Un pied dans l'industrie et l'autre dans la recherche : avant d'entrer chez Bull, Gérard Roucairol était professeur à l'Ecole Normale et à l'Université Paris-Sud où il a dirigé le laboratoire de recherche en informatique. Il en a
retiré la faculté d'associer les deux mondes. Et, surtout, une vision de l'informatique tenant compte à la fois de l'évolution des technologies, de leurs usages et des contraintes économiques. Vision qui le conduit à percevoir le
' software as a service ' (SAAS) comme le futur de l'informatique. Démonstration.
Des infrastructures aux usages multiples
Point de départ : avec le SAAS, le logiciel devient un service en ligne qui communique de manière standardisée avec d'autres logiciels, ou avec les utilisateurs.
' Les services web sont des fonctions
logicielles identifiées par une adresse web (URL). Et ça, c'est une révolution fondamentale, qui va entraîner, notamment, une généralisation du paiement à l'usage. ' En effet, s'il est possible de construire une
infrastructure de services applicatifs aux usages multiples, les métiers de l'outsourcing changeront du tout au tout. Cette distribution des logiciels en services web va aider à casser le cloisonnement en silos des applications d'entreprise, et
ouvrir la voie à la réorganisation des systèmes informatiques. La maîtrise des investissements, la rationalisation des ressources, et l'uniformisation des accès vont inciter à regrouper serveurs et périphériques d'archivage sous forme de
' fermes '. Celles-ci atteindront des tailles considérables dès l'instant où les services web seront largement accessibles via internet. Munies d'intergiciels de virtualisation, d'architectures
orientées service, de fichiers distribués contribuant à abstraire leur répartition physique, ces fermes prendront la forme de super-ordinateurs. Ces nouveaux mainframes donneront accès à de multiples applications.Un autre élément entre ici en jeu dans le raisonnement de Gérard Roucairol : ce n'est plus l'accroissement de la fréquence des processeurs qui dicte l'évolution de la puissance des ordinateurs, mais le nombre de c?"urs de
processeurs sur une puce. Or, jusqu'à présent, les éditeurs de logiciels ignoraient cette nouvelle conséquence de la loi de Moore :
' L'arrêt de l'accroissement de la fréquence serait pour eux un tremblement de terre. Si
on leur dit que l'on ne va plus augmenter la fréquence des processeurs, mais le nombre de c?"urs, ils devront modifier les algorithmes de leurs logiciels. Et cela leur coûtera très cher. ' D'où le besoin pour eux d'abaisser
leurs coûts de développement, de standardiser, et de paralléliser. Mais cela,
' tout le monde n'est pas capable de le faire. Il faut des compétences que possèdent, notamment, les constructeurs
d'informatique '.
L'ère du ' global mainframe '
On est donc loin de la vente de produits de commodité. Architectures orientées services, parallélisation, nouvelle génération de mainframes... Tous ces arguments conduisent, en effet, à l'apparition de véritables centrales
informatiques. Constituées de composants standards, matériels ou logiciels, celles-ci n'en sont pas moins de véritables super-ordinateurs spécifiques :
' Multic?"ur, multin?"ud, et ouvert, c'est l'ère du
" global mainframe ". D'une certaine manière, Google et Amazon montrent l'exemple de ces nouvelles constructions informatiques. ' Selon Gérard Roucairol, seuls quelques constructeurs dans le monde,
dont Bull, disposent des compétences pour les élaborer.Pour les entreprises, cette concentration des ressources informatiques et des données peut donner naissance à de nouvelles activités. Ainsi, selon la théorie de la
' longue traîne ' de
Chris Anderson, vendre beaucoup de produits en petit volume peut équivaloir, en termes de chiffre d'affaires et de rentabilité, à vendre massivement un seul produit.
' Le fait de dire qu'il n'est pas plus cher de vendre des
multitudes de produits est un véritable saut cognitif par rapport à la logique du marché de masse ', conclut Gérard Roucairol.Vos idées :
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