Les nouveaux défis qui attendent Orange et Stéphane Richard

Stéphane Richard devra renforcer Orange à l'international et lutter sur le plan commercial en France, sur un marché en ébullition et en voie de consolidation.
Soutenu le 26 mars 2014 par le conseil d'administration d'Orange, Stéphane Richard a gagné une bataille symbolique. Mais, plusieurs défis majeurs l'attendront, s'il est confirmé comme PDG, le 27 mai 2014, lors de l'assemblée générale du groupe.
Dans l'immédiat, il reste encore sous l'épée de Damoclès d'une mise en examen pour "escroquerie en bande organisée" dans l'affaire Tapie.
Ensuite, son probable second mandat de 4 ans débutera dans un contexte particulièrement chahuté et imprévisible. La consolidation en cours parmi les opérateurs en Europe, la situation française avec son hyperconcurrence et la perspective d'un rapprochement entre deux acteurs majeurs, seront autant de passes délicates à traverser.
1. Affronter un marché français en voie de recomposition

Orange est un spectateur attentif et concerné par la probable consolidation du marché français des télécoms liée à la vente de SFR. Les conséquences seront toutefois assez différentes, selon le profil de l'acquéreur.
En cas de victoire de Bouygues et de cession de son réseau mobile à Free, Orange fera face à deux acteurs plus puissants qu'avant. Bouygues et SFR cumuleront 32 millions d'abonnés mobiles, devenant de fait le numéro un du marché.
Fort du réseau mobile de Bouygues Telecom, Free pourrait, de son côté, mettre un terme avant 2018, à son contrat d'itinérance avec Orange, qui rapporte à ce dernier plusieurs centaines de millions d'euros par an.
En cas de victoire de Numericable, Orange devra affronter un acteur qui investit dans les réseaux très haut débit à la fois sur la technologie d'accès fibre optique jusque chez l'abonné (FTTH), via SFR, et dans les réseaux câblés modernisés par le câblo-opérateur.
Numericable a bien l'intention de réaliser ses premières économies en diminuant la dépendance de SFR vis à vis du réseau de cuivre d'Orange, pour ses offres ADSL. Une importante perte de revenus en perspective pour l'opérateur historique.
2. Etoffer la présence de l'opérateur à l'international

Orange dépend encore largement du marché français. Il y réalise 50 % de son chiffre d'affaires total : 20 milliards d'euros sur les 40 milliards d'euros que le groupe a enregistré en 2013.
Compte tenu de la pression concurrentielle forte qui pèse sur son activité domestique (- 4,5 % du chiffre d'affaires France en 2013), l'opérateur n'a d'autre issue que de se développer à l'international pour continuer à faire croître son activité.
En Europe, l'Espagne se porte bien (+ 4,4 % de chiffre d'affaires en 2013) mais la Pologne est confrontée à des pressions fortes sur les prix des mobiles.
Orange dispose aussi de liens historiques et privilégiés avec Deutsche Telecom. Il pourrait être tenté de les étoffer. Les deux opérateurs sont alliés au Royaume-Uni dans l'opérateur mobile Everything Everywhere. Ils ont créé Buyin une filiale commune pour regrouper leurs achats. Pourraient-ils envisager de reserrer leurs liens pour participer à la consolidation du marché européen entre opérateurs ?
En dehors de l'Europe, Orange a les yeux tournés vers l'Afrique. L'opérateur a pris des positions ou s'est renforcé au Maroc, Egypte, Tunisie et République démocratique du Congo. Le potentiel démographique et économique du continent africain en feront sa prochaine cible prioritaire en termes de renforcement de ses positions.
3. Résister à la pression concurrentielle en tenant les coûts internes

La France est devenue pour Orange comme pour ses rivaux, le champ d'une guerre commerciale sans merci sur le plan des tarifs, surtout dans la téléphonie mobile.
Mais, contrairement à Free, SFR, Bouygues Telecom et Numéricable, sa structure de coûts salariaux est beaucoup plus pesante. Il ne dispose pas de la marge de manoeuvre de ses rivaux pour baisser ses prix. D'ailleurs, Orange est souvent le dernier à guerroyer sur les prix de ses offres mobiles ou fixes.
Héritier de l'ex-monopole public du téléphone fixe, Orange emploierait encore près de 90 000 personnes en France. Après leurs plans de départs volontaires, SFR et Bouygues ne totalisent environ, chacun, que 9000 salariés, tandis que Free n'en revendique que 6800 et Numericable plus de 2 200.
Pour alléger sans douleur sa masse salariale, Orange continue de parier sur les départs en retraite (non tous remplacés) de ses salariés les plus âgés, bénéficiant du statut de fonctionnaire de l'Etat.
« En 2014, nous poursuivrons notre travail sur notre base de coûts en restant attentifs à la qualité du dialogue social dans l’entreprise » avait commenté Stéphane Richard, lors de la présentation des résultats 2013 d'Orange. Une subtile et fragile équation à respecter...
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- Stéphane Richard conforté à la tête d'Orange, comme prévu (publié le 26 mars 2014)