Le cauchemar d’un Facebook commercial

En 2025, le réseau social de Mark Zuckerberg est en grande partie déserté par les marques et par les utilisateurs.
21 avril 2011, dans le métro parisien, je fais soudain le désagréable rêve d'un monde tel qu’il pourrait être en 2020. Les trois quarts des individus de la planète ont alors un compte Facebook. Ils communiquent, jouent, recherchent, s’informent et achètent uniquement via Facebook. Le réseau social a atteint son objectif : se substituer entièrement au web pour une catégorie d’internautes rebaptisés les « Bookeux ». Un quart des comptes sont à but commercial, et une bonne partie de nos « amis » ne sont plus des êtres humains, ils se nomment Coca-cola ou iPad. Dés que quelqu'un effectue un achat en ligne, voire dans de vrais magasins, les autres sont immédiatement mis au courant. J’achète d’autant plus que je vois mes amis acheter. Nous ne sommes plus des clients mais les évangélistes des produits qu’on nous vend. L’ère consumériste atteint fièrement son apogée avec le 2.0.
21 avril 2011, j’arrive au travail et je me lance dans la lecture du rapport « Will Facebook ever drive e-commerce ? » (Facebook sera-t-il un jour déterminant pour le ecommerce ?) de l’analyste de Forrester Sucharita Mulpuru, et la vraisemblance de mon cauchemar s’estompe. La vente de produits par l’intermédiaire de Facebook, ou f-commerce, débutée il y a déjà deux ans aux Etats-Unis, ne rapporte pas autant qu’espéré. Seules certaines catégories de magasins tirent réellement profit de Facebook. Les f-boutiques sont moins personnalisables selon l’identité des marques que les sites d'e-commerce, ce qui limite les investissements de certaines entreprises. En fin de compte, Facebook reste plus une plate-forme de socialisation que d’achat.
De fait, pour une entreprise commerciale, dépendre d’une plate-forme dont elle ne maîtrise pas les évolutions technologiques ni contractuelles n’est pas forcément une bonne idée. Rien ne garantit que les conditions de présence sur Facebook ne changeront pas d’ici quelque temps. Après tout, il pourrait sembler normal aux futurs actionnaires de récupérer un pourcentage sur chaque transaction effectuée par l’intermédiaire du réseau.
Et mon cauchemar se transforme alors en espoir. En 2025, cinq ans après mon rêve, le réseau social de Mark Zuckerberg est en grande partie déserté par les marques et par les utilisateurs. Ces derniers se déconnectent, excédés par les campagnes de promotion à répétition et par les publicités intensives, personnalisées et amicalisées du réseau. D’autres réseaux, interopérables et prônant la transparence, ont réussi à émerger et à récupérer la confiance des anciens « Bookeux ». Le web ne se réduit ni à un réseau social, ni à un moteur de recherche, et les internautes apprécient d’avoir le choix.
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L'auteur du billet
Bonjour,
Pas nécessairement plus flippant mais différent.
Dans le cas du f-commerce, le but est justement de ne pas renvoyer l'utilisateur vers un site extérieur de e-commerce mais de lui permettre d'effectuer sa transaction sans quitter Facebook. Il ne quitte plus la plateforme pour acheter.
Sinon, la toute nouvelle option « Send » de Facebook qui est une version plus confidentielle du « i like » montre bien que tout le monde n'a pas envie d'exposer l'ensemble de ses actions aux autres. Enfin, je suppose. Donc que l'aspect social de Facebook n'est pas si anecdotique.
Marie -
mmichael
Bonjour,
Google organise le web par le search, Facebook par le graphe social. C'est un modèle d'organisation pour un autre, et il conduit l'utilisateur vers le site, info ou commerce, qu'il recherche.
Avec le recul et le temps, je vois de moins en moins en quoi le modèle de FB serait plus flippant que celui de Google.
C'est un avis purement personnel.
Michaël -
L'auteur du billet
Beaucoup d’agilité pour détecter les nouvelles plateformes à la mode, et beaucoup d’investissements aussi , non ?
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fcharles
Le cauchemard devient un rêve mais temporairement. Après facebook il y aura un aure facebook, un autre grand magasin, espace "hors web", car l'économie d'échelle et la taille est le maitre mot de tous les business modèles. Ce qui va demander à l'entreprise de l'agilité permanente pour construire sa présence numérique.
La suite sur GreenSI : http://greensi.blogspot.com/2011/01/preparez-vous-la-fin-du-web-et-au.html -
L'auteur du billet
>>Marchands et annonceurs restent toujours dépendants d'une plateforme.
En hébergeant eux-mêmes leur sites de e-commerce, les marchands ne sont pas dépendants d'une plateforme (sauf potentiellement d'une technologie mais qu'ils sont libres de mettre à jour ou pas). Un site marchand étant directement lié au chiffre d'affaire d'une entreprise, toute dépendance ou indépendance n'est pas si anodine, si ?
>>ils resteront en place bien après 2025 même s'ils ne s'appelle plus Facebook ou google, car Business is Business.
Vous avez sans doute raison, mais si les multiples réseaux sociaux existants pouvaient inter-opérer (tout comme nos messageries électroniques communiquent), ceux qui veulent rester sur Facebook pourraient y rester tout en interagissant avec d'autres amis sur d'autres plateformes. Mais, peut-être n'est-ce que de la science fiction. -
L'auteur du billet
Merci pour votre soutien.
Ma dernière remarque faisait référence à la volonté de certain d'être omniprésent sur le web (donc oui, vous avez raison).
Ceci dit, je ne suis pas certaine que pour le e-commerce on puisse les rapprocher complètement (même si Google tire beaucoup profit de la publicité). -
Panda2011
Au-delà de l'aspect social on parle d'un web dans le web et pour cela nous avons certes une approche différente, mais le résultat est le même. Marchands et annonceurs restent toujours dépendants d'une plateforme. Que celle-ci soit sociale ne veut pas dire que l'internaute réagira différemment selon le besoin pour lequel il utilise cette plateforme, car il est avant tout la pour de "l'information", ami, famille, vidéo, actu, shopping, etc... que ce dernier aspect soit accepté est la grande interrogation que vous faites bien de poser.
Le scénario décrit parait encore une fois revenir au grand amour du projet "Beacon" que vous semblez avoir oublié. Les internautes apprécient d'avoir le choix, mais ce sont avant tout des moutons et les services qui les rendent dépendants l'ont bien compris et ils resteront en place bien après 2025 même s'ils ne s'appelle plus Facebook ou google, car Business is Business. À bon entendeur.. -
L'auteur du billet
La "plateforme" de Google n'a pas grand chose à voir avec Facebook, et l'expérience utilisateur non plus. Dans un cas, on est vraiment dans une sorte de cocoon avec ses amis, sa photo, dans l'autre on a une interface très dépouillée.
Malgré l'envie flagrante de Google de se lancer dans les réseaux sociaux, leurs initiatives dans le domaine (Buzz, Wave, ...) sont plutôt des ratages pour l'instant. Facebook rassemble par contre beaucoup de monde.
Avec Google Shopping, ce qui est mis en avant ce sont les catégories de produit, et pas des boutiques de marques en tant que telle. Et, il est devenu courant de parler de F-commerce alors que personne ne parle de G-commerce, si ?
Bref, je ne pense pas que ce soit la même chose, même si on peut trouver des points de ressemblance.
Bonne fin de journée -
Sly.514
C'est sûrement le sens de la dernière phrase : "Le web ne se réduit ni à un réseau social, ni à un moteur de recherche, et les internautes apprécient d’avoir le choix."...
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ZaFoX47
Le jour où le choix sera réellement donné au consommateur de bénéficier des publicités que lui seul aura décidé d'obtenir. Là, on aura droit à un boulversement. Mais il est clair que ça passera par la transparence et l'information temps réel, ainsi que la coordination de ces deux facteurs. Les entreprises qui n'auront plus besoin de campagnes marketing pour aller chercher le client puisque ce dernier ira chercher l'information par lui-même, auront un réel avantage sur celles qui préfèrent submerger les réseaux de leurs promotions.
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