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Trente ans après les premiers prototypes, les technologies de papier électronique arrivent doucement à maturité. Loin de se réduire au seul livre électronique, les premières applications apparaîtront en entreprise.
Serpent de mer technologique, le papier électronique connaît un regain de vitalité avec plusieurs annonces de tablettes électroniques : iLiad d'iRex, PRS-500 de Sony, Flepia, un modèle couleur de Fujitsu. Côté usage, le journal Les Échos diffuse sur une tablette iLiad depuis une semaine, on voit apparaître des montres (Seiko), des affichages publicitaires, des étiquettes, etc. ' Le marché potentiel est important, plus que nous ne le pensions en ce qui concerne les étiquettes électroniques : à cause des réglementations sur la traçabilité, les magasins et les chaînes de distribution se préparent à évoluer des afficheurs classiques, trop limités, aux étiquettes en papier électronique ', estime Jacques Angelé, directeur technique de Neoptic, société de production de papier électronique.Les technologies employées sont nombreuses, ' il en existe une dizaine en concurrence, dont quatre ou cinq sont déjà au point. Physiquement très différentes, elles ne font aucune différence pour l'utilisateur ', assure Jacques Angelé. La plus connue est l'encre électronique, inventée par Xerox, affinée par le MIT, exploitée par E.INK. Bridgestone en propose une variation plus mince avec un substrat de sa conception. SiPix affine les particules utilisées pour l'affichage. Nemoptic exploite la technologie BiNem, dérivant du LCD. D'autres travaillent sur l'Oled. La première usine européenne de production d'e-papier, celle de Plastic Logic, verra le jour en 2007.Pourquoi cette effervescence autour d'une technologie vieille de trente ans ? ' C'est le traditionnel Hype Cycle de Gartner. L'industrie développe ces technologies depuis les années soixante-dix. En 2000-2001, quand elles ont atteint la notoriété, il y a eu un pic d'intérêt avec les premiers e-books, puis l'inévitable désillusion. Aujourd'hui, nous nous rapprochons des applications initiales ', considère Jacques Angelé. ' Des prototypes, présentés il y a quelques années, aux tablettes de lecture électroniques [TLE, Ndlr] actuelles, le confort de lecture est sans commune mesure, constate Sophie Gohé, responsable de développement éditorial d'ESF. Et des pays émergents comme la Chine et l'Inde sont très impliqués dans les TLE, pour éviter la déforestation, ou remédier aux problèmes d'hygrométrie. '
' Aujourd'hui, tout le monde est sûr que les TLE s'imposeront auprès du public. Dans la presse, nombre d'éditeurs réalisent des maquettes en attendant que le marché prenne forme ', constate Mathieu Balzarini, directeur technique de 4Dconcept, distributeur de la TLE iRex d'ILiad.
10 000 pages sur un écran
Mais les premiers débouchés sont attendus du côté des entreprises. ' Pour certains secteurs, il y a un bénéfice évident à substituer une TLE au papier. Ainsi, nous avons comme clients des constructeurs et des industriels, qui utilisent la TLE pour préparer toutes les étapes de maintenance sur un chantier. Toute la documentation réside sur la TLE, qui offre des possibilités de saisie. Des agences immobilières s'en servent pour faire des états des lieux ou consulter les contrats des syndics. Les avocats s'évitent le transport de lourds dossiers ', détaille Mathieu Balzarini. Plutôt que les ?"uvres complètes de Balzac, les documentations techniques ou les formulaires constituent les premiers débouchés. Pour deux raisons. Le côté pratique : un e-book peut emporter de 7 000 à 10 000 pages en divers formats, .txt, .doc, .rtf, .pdf ou .xhtml, et des fichiers audio et vidéo, et plutôt que d'imprimer très peu d'exemplaires d'une lourde documentation, autant la diffuser sous forme de carte mémoire. Ensuite, la question de la gestion des droits, qui freine les expérimentations grand public, n'a pas les mêmes conséquences dans l'entreprise. ' Les technologies de papier électronique sont un des verrous qui permettent de contrôler la chaîne de distribution du contenu, estime Jacques Angelé. Les grands distributeurs veulent maîtriser cette chaîne pour créer un marché captif. Le marché professionnel demande une forte personnalisation des terminaux, qui seront diffusés en petites quantités. La problématique diffère. '
La guerre des formats
Reste que l'utilisation de la TLE en entreprise nécessite une réflexion pour rendre les flux exploitables, c'est-à-dire structurés au maximum. De plus, en attendant la prochaine version de l'OS des TLE (le plus souvent Linux), les fonctions sont dépendantes du format. Pour l'iLiad d'iRex, les formats .txt ou .xhtml permettent seulement d'agrandir ou de réduire les polices, alors qu'en .pdf les fonctions sont multiples (zoom, glisser du texte, etc.). La guerre des formats fait rage. En l'absence de normalisation, chacun pousse son format, il en existe déjà une vingtaine, tandis que le consortium OpenReader tente d'imposer un format ouvert, normalisé, et protégé par DRM. Même les formats physiques restent à définir. Si le A4 et le A5 dominent, ces écrans souples donnent naissance à de nouveaux équipements tel le livre cellulaire, hybride de TLE et de smartphone, développé par Polymer Vision et bientôt vendu par Telecom Italia. ' Il y a en laboratoire de nombreuses technologies de papier électronique qui verront bientôt le jour. On ne peut pas rester captif d'une seule, à terme, il y aura une spécialisation ', conclut Jacques Angelé.
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