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Selon les opérateurs alternatifs à France Télécom, la concurrence n'a jamais été autant en danger que ces jours-ci. Ils s'interrogent sur ce que veulent vraiment les députés.
' En France, on oublie combien la concurrence est bonne. 'Jean-Louis Constanza, directeur général de Télé 2 France, reste serein dans le contexte actuel d'un secteur télécoms en pleine tempête. Le vote d'un amendement instaurant l'allègement du contrôle tarifaire de l'Autorité de régulation des télécoms (ART) surprend les opérateurs. ' C'est un camouflet pour l'ART ', clame l'un d'entre eux, tandis qu'un autre estime qu'il est irrationnel d'introduire un volet sur la régulation télécoms dans la loi sur l'économie numérique (LEN), alors que la transposition des directives européennes sur le sujet doit intervenir quelques semaines après. Une transposition que Paul Champsaur, président de l'ART, souhaite la plus rapide et la plus fidèle possible. En clair, l'ART espère retrouver son rôle de gendarme, que l'amendement de la LEN tente de lui ôter. ' Que veulent exactement les pouvoirs publics ? ', s'interroge François Maire, président de l'Afors Télécom (Association française des opérateurs de réseaux et services). Et d'estimer que ' l'ART est coincée entre son pouvoir de recommandation au ministre de l'Industrie et le pouvoir décisionnaire de ce dernier, dont elle sait qu'il est l'actionnaire majoritaire de France Télécom. '
Les députés dans une logique nébuleuse
Ce qui surprend également, c'est la manière dont les députés ont pu soutenir un texte aussi néfaste pour la concurrence. Cette disposition ' consiste à permettre à France Télécom de ne plus avoir les mains liées face à la concurrence pour les offres en zones denses, où la concurrence a eu le temps de se développer depuis 1998 ', déclarait Patrick Ollier, président UMP de la Commission des affaires économiques, et cité par le quotidien Les Echos. ' Les députés, inspirés par le président de France Télécom, prennent aujourd'hui une position anti-bruxelloise de bon ton dans la campagne des régionales ', martèle un opérateur. De plus, France Télécom peut faire valoir qu'il possède un vrai bassin d'emplois en région. On comprendra ainsi la vision à court terme des députés, qui pourront se targuer d'avoir sauvé France Télécom plutôt que de délivrer un message moins fort en estimant avoir soutenu la concurrence ! Mais les députés se sont certainement enfermés eux-mêmes dans une logique nébuleuse. En effet, les concurrents de l'opérateur historique font remarquer qu'il est impossible de concilier le rétablissement d'un monopole de fait avec les volontés affichées du gouvernement de réduire la fracture numérique dans les régions. Les concurrents n'ont-ils pas trop crié au loup qu'ils ne sont aujourd'hui plus entendus ? En ch?"ur, ils estiment que le loup France Télécom est toujours aussi agressif et plus présent que jamais. Et surtout, qu'ils n'ont pas le même accès au ministère de l'Economie et des Finances ou au président de la République pour faire valoir leurs positions. Mais le contrôle tarifaire et le lobby de France Télécom ne sont pas les seuls soucis des alternatifs, qui voient d'un très mauvais ?"il le fait que France Télécom fasse payer au marché national ses errances dispendieuses à l'international rachats de NTL, Equant et Orange.Les alternatifs réclamaient à cor et à cri Cegetel en tête la revente en gros de l'abonnement, leur permettant non seulement d'envoyer une facture unique à leurs abonnés, mais aussi de devenir leur seul interlocuteur sur l'ensemble de leurs communications. La bataille faisait rage quand soudain, Cegetel a signé avec France Télécom un accord sur le sujet. Ainsi, et à partir de septembre 2004, Cegetel pourra facturer au nom de France Télécom l'abonnement qu'il lui reversera ensuite. Ce n'est donc pas de revente qu'il s'agit, mais plutôt d'un accord de facturation pour compte de tiers.D'aucuns seraient tentés de corréler cette annonce avec celle du lancement de Cegetel dans le dégroupage. Ainsi, ' Cegetel peut s'installer dans le dégroupage en renonçant à obtenir la revente de l'abonnement ', estime un acteur assez dépité. ' Nous n'avons pas renoncé à obtenir la revente, mais les premières discussions avec France Télécom ont fait apparaître un certain nombre de problèmes tant techniques que commerciaux. Nous avons donc opté pour une solution intérimaire, qui soit une première réponse à la demande de nos clients d'avoir une facture unique. Nous continuons de travailler au sein de l'ART sur ce dossier ', se défend Charles Rozmaryn, président du directoire de Cegetel. Une défense qui ne convainc pas : ' Cegetel nous a bien torpillés sur ce coup-là. ' Le monde des télécoms essuie donc aujourd'hui une vraie tempête, que les plus faibles auront sans doute du mal à traverser, initiant probablement une nouvelle concentration du marché.
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