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Le rachat de BellSouth par AT&T, lui-même racheté par SBC l'an dernier, va propulser le nouvel ensemble devant Verizon. Avec deux opérateurs fortement intégrés, les télécoms américaines font de plus en plus figure de duopole.
Moins médiatisé que les rachats, l'année dernière, d'AT&T par SBC ou de MCI par Verizon, celui de BellSouth par le même AT&T (SBC s'étant rebaptisé AT&T) est pourtant d'une tout autre importance. Par les montants en jeu et
le poids du nouvel ensemble dans les télécoms américaines, d'une part, et par l'ampleur du phénomène de concentration ?" pour ne pas dire de constitution d'un duopole ?", d'autre part. Alors que SBC s'offrait AT&T pour 16
milliards de dollars, ce ne sont pas moins de 67 milliards de dollars que le ' nouvel ' AT&T s'apprête à débourser pour prendre le contrôle de BellSouth.
La fusion la plus importante du secteur
Il est vrai que la cible (20,54 milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2005 pour un résultat net correspondant de 3,3 milliards de dollars), outre son implantation dans le sud des États-Unis, présente de beaux contours,
notamment sa participation de 40 % dans Cingular Wireless (dont SBC détenait déjà 60 %), numéro un américain du cellulaire avec 54,1 millions d'abonnés, juste devant Verizon Wireless (dont Vodafone contrôle 45 %). Bref, c'est bien à
une ' méga ' fusion que l'on assiste, la plus importante du secteur depuis le rachat d'AOL par Time Warner début 2000. Avec 160 milliards de dollars de capitalisation boursière, le nouvel ensemble
surclasse son principal concurrent (Verizon ne pèse en Bourse ' que ' 95 milliards de dollars). Même si l'écart est moins spectaculaire en termes de chiffre d'affaires (75,1 milliards de dollars de
chiffre d'affaires pour Verizon en 2005), le rachat de BellSouth devrait propulser AT&T aux alentours des 100 milliards de dollars. Une barrière symbolique qui va lui permettre de disputer au japonais NTT la place de numéro un mondial !
Avec 317 000 employés, le poids du nouvel ensemble est également spectaculaire en termes d'effectifs. Sans surprise, AT&T a d'ailleurs annoncé la suppression de dix mille emplois à l'issue du rachat de BellSouth (qui s'ajouteront aux 26 000
suppressions d'emplois déjà annoncées lors du rachat d'AT&T par SBC).
Vingt-deux ans après, la reconstitution d'un géant
Quant aux inévitables ' synergies ', elles sont évaluées à 18 milliards de dollars (dont 2 milliards de dollars d'économies par an au titre des dépenses d'investissement). Bref, c'est
bien à la reconstitution d'un géant du secteur que l'on assiste.Vingt-deux ans après l'éclatement d'AT&T, il est frappant de voir à quelle vitesse cet ensemble se rétablit, puisque le nouvel AT&T n'est autre que l'addition de Pacific Telesis, Ameritech, Southwestern Bell (SBC) et
BellSouth, quatre opérateurs régionaux précisément issus de son éclatement en 1984, auxquels s'ajoutent ses activités historiques, autrement dit les communications longue distance.Faut-il y voir pour autant une résurgence du monopole ? Contrairement à la philosophie européenne en matière de concurrence, l'autorité de régulation américaine (FCC) et les instances antitrust ne semblent guère s'émouvoir. Il
est vrai que le contexte est assez différent, la FCC considérant sa relative bienveillance envers les opérateurs historiques comme la contrepartie de leurs investissements dans les réseaux d'accès, notamment en fibre optique, afin de les moderniser
dans un environnement où les câblo-opérateurs contrôlent plus de la moitié du marché de l'accès haut débit. Une analyse qui laisse certains de marbre : ' On assiste tout simplement à la reconstitution de deux monopoles
intégrés fixe-mobile afin de mieux s'affirmer sur la scène mondiale ', relève un familier des télécommunications américaines.