L'EDI fiscal est synonyme de facturation simplifiée
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La dématérialisation fiscale des factures nécessite de choisir le traducteur, l'opérateur, les protocoles de transfert des données et système d'archivage. Un chantier rigoureux mais qui est source de gains de productivité.
La dématérialisation fiscale des factures en EDI (échange de données informatisées) concerne en priorité les entreprises bien avancées sur l'utilisation de l'EDI. Une démarche suivie par chacune des quatre entreprises étudiées ici, même si aucune n'est passée à 100 % de factures dématérialisées, tous leurs partenaires n'étant pas à même de recevoir ou d'envoyer des documents électroniques conformes aux normes fiscales. Tout projet de dématérialisation implique une étroite collaboration entre client et fournisseur, tant pour les aspects juridiques (élaboration du contrat dit “ d'interchange ”) que techniques (cahier des charges et référentiel commun). S'il est possible de dématérialiser les factures entrantes et sortantes, le plus souvent seul un des deux flux est mis en place au départ.
Les besoins : des fournisseurs motivés
Le passage à la dématérialisation fiscale des factures sortantes des fournisseurs vient souvent d'une demande de leurs clients. Guy Gerbeaux, responsable e-commerce pour Coca-Cola Company, l'explique : “ Nous utilisions déjà de l'EDI depuis longtemps. Nous avons commencé par gérer les commandes en EDI au début des années 90. Le passage à la dématérialisation fiscale s'est fait à la demande de Carrefour. ” David Maillet, responsable projets informatiques chez HF Company, se rappelle aussi que “ la demande est venue au départ de Carrefour Belgique, qui n'a cependant pas imposé de solution. Au final, nous devions à la fois gérer plusieurs pays avec des normes différentes (XML signé au Portugal et EDIfact signé en Espagne), ainsi que plusieurs clients avec chacun un mapping spécifique. ”Philippe Pipon, responsable informatique chez Castel Frères, ajoute que “ initialement, nous avons décidé d'utiliser de l'EDI pour faciliter les communications et rendre les données fiables. Le passage à l'EDI fiscal, a été motivé par une volonté de faire des économies. Mais les entreprises clientes ont forcément plus de poids que nous, fournisseurs, pour imposer le passage à la dématérialisation fiscale. Surtout que les ajustements sont plus faciles à faire de leur côté que du nôtre ”.Les clients décident quant à eux de passer à la dématérialisation de leurs factures entrantes pour accélérer et diminuer le coût du traitement des commandes et incitent donc leurs fournisseurs à s'y mettre. Christophe Charbonnier, responsable informatique du groupe Massa Autopneu déclare que “ quitte à faire de l'EDI autant faire de la dématérialisation fiscale pour aller jusqu'au bout de la démarche. Pour l'instant, nous avons des échanges totalement dématérialisés avec Goodyear, l'un de nos fournisseurs. Et nous avons automatisé les processus avec un autre, Bridgestone, mais les factures papier n'ont pas encore été éliminées ”.
Le choix : choisir un traducteur et un opérateur
La première étape de la dématérialisation consiste à traduire les données des factures issues du logiciel métier en message EDI à l'aide d'un traducteur. “ Nous utilisions le traducteur EDI de la société Generix jusqu'à ce que celle-ci programme son arrêt, note Christophe Charbonnier. Nous avons finalement opté pour la solution de Prologue qui nous sert aussi d'opérateur pour transférer nos factures. ” David Maillet avait besoin d'un traducteur EDI supportant XML, en plus de la norme EDIfact. “ Celui de Seeburger remplissait cette condition, ainsi que celui d'@GP, mais ce dernier nous obligeait à externaliser la solution. Or, nous avons comme philosophie de tout faire en interne, à cause d'une mauvaise expérience avec Influx, notre premier traducteur. Nous devions payer à chaque nouveau message - même pour de petits changements. ”Les données des factures EDI sont ensuite envoyées au client à l'aide d'un logiciel hébergé par l'éditeur, ou en interne. Il est préférable que la solution de l'opérateur choisie ait obtenu la certification d'un organisme paritaire tel GS1. Dans le cas opposé, les factures ont de fortes probabilités de ne pas être conformes aux obligations légales. Le choix de la solution peut venir de sa capacité à gérer de grands volumes de données, de sa capacité d'évolution ou de son positionnement. Ainsi, Philippe Pipon affirme avoir eu recours à EDT car la solution était déjà déployée par des clients de la grande distribution.
La mise en œuvre : la jungle des protocoles
Les messages EDI sont transmis soit en utilisant un réseau à valeur ajoutée soit des protocoles internet. Ces derniers tendant à remplacer les premiers. Les logiciels qui reçoivent et transmettent les données servent à les valider, les stocker et à les visualiser. Après la mise en place des différents composants, une période de tests est indispensable entre les différents partenaires pour s'assurer que les transferts sont correctement effectués et que les messages EDI sont conformes aux normes fiscales.Et David Maillet souligne : “ Notre logiciel métier génère un fichier de facture, transféré par FTP sur notre serveur interne dédié à la solution de Seeburger. La facture est alors traduite au format EDI et sa conformité aux règles définies par GS1 est vérifiée. Il faut, par exemple, que le champ de la TVA intracommunautaire soit présent. Ensuite, les données sont transférées grâce au réseau à valeur ajoutée Allegro ou de préférence en AS2, selon ce que nous demandent nos clients. ” Le même protocole n'est en effet pas nécessairement utilisé pour toutes les transactions. “ Nous utilisons le réseau à valeur ajouté GXS pour les messages EDI autres que les factures dématérialisées, clarifie Philippe Pipon. Et nous effectuons un transfert direct par sFTP entre notre entreprise et EDT. Il était important que les messages soient cryptés, ce qui est le cas avec le protocole sFTP. EDT est un peu notre réseau à valeur ajouté pour les factures. ”Christophe Charbonnier, quant à lui, n'utilise pas de réseau à valeur ajoutée, “ le cahier de nos fournisseurs spécifie les champs et leur type à utiliser dans les messages EDI. La nature de chaque information transmise est précisée. Nous utilisons les FTP avec nos fournisseurs, et nous prévoyons d'utiliser le protocole AS2, mais celui-ci est plus compliqué à mettre en place ”. Avec le FTP sécurisé, le logiciel scanne régulièrement le répertoire des fournisseurs pour vérifier si de nouveaux fichiers ont été déposés. “ Nous n'avons jamais eu un problème avec ce système de transfert, apprécie Christophe Charbonnier. Nous avons installé un serveur sFTP, et nos partenaires ont mis en place un certificat numérique pour s'authentifier. Cette opération est le seul point délicat de l'installation, mais ils maîtrisaient l'opération. ”Lors de la réception des données EDI, celles-ci sont assemblées pour créer un document facture. “ Pour chaque facture, nous envoyons un message classique EDIfact vers la plate-forme b-process qui le récupère et restitue la facture sous forme lisible pour tout le monde, distingue Guy Gerbeaux. Le logo est incorporé à ce moment-là, pour éviter de l'envoyer à chaque fois. Le fichier XML créé sur la plate-forme est ensuite sauvegardé deux fois dans deux endroits différents pour Carrefour et Coca-Cola Entreprise. ”
Les écueils : être précis dans les données des factures
L'un des principaux freins au déploiement provient de la qualité de la facture. Les données doivent être précises, et celles qui sont obligatoires ne doivent pas manquer. Philippe Pipon expose ainsi :“ Nous partions d'un prix unitaire trop précis et dans le calcul de la facturation nous n'utilisions pas un nombre suffisant de décimales. A l'autre bout de la chaîne, quand le calcul était refait sur le serveur d'EDT les arrondis ne tombaient pas juste. ” Mais les problèmes sont plus souvent organisationnels que techniques. Guy Gerbeaux l'atteste : “ Il a fallu se mettre d'accord avec Carrefour sur la manière d'utiliser le numéro de commande, le retour produit, le retour palette, les remises, mais techniquement nous n'avons pas eu de difficultés majeures. D'autres obligations étaient légales comme le numéro de TVA intracommunautaire. ” Et Jean-Noël Clémentine poursuit : “ Les rares erreurs observées avec le système actuel surviennent quand notre service rajoute un nouveau champ sur la facture et oublie de demander à b-process de l'inclure dans son système. ” Une collaboration importante entre les différents partenaires est en effet indispensable, notamment lors des tests des flux EDI pour être sûr de leur validité fiscale. Un expert EDI est souvent nommé en interne pour garantir la validité des messages. Dans le cas d'entreprises dématérialisant leur facture et ce, à l'échelle européenne, les technologies appliquées dans chaque pays peuvent demander des adaptations. David Maillet fournit une explication concrète, ainsi, “ en Espagne une fonction en Java a dû être rajoutée pour intégrer le certificat dans le message EDIfact en plus de la signature. Et nous travaillons en ce moment sur le cas du XML utilisé au Portugal ”. Un autre point se révèle difficile à gérer : les solutions d'archivage dans le cas de solutions hébergées en interne par les entreprises. Utiliser un tiers archiveurs est onéreux, mais plus simple que de s'en occuper soi-même. David Maillet atteste : “ Pour l'instant, nous archivons sur un système de fichiers normal, mais nous recherchons une solution plus évoluée. ”Les projets de dématérialisation fiscale des factures semblent en augmentation. Guy Gerbeaux en évoque les raisons : “ Il y a de moins en moins de contraintes de la part de l'administration fiscale, donc nos clients se mettent de plus en plus à la dématérialisation. Avant la directive européenne de 2005, les serveurs où transitent et où sont stockées les factures devaient ainsi être en France, mais ce n'est plus obligatoire. ” Et David Maillet constate :“ La plupart de nos clients veulent passer en dématérialisation, nous avons quasiment un projet par mois. Ils se réduisent souvent à un paramétrage EDI avec certaines filiales, et vont assez vite. ”