Le marché de l'e-santé reste trop morcelé

Le bilan annuel de l’Asip aura permis de revenir sur la trop grande fragmentation des industriels d’e-santé. Le souhait de l’agence : recentrer le marché sur un nombre restreint d’acteurs, aux reins plus solides.
Comment expliquer que les chantiers d’e-santé n’explosent pas ? Cette question, au cœur de la conférence annuelle de l’Asip santé (Agence des systèmes d'informations partagés de santé) appelle plusieurs réponses. L’une tient, bien sûr, aux difficultés de financements des projets, à l’image de l’assurance maladie, qui n’a toujours pas codifiée les actes de télémédecine (et qui ne devrait pas le faire avant 2013). L’autre piste, largement évoquée lors des débats, est liée à la nature des offres, et surtout des industriels qui les portent.
Des chantiers trop locaux
Ces industriels sont trop nombreux et trop petits, estime Jean-Yves Robin, le directeur de l’Asip, qui n’hésite pas à pointer le trop fort régionalisme des projets d’e-santé : « Dans la plupart des chantiers, le décideur local achète local. Ce phénomène entretient et favorise l’existence de TPE de quelques personnes. Bien loin donc des PME à l'allemande, avec un millier de salariés et une vraie stature de leader sur le marché. »

Son souhait ? Voir le nombre de ces acteurs diminuer. Et cette réduction interviendra lorsque l'on imposera aux industriels de s’aligner sur les infrastructures, les référentiels ou le cadre de sécurité imposés par l’Etat. « Prenons l'exemple du DMP. Seuls 50 LPS (logiciels de professionnels de santé) sur 200 respecteront ses spécifications. Mais celles-ci permettront de tamiser une offre, qui par ailleurs, deviendra plus riche, car plus interropérable et plus normalisée. »
Vers une gouvernance nationale
Ce grand ménage sera donc violent. Mais Joël Karecki, vice-président de la FIEEC (qui représente les industriels) estime qu’il est un mal nécessaire : « J’ai beau être un défenseur de l’industrie, il y a des moments ou l’euthanasie a du bon, assène-t-il. L’objectif est bien de dépasser le champ régional et de favoriser l’éclosion de champions nationaux dotés d’une capacité de survie dans un monde globalisé. Avec un marché fragmenté, nous n’avons aucune chance. »

Au-delà de la trop grande fragmentation du marché, c’est l’absence de lignes directrices des pouvoirs publics qui freine les projets d'e-santé. « Il faut que les industriels puissent avoir une vision et investir en toute confiance dans des secteurs qui ont été priorisés. Pour cela, nous appelons à une gouvernance renforcée au niveau de l’Etat » poursuit Joël Karecki. Ce que confirme Michel Gagneux, président de l’Asip. Il manque, selon lui, des axes stratégique lisibles pour les industriels. « Parmi le DMP, la télémédecine, les référentiels, ou encore les politiques de sécurité, où sont les priorités ? Le ministère devrait se réunir avec tous les grands décideurs, dont l'assurance maladie, pour fixer des axes vers lesquels convergeraient tous les acteurs. » Cette gouvernance nationale de l’e-santé pourrait être initiée courant 2013.
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