Le Guide de la curation (4) - Les cas d'usage : la veille

A quoi sert la curation ? A travers trois cas concrets, nous verrons quels sont les bénéfices que l'on peut en tirer en entreprise. Aujourd'hui, nous abordons la veille avec Jean-Luc Raymond.
Jean-Luc Raymond est consultant indépendant en projets numériques citoyens, chargé de cours au CELSA, formateur et ancien journaliste en agence de presse. Avec ses 235 000 abonnées, @jeanlucr est le plus gros compte Twitter francophone, ce qui lui confère une influence indéniable. Son fil Twitter, exclusivement de nature professionnelle, égrène en permanence une veille technologique sur les réseaux sociaux et internet. Sa particularité : dénicher régulièrement des sources et des informations inédites. À ce titre, c’est sans aucun doute le premier curator en France. Pourtant, quand on l’interroge, il se considère plutôt comme un veilleur.
01netPro. La curation, buzzword ou pas ?
Jean-Luc Raymond. La curation correspond à un état d’esprit du marché actuel, porté par trois types de discours : les start up, qui se positionnent sur le marché, les utilisateurs et les journalistes de données.
Chez les utilisateurs, ce n’est pas nouveau. Ça existe déjà dans le milieu scientifique, par exemple.
Pour les journalistes de données, le besoin est évident : capitalisation d’informations, classification, redistribution. Le succès de la curation reflète la précarité du métier éditorial. Avec la curation, les journalistes s'orientent vers les métiers de la communication. De leur côté, les Community Managers reviennent vers l’éditorial, la veille.
Avec la curation, on essaie de recréer un Huffington à la française, une rediffusion stratégique. C’est très communicationnel et cela correspond à l’humeur du moment.
Quels sont les outils que vous utilisez ?
J-LR : Des outils très basiques. Je travaille essentiellement avec des flux RSS. J’ai plus de 800 sources qui proviennent de blogs, de sites, de flux spécialisés et thématisés par mots-clés ou extraction. Ce qui fait que je traite au quotidien environ 6 000 articles. C'est assez rapide à traiter en lecture rapide. J’utilise pour cela Sharp Reader, un agrégateur de première génération qui est le seul capable de gérer autant de flux, aussi bien en quantité qu'en archivage. Google Reader n’est pas dimensionné pour autant de flux. Ensuite j’utilise des listes Twitter thématiques dans Tweetdeck.
Des expériences avec d’autres outils ?
J-LR : En termes de visualisation, Pearltrees a trouvé un mode de représentation très intéressant. On peut travailler à plusieurs sur des arbres de connaissances.
Le mode journal est sympa, certes, mais ça s’arrête là. C’est une vision très occidentale.Avec Scoop.it, la curation est facile mais les sources sont très concentrées, peu de nouvelles sources sont à découvrir. De plus son mode push est très intrusif, comme avec Paper.li.
Le principe de Yahoo! Pipes est très intéressant, mais il mériterait d'être redéveloppé.
Quels sont les domaines d’applications possibles de la curation ?
J-LR : Pour l’instant, je ne vois pas de demande dans les entreprises. Cela pourrait être une branche du documentaliste : le data-documentaliste. Je suis abonné à des listes professionnelles dans le monde des documentalistes, et je constate qu'il n'existe pas encore de débat à ce sujet.
Dans la banque, les assurances, la santé, l’administration, la curation pourrait effectivement devenir une spécialité.
En revanche, je pense que la curation va naître dans les collectivités territoriales, avec le mouvement Open Data. Pour exploiter les données ouvertes, il faudra les sélectionner, mais aussi rajouter des données complémentaires sans avoir à programmer.
Pour passer à une autre étape, les entreprises elles aussi vont devoir ouvrir leurs données. Le besoin de configurer se développera.
Quelles améliorations voyez-vous pour ces outils ?
J-LR : Ce qui manque, c’est un système d’appréciation, de notation à la Digg, la possibilité de connecter plusieurs journaux pour créer des métajournaux.
Les éditeurs, avec leurs plates-formes, essaient de résoudre le problème du temps. Mais il y a encore beaucoup de progrès à faire : en amont avec de la sémantique ; en aval avec une reformulation, un procédé plus narratif (voir ce que fait Qwiki), des API pour exporter les données sous forme de mashups. La clé pour les start up : libérez vos API !
Merci Jean-Luc.
-
villaret
les informations diffusées dans cet article éclairent d'une façon positive un des éléments que l'on appel la Curation. Cela devrait être en effet un des outils essentiels pour rationaliser tous les flux d'information circulant sur le web et sérier celles essentielles à son activité. C'est comme il a été dit un aspect d'exercice de la veille.
-
frocaboy
Merci Jean-Luc d'avoir cité Pearltrees.
Je crois que la curation ou plutôt l'édition de contenus web est un besoin très commun et très naturel. Dans la vie réelle, tout le monde a un bibliothèque dans laquelle il range ses bouquins, ses souvenirs de voyages, ses disques,etc.
Et bien, Pearltrees c'est pareil! On organise ce que l'on aime en manipulant. Alors est-ce que les entreprises ont besoin de bibliothèques?
Je crois que oui au même titre que les particuliers d'ailleurs.
Surtout lorsque ces bibliothèques sont sociale et que l'on peut les construire en équipe!
Votre opinion