La roadmap d'Airbus pour atteindre la simulation temps réel

Le constructeur d'avions de ligne européen déploie une stratégie de simulation numérique extrêmement ambitieuse. Airbus est engagé dans une course à la puissance informatique sans fin.
- Dossier Simulation numérique : les entreprises françaises témoignent
- PSA : deux fois moins de tests physiques pour concevoir la Peugeot 208
- Objectif de Renault : produire ses prototypes sur la chaîne d'assemblage
- Des centaines de crash tests virtuels pour la GT électrique d'Exagon
- La roadmap d'Airbus pour atteindre la simulation temps réel
- Lisa Airplanes, une PME en quête de simulation numérique
- DCNS : la simulation nous fait gagner en Time to Market
- Vingt à vingt-cinq coques différentes testés numériquement pour l'Odonata
- Simuler pour construire plus vert
- La simulation numérique dans la lutte contre Alzheimer
- Jean-Marc Crepel, Micado : «Les entreprises ne peuvent plus rester compétitives sans la simulation.»
Airbus, tout comme son grand rival Boeing, est engagé dans un challenge industriel majeur : face aux contraintes environnementales multiples ainsi qu'à la hausse du prix du pétrole, l'avionneur se voit en effet obligé de concevoir des appareils toujours plus performants, que ce soit sur le plan de la consommation de carburant, sur celui des émissions de CO2, du bruit généré, etc.
Son arme ? La simulation numérique. Et pour y parvenir, l'industriel doit investir lourdement et en continu pour fournir à ses ingénieurs une puissance de calcul suffisante pour atteindre les objectifs de performance.
La simulation s'est imposée aux côtés des souffleries

La simulation est venue compléter les tests en soufflerie dès les années 80, et de plus en plus de configurations sont validées sur ordinateur afin d'optimiser les choix de conception des nouveaux appareils. Et les besoins en calcul des ingénieurs se révèlent exponentiels. Eric Chaput, expert des méthodes et outils de simulation chez Airbus engineering, souligne : « Ces vingt dernières années, la complexité des simulations s’est beaucoup accrue. Depuis, les simulations haute vitesse menées sur des modèles à la géométrie simplifiée des débuts, on est passé à des simulations aérodynamiques beaucoup plus complexes, notamment pour ce qui est de l’intégration des moteurs, la simulation multiphysique ainsi que celle des phénomènes instables. La simulation des phénomènes non linéaires est beaucoup plus complexe et présente un véritable challenge sur ce plan. »
Une course poursuite entre les ingénieurs et la puissance de calcul disponible

Pour faire face à l'appétit de ses ingénieurs, Airbus s'est doté de moyens de calcul intensif internes, s'appuyant notamment sur les nouveaux datacenters en container d'HP. Le dernier mis en production à Toulouse, baptisé HPC 3, offre une puissance de 300 téraflops..., une puissance qui a été immédiatement absorbée par les besoins en calcul des bureaux d'études : « Pour prendre l’exemple d’une récente campagne de simulation, celle-ci a duré trois mois pendant lesquels nous avons étudié 13 configurations différentes pour l’avion, ce qui a représenté 650 combinaisons distinctes. Une telle campagne a représenté un volume de calcul de 17 000 CPU/jour pour 1,5 téraoctet de données. Pour gérer de telles campagnes avec autant de configurations en parallèle, nous nous appuyons sur une solution, CFD Manager. Elle prend en charge tout le volet transfert des données, et l’approche totalement appuyée sur les bases de données permet de gérer de plus en plus de configurations. »
Une rupture technologique est nécessaire pour pouvoir franchir un nouveau cap

Le problème de l'industriel est désormais de gérer des charges de calcul en hausse du fait d'algorithmes bien plus évolués mis en oeuvre pour simuler des phénomènes physiques complexes, gérer la multiplication des configurations calculées et, enfin, gagner en agilité en fournissant à ses ingénieurs les résultats de leurs calculs le plus rapidement possible. Airbus prépare un nouvel appel d'offres pour remplacer à terme son datacenter HPC 3 par un nouveau modèle plus puissant, mais l'accroissement de la puissance des processeurs et des GPU ne suffira pas à atteindre cet objectif de multiplier sa puissance de calcul d'un facteur de 1 million. « Nous voulons obtenir un gain de l’ordre du million, et c'est la raison pour laquelle nous sommes impliqués dans de multiples projets de recherche, souligne Eric Chaput. Il faut calculer plus rapidement, avec moins de ressource. Nous sommes impliqués dans les projets européens CFMS au Royaume-Uni, Case en Allemagne, Dovers qui travaille sur les configurations hardware pour accélérer les calculs et Mosart sur les architectures parallèles pour pouvoir atteindre ce changement de paradigme qui est nécessaire pour atteindre notre but : faire voler l’avion virtuel en temps réel. »
Votre opinion