Le groupe MMA renforce l'autonomie de ses managers
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Pour aider ses managers dans la gestion de la relation et de la cohésion de leurs équipes, l'assureur a monté un programme de formation qui s'appuie sur des sessions de coaching réunissant des pairs.
En 2006, les Mutuelles du Mans Assurances (MMA) tentent de mener à bien leur fusion avec le groupe Azur. Dans ce cadre, Bernard Lévêque, ancien directeur de Reflex Assurances et de la filiale espagnole d'Azur, propose de mettre ses compétences de coach et de psychothérapeute au service de l'organisation. “ La plupart des réorganisations laissent souvent de profondes cicatrices. Notre objectif était de préserver notre diversité, d'en faire une force, une opportunité pour “ savoir être et devenir ensemble ” ”, explique-t-il. Après quelques discussions, il convainc la direction du groupe de créer une direction du développement de l'intelligence collective pour accompagner la réorganisation de l'entreprise.Les premiers mois, Bernard Lévêque prend son bâton de pèlerin pour partager son projet et s'accorder, avec les directions opérationnelles, sur ce qu'est l'intelligence collective chez MMA. “ Elle part du principe que de la collaboration naît une faculté de création et d'apprentissage bien supérieure à celle des individus isolés. Pour cela, il est nécessaire de susciter l'envie de travailler ensemble. Elle implique également d'étudier les interactions entre les membres d'un groupe, afin d'éviter la perte de valeur dans ce processus complexe qu'est la relation ”, détaille-t-il. Selon lui, l'organisation des entreprises est aujourd'hui trop centrée sur le développement des compétences individuelles, au mépris parfois de l'efficacité collective. “ Notre projet était de réhabiliter le collectif comme une force. Bien évidemment au service de l'organisation, mais aussi de la personne, tant il est vrai qu'il n'y a pas d'épanouissement professionnel sans développement personnel et pas d'essor de l'entreprise sans celui de ses membres. ”
Les managers, pierres angulaires de l'organisation
La DSI est particulièrement touchée par le processus de fusion. En 2007, elle devient multisite : l'informatique du groupe MMA est localisée au Mans, celle du groupe Azur à Chartres et Strasbourg. Un plan de transformation est mis en œuvre pour accompagner le nouveau modèle d'organisation. Il couvre le transfert des activités entre les sites, une réduction de la sous-traitance et la réinternalisation de certaines compétences.En 2009, le mode de fonctionnement est ajusté et l'accent mis sur le management. “ Il s'agissait de contribuer à la transformation de la DSI en faisant évoluer le comportement des managers, en favorisant l'émergence de pratiques communautaires et en permettant un brassage entre les différentes structures ”, raconte Bernard Lévêque. Le directeur central du système d'information, soutenu par la direction générale, invite alors les cadres ? responsables de départements et d'unités ? à s'inscrire dans une démarche expérimentée avec succès par Bernard Lévêque un an auparavant : le codéveloppement. “ Sur les 90 responsables visés, 60 se sont montrés intéressés ”, souligne Monique Fréard, en charge de cette opération au sein de la DSI.Les sessions de codéveloppement mises en place chez MMA réunissent un coach et six managers non liés hiérarchiquement. Chaque réunion est l'occasion d'évoquer avec leurs pairs des situations difficiles. “ C'est une forme de réflexivité portant sur sa pratique managériale ”, précise Monique Fréard.Les sessions sont découpées en deux grandes parties : trois journées pour se familiariser à la méthode, puis six demi-journées au cours desquelles chacun des cadres prend à son tour le rôle de client, tandis que les autres jouent celui de consultant.“ L'objectif étant de “ théoriser la pratique plutôt que pratiquer la théorie ”, les matériaux de départ utilisés au cours de ces sessions sont les situations vécues par les participants. Il est donc impératif de poser, dès le début, la question de la confidentialité : qu'a-t-on le droit de partager hors de ce cercle d'apprentissage ? ”, indique Bernard Lévêque. Dès la première journée, le sujet est abordé. Une charte de confidentialité est alors proposée et partagée au sein du groupe. Lors des journées suivantes, les managers sont familiarisés avec des notions de systémique et de communication appliquées aux interactions professionnelles. “ Pendant l'expérimentation que j'avais conduite en 2008, j'avais eu l'occasion de travailler avec un groupe de 40 responsables issus de plusieurs services, et j'avais identifié l'importance du questionnement de chacun sur sa posture managériale. Nous avons ainsi recueilli des informations précieuses sur certains comportements managériaux vertueux, explique Bernard Lévêque. Mais nous nous gardons bien de formaliser cela sous la forme de recettes toutes faites. Nous laissons au manager, en fonction de sa personnalité et du contexte dans lequel il travaille, le soin de trouver lui-même sa solution lors des séances avec ses pairs. ”Forts des premiers résultats, nous avons décidé d'étendre la pratique de codéveloppement. Elle est désormais partagée par 220 cadres issus des trois enseignes du groupe Covea (MMA, Maaf et GMF). Depuis plus de trois ans, certains groupes fonctionnent en autonomie. Au terme de leur premier parcours, une trentaine de managers de la DSI ont choisi de poursuivre l'expérience en s'inscrivant à des sessions ouvertes à des responsables issus de différentes directions. Parallèlement, certains des 30 cadres initialement réfractaires se sont finalement laissé tenter, convaincus par leurs pairs. “ A l'issue du parcours, il faut continuer à encourager les responsables à appliquer ce qu'ils ont appris. Et les soutenir dans les nouveaux rapports relationnels qu'ils essaient d'instaurer avec leur entourage ? collaborateurs, pairs, autres directions ? pour travailler plus efficacement ”, insiste Monique Fréard. Ce qui n'est pas aisé. En effet, faire évoluer une relation ou un comportement installé depuis des années s'avère un travail de longue haleine qui peut paraître démoralisant. “ D'où l'intérêt de pouvoir poursuivre la démarche et de se retrouver régulièrement au cours d'une session de codéveloppement ”, conclut-elle.