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Les banques réinvestissent dans leurs réseaux d'agences pour doper les ventes et fidéliser leurs clients. Une démarche indissociable d'une stratégie multicanal cohérente.
En plein boom internet, de grandes banques de détail s'étaient prises à rêver d'un futur sans agences. Cinq ans plus tard, le multicanal est bien advenu, mais les agences n'ont jamais été aussi nombreuses. En attendant l'heure de la
dématérialisation ultime, la plupart des réseaux bancaires se sont repositionnés après avoir engagé une refonte radicale de leur stratégie de distribution. Désormais, la plupart des opérations courantes ?" retraits, dépôts, transferts,
impressions de RIB, commandes de chéquier, ou support client ?" s'effectuent en dehors des agences. Dans leur dernière enquête annuelle mondiale, Capgemini, l'ING et l'Efma (Association européenne de gestion et de marketing financiers)
montrent que les distributeurs automatiques de billets (DAB), les guichets automatiques bancaires (GAB), le web, et le téléphone couvrent déjà 58 % de ces transactions. Une part qui devrait atteindre 70 % d'ici à 2010. En revanche, les
agences n'ont pas perdu la main sur la distribution de services financiers. De la simple ouverture de comptes à la vente de crédits immobiliers ou d'assurances, elles restent à l'origine de 86 % des transactions. D'ailleurs, trois quarts des
banques européennes interrogées par Accenture et SAP estiment même que leurs agences resteront leur principal canal de distribution.
Concurrence internet et ouverture européenne
De fait, la vente de produits financiers implique un niveau de confiance et des prestations de conseil que seules les agences peuvent délivrer. Elles représentent donc un atout considérable face à la concurrence sur internet et à
l'ouverture européenne du marché. Pour autant, la bataille s'annonce difficile. Aussi les banques ont-elles lancé un vaste mouvement d'industrialisation, visant à améliorer leur productivité et à mieux maîtriser leurs coûts. La production, la
distribution et la gestion des services financiers sont peu à peu confiées à des entités distinctes, en rupture avec le modèle traditionnel. ' Une agence peut proposer un crédit auto couplé à une assurance à partir de deux
usines, internes ou partenaires, illustre Joël Nadjar, consultant associé chez Accenture. Bâti sur mesure par le système d'information, le produit peut faire l'objet d'une simulation ou d'un contrat unique, puis être vendu sur
le champ. ' Ainsi, la plupart des banques font évoluer leur informatique pour vendre leurs services via d'autres établissements, et pour s'ouvrir aux produits et aux centres de gestion de leurs partenaires. De cette manière,
elles multiplient leurs canaux de distribution et élargissent leurs gammes de services. ' Il reste beaucoup à faire dans la mise en ?"uvre des architectures SOA de découplage entre les applications de production et de
distribution, estime cependant Joël Nadjar. Il nous faudrait aussi pouvoir disposer de données client plus fraîches et les restituer le mieux possible aux conseillers de clientèle. 'En effet, les agences doivent être en mesure de tarifer leurs produits en fonction de la stratégie marketing de l'enseigne et du profil de leurs clients (taux d'épargne, raison de l'entrée dans le réseau, etc.). Un moteur
d'intelligence artificielle capable de traduire le savoir-faire métier de la banque assistera ensuite le chargé de clientèle dans sa présentation commerciale, et suggérera des ventes croisées. Ce type d'outil aide ainsi à anticiper le départ à la
retraite des chargés de clientèle chevronnés en capitalisant sur leur expertise et en homogénéisant celle de leurs successeurs. Un enjeu d'autant plus crucial que les clients sont de mieux en mieux informés sur la concurrence, et que le modèle
d'affaires des banques de détail dépend de plus en plus des commissions perçues. A condition de prendre en compte les dernières transactions effectuées (opérations sur un PEA, dépenses importantes, etc.), ces données clients feront remonter les bons
prospects dans le cadre d'une campagne marketing.
Moins de sas plus d'ouverture
Afin de mettre en ?"uvre cette nouvelle approche de l'agence bancaire, les chargés de clientèle devront se consacrer à leur fonction commerciale. Or, en Europe, ils déclarent affecter 36 % de leur temps de travail à des tâches
administratives aux dépens de leurs relations en face-à-face avec leurs clients (source : Accenture-SAP). Pourtant, selon 55 % des conseillers, celles-ci devraient être accrues.Mais, heureusement, l'automatisation plus poussée de certains processus (ouverture de comptes, souscription à un service, gestion administrative) et le développement de rangées de GAB en agence les soulagent progressivement d'une
partie de leurs tâches à faible valeur ajoutée. La suppression des opérations de caisse rend inutiles les sas. Une occasion idéale pour les agences d'aménager de véritables espaces d'accueil, équipés d'outils de communication performants.Dans son centre de recherche et d'innovation de Sophia-Antipolis, Accenture présente ainsi des écrans plats affichant des informations qui varient selon la période de la journée, la situation géographique de l'agence, et les campagnes
marketing en cours ?" par exemple, une réponse à une offensive sur les crédits à la consommation. Ces écrans s'animent aussi au passage de clients porteurs de cartes individuelles RFID ou lorsque ces derniers choisissent une brochure équipée
d'une puce sur une étagère interactive. Le Tech Lab d'Accenture a aussi développé un mur d'images interactif dans le but de faciliter les premiers contacts des clients avec l'équipe commerciale. Associant une carte graphique haute résolution à des
caméras haute définition, ce mur peut être utilisé comme un écran tactile par plusieurs utilisateurs à la fois et ce, dans le cadre d'une présentation produit ou d'une simulation client.Les espaces libre-service et d'accueil libèrent, certes, les chargés de clientèle d'une part de leurs fonctions traditionnelles. Pour autant, ceux-ci ne reçoivent pas obligatoirement les clients qu'ils recherchent.
' Environ 80 % des clients ne rapportent rien aux banques, rappelle Alex Pierron, analyste chez Celent Communications. Ce sont pourtant les plus nombreux à visiter leur
agence. ' Il s'avère donc crucial de bien accueillir ceux à fort potentiel, plus enclins à se diriger vers des canaux de distribution alternatifs. Les banques en sont bien conscientes. Elles investissent donc beaucoup en
formation et surveillent la performance de leurs conseillers de clientèle à travers différents indicateurs ?" entre autres, les ventes croisées.
Interconnecter les divers canaux de distribution
L'interconnexion des différents canaux de distribution les aide aussi à anticiper certaines visites. De cette manière, la recherche d'un crédit immobilier sur le site web ou via le centre d'appel de l'enseigne pourra-t-elle être
signalée sous la forme d'une alerte e-mail au conseiller de clientèle concerné. L'étude de Capgemini, de l'ING et de l'Efma montre que seule une banque européenne sur deux dispose d'un fichier commun à ses divers canaux de distribution. Ainsi leur
interconnexion ?" une seule vue client ?" reste-t-elle une priorité pour 71 % des banques européennes, et pour la moitié des banques françaises, selon Accenture-SAP.Somme toute, depuis quelques mois, l'informatique prolonge l'agence bancaire. A la caisse régionale du Crédit Agricole Mutuel Centre, par exemple, une soixantaine de commerciaux peuvent accéder à l'ensemble de leur environnement
informatique d'agence sur leur portable. Et, dès lors, traiter à domicile les projets de leurs clients, de la proposition à la signature. Cette solution Citrix renforce la proximité avec la clientèle. Elle réduit aussi les tâches administratives
(prise de notes, ressaisie en agence), et aide à aborder des besoins complémentaires sans préparation préalable. Dans le même esprit, la force de vente haut de gamme de la banque privée Compagnie 1818 teste avec Accenture la saisie automatique du
stylo électronique pour les ouvertures de mandat à domicile.Les nouvelles technologies facilitent donc la façon de repenser la distribution et la relation client. Grâce à l'automatisation de certaines opérations, désormais réalisées par le client, les banques diminuent leurs coûts, et les
conseillers de clientèle libèrent du temps pour leur fonction commerciale. Progressivement, les agences se transforment pour mieux les accompagner.b.mathieux@01informatique.presse.fr
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