La GPL, la licence phare du logiciel libre, se met au goût du jour

La Free Software Foundation publie ce vendredi 29 juin la version 3 de la licence. La GPL 2 avait été rédigée il y a seize ans.
La journée est historique pour la communauté des développeurs de logiciels libres. Seize ans après la publication de la version 2 de la licence GNU GPL (licence publique générale associée à l'origine au système
d'exploitation GNU, à la base de Linux), la Free Software Foundation (FSF) publie en effet la version définitive de la version 3 (GPLv3).Publiée en 1991, la GPL actuelle (GPLv2 donc) est aujourd'hui la licence la plus utilisée par les développeurs de logiciels libres.
Selon le site Freshmeat, environ 65 % des projets sont aujourd'hui placés en GPL (GPLv2).
Une prise en compte des évolutions juridiques et techniques
Pourquoi cette mise à jour ? ' Le contexte juridique et technique a considérablement changé ces dix dernières années et il devenait indispensable d'effectuer une mise à jour qui permette de préserver l'esprit de liberté de la GPL ', explique Loïc Dachary, le président de la FSF France.Les auteurs de la GPLv3 se sont notamment employés à adapter la licence pour qu'elle tienne compte des nouvelles pratiques en matière de brevets logiciels et des nouvelles lois associées aux logiciels de DRM (Digital Right Management pour gestion de droits numériques) apparus suite au développement du peer to peer.Ce travail, qui a duré dix-huit mois et a vu se succéder quatre versions intermédiaires de la nouvelle licence, ne s'est fait pas fait sans peine. Inquiets de voir évoluer la licence qui régit leurs logiciels et leur modèle d'affaires, les éditeurs open source ont fait part de leurs craintes. ' Nous avons participé aux discussions de la FSF depuis dix-huit mois et avons suivi les développements de très près ', reconnaît Kaj Arnö, vice-président de MySQL en charge des relations avec la communauté open source.Cinq innovations majeures
Complexe car traitant de sujets délicats, le texte final (en ligne d'ici à la fin de la journée) tient sur douze pages. Parmi les principales évolutions, on peut noter cinq innovations majeures.Compatibilité : La GPLv3 permet désormais de marier plus facilement des licences GPL avec d'autres licences libres et notamment avec Apache. ' La clause de compatibilité avec les autres licences de la GPLv2 est très stricte et empêche de prendre en compte des briques logicielles utilisant une licence libre qui ajoute la moindre restriction. La GPLv3 est ici beaucoup plus souple ', explique Loïc Dachary.Brevets : La GPLv3 contient également une clause qui répond directement à l'accord de licences croisées signé entre Microsoft et Novell. Ce partenariat restreint la redistribution libre des logiciels mis au point par Novell et Microsoft à partir de logiciels libres GPLv2 aux seuls clients de Novell. Cela ne sera pas possible avec la GPLv3, car les accords discriminatoires (réservés aux clients de Novell) sont interdits ou doivent être étendus à tout le monde.Tivoization : La GPL3 répond aussi à une mesure technique mise en place par Tivo, le fabricant américain de magnétoscopes numériques, baptisée ' Tivoization '. Tivo utilise des logiciels GPLv2 et n'interdit pas leur modification mais a mis en place sur ses matériels un système de clé crypté qui vérifie que le logiciel n'a pas été modifié. Si c'est le cas, l'appareil se bloque. La GPLv3 prévoit que la mise en place de ce type de verrou se traduise par l'interdiction de distribuer les logiciels placés en GPLv3.DRM : La GPLv3 protège les développeurs et les utilisateurs des législations très dures qui ont été mis en place en matière de DRM. ' La GPLv3 précise simplement que les logiciels qu'elle couvre ne sont pas des logiciels de DRM ', explique Loïc Dachary.Internationalisation : Enfin, alors que la GPLv2 était fortement liée à la législation américaine sur le plan de la terminologie, la v3 utilise une terminologie internationale, plus facile à transposer dans le droit des différents pays et notamment en Europe.La FSF table sur une adoption progressive sur cinq ans
Les premiers logiciels qui adopteront la nouvelle licence sont une quinzaine de projets dont la FSF gère les droits d'auteur. Il s'agit notamment de la technologie de compression Tar et du système de documentation Texinfo. ' A terme, tous les logiciels dont la FSF possède les droits d'auteur devraient basculer en GPLv3 ', explique Loïc Dachary.La GPLv3 connaîtra-t-elle le même succès que la version actuelle ? Son adoption risque d'être très progressive et se fera au cas par cas. Certains éditeurs ont d'ores et déjà annoncé qu'ils ne l'utiliseraient pas. C'est, par exemple, le cas de Zend, éditeur spécialisé dans les environnements de développement autour du langage de programmation PHP, qui propose à la fois des logiciels propriétaires et des logiciels open source. ' Nous utilisons déjà une licence New BSD pour notre framework Zend Framework plutôt qu'une licence GPL (v2) et nous n'allons certainement pas adopter la GPLv3. Celle-ci correspond à un point de vue dogmatique sur la question du libre qui s'oppose radicalement aux réalités économiques des entreprises ', estime Gauthier Delamare, spécialiste des logiciels libres chez Zend.La plupart des éditeurs sont moins catégoriques. ' Nous allons attendre avant de nous lancer mais nous devrions l'adopter ', explique Kaj Arno. Un élément clé qui pourrait décider les éditeurs sera la position de Linus Torvalds. Pour l'instant, le fondateur de Linux a indiqué qu'il ne voyait aucune raison d'adopter la GPLv3 mais n'a pas exclu définitivement de l'adopter.1 opinion
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Traroth2
La position de Zend me déçoit beaucoup, personnellement. La GPL 3 est conçue pour garantir que les logiciels libres resteront libres. Quand on place du code sous une licence libre, on offre l'offre à qui veut bien s'en servir. Il est bien normal que ceux qui en profitent soient obligés de faire de même, ou ne s'en servent pas. La GPL 2 laissait des moyens de contournement, comme l'a fait Tivo. De même, les brevets et les DRM sont des barrières qu'imposent certains éditeurs sur du travail qui ne leur appartient pas. S'ils veulent utiliser ce type de procédé, il faut qu'ils sachent qu'ils ne peuvent pas profiter du travail de la communauté.
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