L'armement US se dote du premier ordinateur quantique

Après quatre ans d'annonces fantaisistes, le constructeur D-Wave assure avoir vendu son premier ordinateur quantique à Lockheed Martin.
Le premier ordinateur quantique aurait été vendu au géant américain de l’armement, Lockheed Martin. L’ordinateur quantique est, en théorie, le super héros des ordinateurs. Il est censé faire apparaître spontanément l’unique solution d’un problème, au pire la mettrait très rapidement en évidence en affinant des probabilités, là où une machine ordinaire passe du temps à évaluer toutes les possibilités.
Dans le cas d’un acteur de la Défense, l’ordinateur quantique présenterait l’intérêt de décoder à la volée tous les messages cryptés, alors qu’un ordinateur classique mettrait des décennies pour y parvenir.
Super ordinateur ou supercherie ?

Seulement voilà. Cette annonce laisse dubitatifs les observateurs. Pour commencer, le fabricant canadien de ce premier ordinateur quantique, D-Wave, prétend depuis début 2007 qu’il a les moyens de l’industrialiser. Mais toutes ses dates de lancement se sont jusqu’ici révélées fantaisistes.
Pour autant, les ingénieurs de D-Wave viennent de publier un article descriptif dans le magazine scientifique britannique Nature. A bien y regarder, leur invention consiste surtout à assembler huit éléments quantiques d’informations - des qubits - et à observer qu’ils se comportent bien comme le prévoient les lois de la physique quantique. C’est peu ou prou ce que les laboratoires d’IBM et une poignée d’autres centres de recherches sont parvenus à faire depuis la fin des années 90.
En tout cas, ce descriptif technique de D-Wave n’a rien à voir avec la présentation commerciale de son ordinateur. D-Wave évoque une machine de série, dotée d’un processeur quantique Europa qui fonctionnerait en milieu cryogénique et dont la puissance phénoménale serait déjà de 128 qubits.
Le professeur Scott Aaronson, spécialiste de l’ordinateur quantique au MIT, avance pour sa part que les 10 millions de dollars payés par Lockheed Martin ne sont pas suffisamment significatifs pour prouver que l’ordinateur de D-Wave fonctionne. « On ignore les raisons de Lockheed. Et puis, pour eux, 10 millions, ça peut très bien être une bagatelle, même lorsqu’il s’agit d’acquérir une technologie totalement infondée », dit-il.
Sur son blog, D-Wave suggère que la fabrication en série de son ordinateur quantique est imminente.
Des bits subatomiques
Un calculateur quantique ne repose pas sur des bits (dont la valeur est 0 ou 1), mais sur des qubits dans lesquels les valeurs 0 et 1 sont superposées jusqu’à ce qu’une opération externe, ici l’algorithme, fige l’une ou l’autre. La difficulté de fabriquer un ordinateur quantique est que le moindre phénomène extérieur peut figer le qubit dans un état ou dans l’autre avant que l'algorithme ait pu opérer. Il faut donc isoler le qubit, par exemple en le faisant fonctionner à une température proche du zéro absolu. D’où l’idée du processeur dans un milieu cryogénisé de D-Wave.
Dans le principe, chaque qubit est constitué d’une particule, aussi petite qu’un proton ou qu’un neutron. Les valeurs 0 et 1 correspondent au spin de cette particule. Le spin est une propriété magnétique qui apparait quand on observe une particule. On attribue le spin - de manière purement théorique - au sens de rotation de la particule sur elle-même.