Le parcours d'obstacles des recruteurs en SSII

Nicolas Chabrier, président d'Evaluant. Créée en 2001, cette SSII est spécialisée dans le développement d'applications en environnement Microsoft.

Depuis plus d'un an, l'essor du marché de la prestation de services en informatique accentue les difficultés de recrutement. Qu'il s'agisse de profils expérimentés ou débutants, rares sont les personnes qui postulent aux multiples postes ouverts par les SSII. A cela, trois raisons.La première : la formation ne semble pas en adéquation avec le marché. Il faut dire que les exigences relatives aux nouvelles technologies et les attentes des acteurs du marché ne permettent quasiment pas le recrutement de profils en deçà d'un bac + 4 ou + 5. De plus, les formations dispensées par les universités françaises et les écoles d'ingénieurs ne sont pas forcément en phase avec les besoins technologiques actuels (.Net, SOA, PGI...). Ainsi, dans la majorité des cas, une personne recrutée suit une formation dès son entrée dans la SSII. L'investissement qui en découle n'offre que peu de marge de man?"uvre au recruteur, qui n'a pas le droit à l'erreur dans les profils sélectionnés. L'avènement des formations supérieures en alternance aide néanmoins à limiter les risques. De plus en plus de sociétés font appel à cette solution pour contribuer personnellement à l'effort de formation des jeunes recrues. Progrès ou échec du système de l'enseignement supérieur ?La deuxième raison concerne les réseaux de recrutement, coûteux, peu efficaces, et chronophages. On se tourne souvent vers ces réseaux, privés ou publics, afin de multiplier les opportunités. Mais, en période de pénurie, ceux-ci sont soumis à la même contrainte que les entreprises, et les profils diffusés ne sont pas pléthoriques. Salons de l'emploi, sites web spécialisés, cabinets de recrutement : tous ces moyens nécessitent une dépense substantielle, dont le retour sur investissement s'avère loin d'être immédiat. Notamment, l'utilisation généralisée d'internet, avec l'envoi de CV et de lettres de motivation en un clic, oblige les ressources humaines à faire un effort supplémentaire de traitement et d'aiguillage des demandes.

Faire appel aux étrangers : une fausse bonne solution

Dernière raison, enfin : recourir aux travailleurs étrangers constitue une fausse bonne solution. Si, en France, la tension augmente sur le marché de l'emploi des SSII, il semblerait qu'elle ne soit pas encore perçue dans bon nombre de pays émergents. Les candidatures de personnes qualifiées originaires d'Afrique du Nord, d'Afrique subsaharienne, et d'Asie du Sud-Est sont souvent en adéquation avec les postes ouverts par les SSII. En plus d'introduire une mixité culturelle au sein de leur structure, les recruteurs voient là un moyen de pallier la demande. Ceci est sans compter sur les restrictions draconiennes en matière de permis de travail. On m'a même expliqué qu'un dossier mettait de six à huit mois pour être traité, et que dans 80 % des cas, il était refusé ! Cette démarche est possible en théorie, mais en pratique, il ne faut pas espérer trouver la solution aux difficultés de recrutement par le biais de l'immigration, fut-elle choisie.

Le facteur humain s'avère primordial

Heureusement, même en dépit de ces obstacles à l'embauche, réussir ses recrutements reste possible. Le marché du service informatique est avant tout une affaire d'hommes et de femmes qui participent à l'évolution de l'informatique. Le facteur humain est primordial. Pour être séduisante, une SSII doit favoriser l'épanouissement professionnel de ses salariés. Aujourd'hui, l'attrait d'une entreprise ne dépend plus de sa taille, mais de sa capacité à assurer à ses collaborateurs un plan de carrière qui leur permet d'être toujours en phase avec l'innovation technologique. Ainsi, le recrutement peut se faire plus humainement, par relation ou cooptation par les salariés de l'entreprise. Cette démarche présente un avantage de cohésion dans la structure : ' Tu peux me croire, ce gars-là, il est bien ! '. La cooptation devient presque du tutorat, et la nouvelle recrue est ainsi accueillie dans les meilleures conditions.Il est rassurant de constater que le facteur humain prend une large place dans le processus de recrutement, quand le marché de l'emploi se complique. Et j'observe que, paradoxalement, le turnover s'avère faible lorsque lon pratique un recrutement de proximité, et cela, malgré un marché très concurrentiel.