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L'université d'été des acteurs du marché de l'information vient de s'achever
Le mouvement open data est resté en grande partie coincé dans les cartons des ministères. Quatre mois après la publication du décret Etalab enjoignant les administrations centrales de libérer gratuitement leurs données, l'université d'été du GFII (Groupement français de l'industrie de l'information) aura servi à prendre le pouls des fournisseurs de données publiques, qu'ils appartiennent au secteur privé ou à l'administration. Verdict (double) : d'une part, la gratuité des données publiques pose des questions, notamment sur le manque à gagner pour l'Etat. D'autre part, cette libération est loin d'être une priorité, surtout pour les collectivités territoriales. En dépit des initiatives de Bordeaux, Rennes et Paris, plusieurs acteurs privés déplorent que l'open data ne soit pas encore entré dans les esprits.Ainsi Didier Gorron, associé de Transpacité, fournisseur de données sur le traitement de l'eau et des déchets, pointe la méconnaissance des institutions : “ Rares sont les collectivités qui ont nommé un responsable open data, alors que c'est une mesure prévue par la loi de 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs. ”Selon lui, avant d'être technique, la difficulté pour les agents publics est “ de surmonter leurs suspicions vis-à-vis du privé et leurs craintes de voir les données réutilisées à des fins commerciales ”. Plus gênant encore, “ chaque direction d'archive départementale que nous sollicitons propose ses propres licences et tarifs ”, affirme Emmanuel Condamine, directeur général du site de généalogie Notrefamille.com. Même si la circulaire sur Etalab ne concerne que l'administration centrale, il espère qu'elle incitera les collectivités à être plus transparentes sur les prix qu'elles pratiquent. La tarification des données publiques a été l'autre sujet chaud débattu dans les travées de l'université d'été du GFII. Pour rappel, si le décret Etalab institue la gratuité comme norme, il n'exclut pas une redevance quand les données ont fait l'objet d'un investissement ou d'un enrichissement particulier. Dès lors, comment prouver un tel investissement ? Quel sera le manque à gagner de l'Etat si certaines données payantes devaient devenir gratuites ?
Un manque à gagner certain mais pas encore évalué
A l'échelle nationale, ces questions touchent tous les établissements dont l'activité repose sur la vente de données. C'est le cas de la Dila (Direction de l'information légale et administrative). Elle publie le site Legifrance, en accès libre, mais refacture la réutilisation de ses contenus aux éditeurs juridiques. “ Nous générons ainsi quelque 800 000 euros annuels et, à ce jour, nous allons continuer à les percevoir. Sous l'effet de l'open data, une de nos licences est désormais proposée gratuitement. Nous ne connaissons pas véritablement le manque à gagner qui va en découler. Mais le problème touchera surtout les EPA (Etablissement public à caractère administratif) ”, rapporte Régis Perol, chargé du développement de l'offre de services de la Dila.De fait, pour un établissement comme l'IGN (Institut géographique national), la vente d'informations pèse pour 40 % dans son activité. A l'INPI (Institut national de la propriété industrielle), elle est d'un rapport plus faible mais qui reste significatif. Si les informations géographiques ou les registres des sociétés devenaient en partie gratuits, c'est le modèle économique des deux établissements qu'il faudrait revoir. Pour l'heure, on ne sait pas si l'Etat fera pression pour faire tomber ces “ bastions ” payants. Mais la démarche semble amorcée : “ En début d'année, nous avons rendu gratuit notre référentiel cartographique à grande échelle auprès des collectivités. Le manque à gagner est supposé avoir été compensé par des subventions supplémentaires de notre administration de tutelle, explique Alain Chaumet, responsable des Partenariats Géoportail à l'IGN. La question se pose désormais de la gratuité de ce référentiel pour les acteurs privés. ”
Des acteurs privés contre la gratuité
Paradoxalement, tous les acteurs privés ne militent pas en faveur de cette gratuité. C'est le cas des grands revendeurs de données, frileux à l'idée que des petites structures sans moyens accèdent à la même matière première qu'eux. “ Cette gratuité risque par ailleurs d'inquiéter les administrations et d'aller à l'encontre d'une démarche open data qui commence timidement. Je préfère payer et voir en retour le mouvement s'enclencher ”, ajoute Denis Berthault, directeur du développement des contenus en ligne chez Lexis Nexis. La situation devrait s'éclaircir d'ici à juillet 2012, date à laquelle la liste des redevances payantes sera publiée par décret.
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