Le web 2.0 a fait vaciller Ben Ali
Xavier Biseul, grand reporterIl ne s'agit pas ici d'évoquer une révolution virtuelle où les tweets auraient remplacé les balles. Mais de pointer l'apport des médias sociaux dans l'ouverture d'une société jusqu'alors privée d'expression. Dès le 7 décembre, Le Monde publie, via Wikileaks, un câble diplomatique américain décrivant la corruption au plus haut niveau du régime de Ben Ali. Ce mémo qualifie son entourage familial de quasi-mafia. Fin décembre, les premières vidéos des manifestations et de leurs répressions apparaissent sur Youtube. Puis le webzine The Tech Herald détaille comment le pouvoir tunisien se sert du fournisseur d'accès national, ATI, pour espionner les services de Gmail, de Yahoo et de Facebook. La cyberdissidence s'organise alors, rassemblant plus d'un million et demi de fans sur le réseau social pour un pays de dix millions d'habitants. Le portail Nawaat.org fédère ensuite les énergies, tandis que les hackers d'Anonymous lancent une attaque massive sur les sites proches du pouvoir. Mi-janvier, à peine libéré, le blogueur Slim Amamou est propulsé secrétaire d'Etat à la Jeunesse et aux Sports. Il l'annonce sur Twitter avant même que la composition du gouvernement d'union nationale soit officielle. Dans un autre tweet, daté du 18 janvier, il déclare ne pas vouloir démissionner “ comme les autres ”. Associé au cabinet Ernst & Young, Sami Zaoui se voit, lui, confier le portefeuille du numérique. Aujourd'hui, le gouvernement transitoire propose de faire connaître les candidats aux futures élections présidentielles sur Tunisie2011.com. Reste enfin la mémoire vive du web qui peut servir l'Histoire en empêchant qu'on oublie les errements de l'ancien parti unique. Comme cet appel pour un nouveau mandat de Ben Ali en 2014, signé par 65 personnalités de premier plan. Les commentaires, livrés pour la plupart sous une vraie identité, sont édifiants.
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