Le problème n'est pas l'email mais le client mail

Retour sur IBM Connect et la présenté d'IBM Mail, une nouvelle porte d'entrée sur le poste utilisateur qui gère le multicanal (emails, réseaux sociaux ou encore chat).
Depuis le temps qu’on le cloue au pilori, qu’on prédit sa fin et son remplacement par les réseaux sociaux d’entreprise force est de reconnaitre que l’email se porte encore plutôt bien et continue son bout de chemin. A part quelques cas qui restent marginaux, force est de reconnaitre que personne n’a encore trouvé de remplaçant à cet outil certes imparfait et mal utilisé (mais là le problème est du côté de l’utilisateur) mais polyvalent.
C’est le caractère universel de l’email qui le rend indispensable
Les raisons en sont multiples. D’abord parce que le réseau social encore mal intégré dans le poste et les habitudes de travail a besoin, pour se rappeler au bon souvenir de l’utilisateur, d’utiliser des notifications par email, allant jusqu’à augmenter la volumétrie de ce dernier. On a beau dire que le contenu a déserté l’email qui ne devient qu’un outil de notification, il n’empêche que cela fait un message de plus qui vient s’empiler dans l’ « inbox ».
Ensuite parce que, même lorsqu’un réseau social d’entreprise est ouvert sur l’extérieur, on ne pourra jamais y inclure tous les contacts extérieurs. De plus, imposer à ses partenaires et clients de passer par ce canal aboutit à un échec dans la plupart des cas. Enfin parce devant la multiplication des outils et fenêtres sur son poste de travail, l’utilisateur tend à prioriser l’essentiel : tout le monde utilise l’email et on s’en sert pour joindre tout le monde. C’est ce caractère universel qui a aidé à sa propagation et le rend difficilement expulsable quand bien même on a conscience de ses limites.
Ce n’est pas la prolifération des outils qui gêne les utilisateurs
Mais l’email est-il vraiment le problème ? Qu’est ce qui dérange le plus l’utilisateur : la multiplication des canaux ou la multiplication des logiciels qui permettent de les gérer ? Lorsque la question leur est posée, la réponse n’est pas nécessairement celle qu’on attend. L’utilisateur n’a rien contre la prolifération des outils dans la mesure où ils font quelque chose de nécessaire et qu’ils le font bien. Ce qui l’ennuie, c’est que cela se traduise le plus souvent par une multiplication de fenêtres pour gérer ces canaux hermétiques l’un à l’autre.
Oublions de penser par canal et par application et mettons-nous à la place de l’utilisateur. Quelle est sa vision du sujet ? Il a des personnes avec qui il interagit, des tâches qui demandent une interaction et des demandes auxquelles répondre et ce peu importe le canal. Le canal est la dernière chose dont il se préoccupe pourvu que l’opération soit simple et intuitive. Son problème n’est pas tant la multiplicité des canaux, combat perdu d’avance, que la multiplicité des clients, combat du poste de travail collaboratif, unifié. Car email et réseaux sociaux ne sont pas les seuls en cause : chat, vidéoconférence etc. sont également en cause.
La vision d’IBM sur le collaboratif
Tentative de réponse la semaine dernière avec la présentation d’IBM Mail lors de la conférence IBM Connect à Orlando. Contrairement à ce qu’on a pu lire çà et là, non IBM Mail n’est pas le futur de l’email ou sa réinvention. C’est davantage une nouvelle vision de l’expérience collaborative de l’utilisateur, pensée en fonction de l’utilisateur.

Le première axe retenu est le « multicanal » : l’outil prend en compte tous les contacts, messages et interactions peu importe qu’ils proviennent du mail, du réseau social. Il permet de contacter une personne par l’ensemble de ces canaux mais également par chat, vidéo etc.
Second axe : faciliter la gestion de l’attention du collaborateur. La vue est limitée aux événements proches dans le temps et aux choses et personnes « qui comptent ». Ici entrent en jeu les « analytics » qui en fonction du contexte, de l’emploi du temps et des tâches du jour, vont mettre en avant certains messages, certaines personnes. On peut également mettre une conversation en mode « silence » lorsqu’on ne veut pas être alerté si une nouvelle réponse est faite à un message.
Troisième axe : une vue orientée « action ». La page d’accueil n’est pas une liste de messages mais une liste de tâches à effectuer ou dues par les autres, emploi du temps et personnes concernées.
De manière intéressante, la recherche sur un mot, le nom d’un projet, permet d’afficher toutes les conversations liées, les personnes impliquées et les documents partagés peu importe leur localisation (email, réseau social ou autre). Cela apporte la notion de contexte dans la collaboration : quand on est dans le contexte d’un projet on ne voit que les messages, documents et personnes concernées sans être « pollué » par le reste
Une nouvelle porte d’entrée sur le poste de travail
Bien-sûr ça n’est que l’ébauche d’une réponse. Le produit n’arrivera que fin 2014 et risque bien d’évoluer d’ici là au gré des retours et des tests. Mais il montre bien vers quoi on va se diriger à l’avenir : pas un outil de de plus qui va remplacer l’existant mais une nouvelle manière de présenter l’existant d’une manière utilisable, compréhensible et cohérente pour l’utilisateur. Il ne faut pas voir IBM Mail comme un nouvel outil mais comme une nouvelle porte d’entrée sur le poste de travail. Une porte d’entrée que l’on pourra trouver dans l’email, dans le réseau social et, je l’espère, sur le portail, point d’entrée de l’intranet.
Alors bien sur des questions demeurent. Dans quelle mesure pourra-t-on y ajouter d’autres canaux ? Les analytics arriveront-ils à suffisamment apprendre de l’utilisateur pour bien comprendre « ce qui compte ». A force de prioriser va-t-on rater des informations ? Et, dernier point mais non des moindres, l’utilisateur va-t-il rapidement s’adapter à un tel changement et apprendre à faire confiance au système voire accepter que tout n’est pas important et qu’on ne peut traiter tout ce qui rentre ?
Quoi qu’il en soit c’est un premier pas qui préfigure sans aucun doute l’évolution du mail et, plus générale, de nos postes de travail collaboratifs. Orientés vers l’utilisateur, vers ce qui compte, vers les actions, contextuels. Et peu importent les outils mis en œuvre derrière, email, réseau social ou autre.