatique est d'enrichir et de fortifier l'action d'une entreprise. L'idée générale est de simplifier les procédures afin de les renforcer. Mais, faire simple c'est plutôt très compliqué. Pour injecter savoir et
données dans les canalisations d'une entreprise, de formidables pompes appelées services d'information et des escouades d'informaticiens se révèlent indispensables. Et chaque fois que l'on veut simplifier, on rajoute une couche de complexité. La
dernière qui nous est proposée, c'est SOA. Et celle-là paraît-il, on va devoir (se) la tartiner pendant dix ans. Tout cela pour que l'informatique atteigne, une bonne fois pour toutes, une ' agilité '
propre à ' simplifier (on n'en sortira décidemment pas...), tout bonnement le travail de lentreprise. Mesdames et messieurs les DSI, une nouvelle fois, bon courage.