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Christiane Féral-Schuhl, avocate à la Cour, associée fondatrice du cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie, et bâtonnier désigné du Barreau de Paris
Le fait : la Cour de cassation a jugé, le 2 février, que le caractère privé d'un courriel émis par un salarié ne se déduit pas de son seul contenu, notamment lorsqu'il présente un rapport avec l'activité professionnelle.En novembre 2006, le chef de site d'une société spécialisée dans la sécurité a été licencié pour faute grave. Son employeur lui reprochait d'avoir adopté un comportement agressif et irrespectueux à l'égard de sa hiérarchie. Il avait échangé des e-mails à ce sujet avec une autre employée.
Le rapport avec l'activité professionnelle
La cour d'appel a considéré que le courriel adressé par le chef de site présente un caractère privé “ dont la liberté de ton et les outrances éventuelles relevaient uniquement de la vie personnelle et intime à laquelle le salarié a droit, même sur son lieu de travail. Destinés à rester entre les deux interlocuteurs ”, les propos tenus ne pouvaient “ avoir pour effet de nuire à l'entreprise ” et donc “ être admis comme preuves d'un grief ”. En conséquence, elle a condamné l'employeur au paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour atteinte à la vie privée.Or, le 2 février dernier, la Cour de cassation casse et annule cet arrêt. Elle juge que cet e-mail, qui est en rapport avec l'activité professionnelle du collaborateur qui l'a expédié, ne revêt pas un caractère privé et, de ce fait, peut être utilisé au soutien d'une procédure disciplinaire. Cette décision rappelle que les courriels adressés par le salarié à partir de la messagerie d'entreprise sont présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur peut y avoir librement accès.
En ligne avec la jurisprudence
Par exception, ce n'est que lorsque l'employé a identifié les e-mails comme étant personnels, ou bien les a classés de telle sorte qu'ils sont considérés comme tels, qu'ils revêtent un caractère privé et ne peuvent être utilisés au soutien d'une procédure disciplinaire.Dans ce cas et sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut accéder aux courriels du salarié qu'en présence de ce dernier, ou lorsque celui-ci est dûment appelé. Ces principes permettent de combiner le pouvoir de contrôle de l'employeur sur les outils informatiques mis à la disposition de ses collaborateurs ainsi que le respect de la vie privée auquel tout salarié peut prétendre.
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