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Les budgets ne progressent pas, mais les DSI des collectivités doivent gérer toujours plus de projets. Ils cherchent leur place, avec des directions n'ayant souvent pas pris conscience du rôle stratégique du SI dans leur organisation.
Les faits
Mi-novembre, le cabinet Mazars, en partenariat avec 01 Informatique, a dévoilé les résultats de sa cinquième enquête sur les systèmes d'information des collectivités territoriales. Comme lors des quatre éditions précédentes, elle dresse un panorama de leur système d'information en croisant les visions des directions générales et des DSI.
L'analyse
Bon travail, mais poursuivre l'effort. C'est l'appréciation qui pourrait être adressée à bien des DSI de collectivités territoriales. Ils ont mis les bouchées doubles au cours des cinq dernières années pour rattraper le retard qu'ils avaient accumulé. Aujourd'hui, la majorité des communes, des intercommunalités et des conseils généraux et régionaux sont équipés de réseaux, connectés à internet et utilisent de nombreuses applications métier. ' Les collectivités sont passées d'un système informatique de production qui juxtaposait la gestion comptable et financière, la gestion du personnel, l'état civil et les listes électorales, à un véritable système d'information ', note Bernard Méliet, directeur du pôle Collectivités Territoriales au cabinet Mazars.Cependant, il leur reste encore du pain sur la planche : maintenant, le grand défi que doivent relever les DSI des collectivités est d'ouvrir leur système d'information (SI) aux citoyens, aux entreprises, et à leurs partenaires (autres collectivités, administrations centrales, etc.), et entrer réellement dans l'ère de l'e-Administration. Ainsi, près de 70 % des collectivités interrogées ont, à terme, des projets de dématérialisation de leurs échanges, plus de 60 % prévoient de mettre en place des téléprocédures, 40 % réfléchissent au guichet unique. Pour cela, les DSI doivent prévoir la refonte de leur site web et fluidifier la circulation de l'information au sein de la collectivité, via des portails intranet, des outils de travail collaboratif, et décloisonner les différents logiciels métier. Les directions générales, enfin, demandent de plus en plus d'outils de pilotage et la mise en place de systèmes d'aide à la décision...Or, pour mener à bien ces chantiers, les DSI ne se trouvent pas toujours dans une situation très confortable. Dans les organigrammes, ' ils ne sont pas positionnés au niveau où ils devraient être. Le management des collectivités n'a pas encore totalement compris que le SI était un outil stratégique ', estime Bernard Méliet. En effet, si 40 % des DSI reportent directement auprès de la DG, seuls 30 % sont réellement présents au comité de direction. ' Les DSI des grandes collectivités souhaiteraient y participer, car ils sont conscients que le système d'information s'intègre dans les processus de travail et de communication de la collectivité. ' Cela les aiderait à mieux cibler les projets stratégiques, mieux organiser la cohérence du SI et des référentiels de données. Un gros travail, quand on sait que les collectivités utilisent souvent plus d'une centaine d'applications métier.Le service informatique est encore trop perçu par les fonctionnels comme une ressource, et pas comme un partenaire. ' Le problème, aujourd'hui, c'est que les utilisateurs ne voient dans le SI qu'une réponse à leur problème. Par exemple, il faut automatiser la paye. Mais, ils ne fixent pas, à la DSI, d'objectifs à atteindre en dehors de cette informatisation, comme des gains en termes de fluidité de l'information, comme un meilleur pilotage... ', regrette Bernard Méliet. Souvent, les seuls éléments d'appréciation sont alors : ' ça marche ' ou ' ça ne marche pas ', ' le budget a été (ou n'a pas été) respecté '...
La gouvernance, une voie difficile
Même si cela les oblige à une plus grande transparence, les DSI ont tout intérêt à contractualiser leurs relations avec les services utilisateurs, et mettre en place une organisation orientée client. ' L'usage d'Itil est très récent dans les collectivités. Mais, nous devons de plus en plus nous comporter comme une société de services interne ', estime David Mercier, directeur adjoint des Systèmes d'Information et des Télécommunications de la ville de Reims et de Reims métropole. Mais, contrairement à une SSII, qui ne répond qu'à une commande, la direction des SI est le garant de la cohérence des projets et de la maîtrise des évolutions stratégiques. ' Beaucoup de DSI veulent une gouvernance du système d'information afin de pouvoir développer leurs projets par rapport à des objectifs définis en concertation avec les utilisateurs ', dit Bernard Méliet. Mais encore faut-il réussir à faire adhérer les services à une culture des SI, instaurer un langage commun et, souvent, revoir l'organisation de la collectivité Actuellement, le pilotage du système d'information ne constitue pas une préoccupation pour une majorité de collectivités territoriales : seules 45 % d'entre elles ont un schéma directeur de moins de trois ans pour élaborer l'architecture de leur SI. 87 % n'utilisent pas de référentiels, et 59 % n'organisent pas de comités de pilotage, ni de comités directeurs pour fixer des axes de développement. Mais les directions générales gagnent en maturité et, bientôt, elles demanderont des comptes. Les DSI ont donc intérêt à préparer la mise en place de tableaux de bord.
Encore peu de services mutualisés
Par ailleurs, si la liste des projets s'allonge, les budgets et les recrutements sont eux sont souvent figés. ' Pour dégager des gains, nous comptons sur la mutualisation des services de l'agglomération et de la ville, l'industrialisation de nos processus, la mise en concurrence des fournisseurs, etc. ', explique David Mercier. La mutualisation des services informatiques et des infrastructures entre collectivités reste faible. Seuls 30 % d'entre elles ont signé de tels accords. Un chiffre qui stagne depuis 2005 (27 %). Pourtant, cette mutualisation, techniquement aisée, réduirait les coûts et résoudrait une partie des problèmes de recrutement : ' Mutualiser les DSI entre la ville et l'agglomération nous aide à embaucher des profils plus pointus. En effet, une DSI de 42 personnes peut se permettre de spécialiser des agents. C'est moins évident pour une DSI d'une quinzaine de collaborateurs ', note David Mercier. Une autre solution pourrait consister dans l'externalisation de certaines tâches. Cependant, les collectivités sont très frileuses. 13 % des DSI estiment pouvoir sous-traiter la gestion de leurs postes de travail et de la bureautique, mais moins de 1 % une infogérance totale du SI. Structurellement, elles préfèrent les investissements aux frais de fonctionnement, et ont peur de perdre la main sur leur SI.
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