Linux n'a pas encore vraiment percé sur le poste de travail en entreprise ?" notamment en client lourd traditionnel ?" ni même chez les particuliers, car un certain nombre de difficultés restent à résoudre. Le premier problème est le blocage de certains utilisateurs face au changement. Poids de l'habitus, tel que défini par le sociologue Pierre Bourdieu, ou réticence à tout ce qui est nouveau ne sont pas des aspects à traiter à la légère.
' Le simple fait de changer de client de messagerie sous un même système d'exploitation peut être très perturbant ', rappelle Élizabeth Conseil, consultante chez Telindus. Casser la résistance au changement nécessite un véritable accompagnement. La deuxième difficulté vient du support des matériels, et notamment des périphériques.
' Pour les postes clients traditionnels sous Linux, il reste des soucis dans le support des dernières versions de pilotes ', note Franz Meyer, directeur général de Red Hat pour l'Europe du Sud. Si les fabricants ont le réflexe de s'assurer du bon fonctionnement avec Windows, les éditeurs de distributions commerciales Linux ou la communauté
open source doivent encore les convaincre de fournir le pilote ad hoc ou les spécifications nécessaires pour qu'on puisse le développer. Certains fabricants rechignent même à fournir des pilotes libres : si on refuse de prendre un pilote propriétaire, on se retrouve alors avec des fonctions dégradées.
' L'interface de gestion de l'énergie (ou ACPI) n'est pas toujours opérationnelle sur les portables, de même que certains lecteurs de cartes SD restent mal supportés, constate Franz Meyer. En revanche, les problèmes sont réglés pour les stations de travail. '
' Plus le matériel est ancien, plus il a de chance d'être intégré ', estime Patrick Bénazet, responsable du Pôle national de compétences du poste agent de L'Éducation nationale. Il est à l'origine du projet Éclair, une distribution orientée client léger constituée exclusivement de composants
open source.
Les pressions des éditeurs
La troisième grande difficulté réside, selon Franz Meyer, dans les applications supportées.
' Une application WinDev ne fonctionnera pas sous Linux ', lâche-t-il. Idem pour les applications Windows de type
spaghetti code, note Alain Takahashi, directeur d'Hermitage Solutions, distributeur, en particulier, du système de virtualisation Win4Lin. Pour y remédier, on peut imaginer un PC en
dual boot (avec deux systèmes d'exploitation) ou abritant un système de virtualisation comme VMware, Xen, ou Win4Lin.
' Ce ne sont que des palliatifs qui ajoutent de la complexité, remarque Franz Meyer. Or, trop de complexité incitera l'utilisateur à rester sous Windows. Cela augmente également le coût de possession. 'Ajoutons les pressions indirectes de certains éditeurs. Il est quasi impossible d'acheter un PC sans Windows, ou d'obtenir le prix affiché des logiciels séparément. L'association UFC-Que Choisir s'occupe du dossier, ainsi que la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). À cela s'ajoute la pétition
' Non au racketiciel ' lancée par l'Association francophone des utilisateurs de Linux et des logiciels libres (Aful) pour qu'on puisse acheter un PC sans logiciel préinstallé. Enfin, le grand public a aussi son mot à dire : il voudra, en entreprise, une machine aussi plaisante à utiliser que celle quil possède chez lui.
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