En cette période de balkanisation des organisations, des pratiques managériales et des savoirs, le DSI reste isolé, en quête de son destin. Que signifie véritablement aujourd'hui être directeur des systèmes d'information ? Quel doit être le rôle de ce responsable au sein de nos organisations ? A-t-il encore une place au sein de l'entreprise, maintenant que la plupart des systèmes informatisés sont en place et que les activités de son domaine de compétence penchent de plus en plus souvent vers l'externalisation ?A l'évidence, les temps ont changé. La mondialisation, la domination des cols blancs au sein des pays industrialisés, l'apparition d'une production de masse différenciée, l'émergence de grands pays à très faible coût de main-d'?"uvre maîtrisant la production de masse (Chine), ou bien possédant des compétences à forte valeur ajoutée (Inde), représentent autant de phénomènes corroborant l'idée que rien ne sera jamais plus comme avant.Et le DSI dans tout cela ? Les start up, aussi brillantes qu'éphémères, cèdent la place à des oligopoles lui concédant peu de marge de man?"uvre. Sa discipline se professionnalise à travers l'adoption de nouvelles pratiques. Toutes présentent la particularité de faire la part belle aux consultants et concourent à le contourner. En diluant son influence, elles le dévalorisent, consciemment ou inconsciemment, auprès de sa direction générale. Pour couronner le tout, les grands projets à forte composante technique appartiennent pour la plupart au passé.Cette situation rend la mission du directeur des systèmes d'information de plus en plus discutable. Les directions générales n'ont jamais été moins dépendantes de leur direction informatique. Pour preuve, la fonction de DSI se signale depuis trois ans par des records de turnover ! Les titulaires de la fonction semblent parfois considérés comme plus ou moins interchangeables. Le manager des technologies de l'information, qui se voulait bâtisseur de cathédrales informatiques, n'est plus vraiment en odeur de sainteté. Triste sort pour celui qui a imaginé, conçu, élaboré et exploité les nouveaux outils des temps modernes.Et si les destins de l'entreprise et des systèmes d'information étaient liés ? Tandis que le DSI s'interroge sur sa véritable raison d'être, l'entreprise, de son côté, est chahutée dans une économie versatile. Une vision raisonnée de l'Histoire peut aider à comprendre ce phénomène en gestation. Le passage d'une société industrielle ' moyenâgeuse ' à un modèle plus en phase avec son temps est en effet désormais engagé. L'historien Jules Michelet, qui fut le premier à utiliser le terme de Renaissance, soulignait déjà au XIXe siècle l'aspiration de la société à redécouvrir le monde. A partir de cinq principes qui peuvent, à condition de le vouloir, facilement être appliqués en ce début de XXIe siècle.
Critiquer pour réinventer le monde
Léonard de Vinci a effectué son apprentissage, et son compagnonnage, au sein de l'atelier du maître Andrea Verrochio. On y remettait en question le monde, on discutait les grands travaux, on échangeait des modèles, des esquisses... Plus modestement, le DSI ne doit-il pas, à son niveau, inventer le monde de demain grâce aux technologies de l'information et de communication existantes ? Ne doit-il pas critiquer les solutions utilisées afin d'en proposer de nouvelles, plus pertinentes et plus efficaces ?Se montrer pratique et inventif
Léonard de Vinci se définissait comme un ' homme sans lettres ', tirant son savoir de l'expérience et de la pratique. A l'instar de ce génial précurseur, le DSI ne doit-il pas être le premier ingénieur de la Renaissance informationnelle, devenir l'architecte de l'entreprise de demain ? Ne doit-il pas, tout simplement, imaginer de nouveaux outils ?Etre universel...
Léonard de Vinci, toujours lui, déclarait : ' Le peintre doit s'efforcer d'être universel. ' C'est-à-dire se montrer capable de représenter les innombrables formes de l'univers. Le DSI ne doit-il pas, à son tour, revendiquer une forme d'universalité afin d'assurer la cohérence du système d'information ? Et, humaniste à sa façon, comprendre l'essentiel des disciplines de l'entreprise ?Planifier et piloter
Il est loisible de poursuivre la comparaison, à seule fin d'y puiser des idées. Léonard de Vinci affirmait : ' Ceux qui sont férus de pratique sans posséder la science sont comme le pilote qui s'embarquerait sans timon ni boussole, et ne saurait jamais avec certitude où il va. ' Le DSI, dont la compétence technique est reconnue, ne doit-il pas prouver à ses pairs qu'il maîtrise aussi la science managériale, un préalable indispensable pour entrer dans le cercle des décideurs de nos organisations ? Ne doit-il pas employer les méthodes et outils les plus perfectionnés, seuls à même d'appréhender la complexité et la variété de l'informatique ?S'appuyer sur des dirigeants éclairés
Pour réussir, n'oublions pas que Léonard de Vinci fut, par la grâce de François Ier, ' libre de rêver, de penser et de travailler '. De même, de nos jours, le DSI peut-il réussir seul ? Ne doit-il pas plutôt s'appuyer sur des dirigeants comprenant les véritables enjeux des systèmes d'information, et qui seront disposés à le soutenir financièrement et moralement dans son travail de réinvention ?Nos entreprises sont à l'aube d'une nouvelle Renaissance. La tâche sera longue et fastidieuse. Léonard de Vinci observait : ' Il est vrai que limpatience, mère de la sottise, loue la brièveté. ' En sus, la modernisation de nos organisations est un processus continu, qui doit être animé, entretenu. Aussi nos DSI sont-ils plus que jamais utiles à nos organisations. Ils ont même un rôle fondamental à jouer dans nos économies modernes. Encore faut-il que ces Léonard de Vinci modernes trouvent, sans attendre, des François Ier à la hauteur des enjeux du monde de demain...