Les petites SSII n'échappent pas à la consolidation
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Envie de grandir, de se spécialiser ou d'être mieux référencées auprès des grands comptes... En 2006, une vague de rachats a touché les PME du service.
C'est de nouveau l'effervescence sur le marché des services informatiques. Les acquéreurs potentiels se sentent pousser des ailes. Eux qui, il y a deux ans, avaient tendance à réfréner leurs ardeurs. Le nombre de fusions et
acquisitions a nettement progressé en 2006. Selon le cabinet Active Portfolio Management (APM), 67 SSII hexagonales ont changé de mains entre janvier et la fin novembre 2006, contre 52 sur l'ensemble de 2005, et seulement 35 en 2004.' L'année 2005 avait déjà auguré une forte croissance du nombre de fusions-acquisitions. Mais 2006 a confirmé l'explosion que l'on prévoyait ', affirme Pierre-Yves Dargaud, président
d'APM. Peut-être le terme explosion est-il exagéré. Toujours est-il que les négociations vont aujourd'hui bon train entre vendeurs et acquéreurs.
Des SSII généralistes de taille moyenne offensives
Cependant, contrairement à une idée reçue, on n'observe guère de mouvements spectaculaires sur le marché des services informatiques. Tout juste assiste-t-on à un gros rachat de dimension nationale ou européenne tous les deux ou trois
ans. Ainsi celui d'Unilog par LogicaCMG en 2005, ou celui de Sema par Atos Origin en 2003. Les mouvements les plus fréquents concernent des acteurs de petite ?" voire de très petite ?" taille.Cette année, près de la moitié des SSII reprises ont généré un chiffre d'affaires annuel inférieur à 4 millions d'euros. Ces entreprises en sont, en général, à un stade critique de leur développement. ' Une
société de 30 à 40 personnes - générant environ 3 à 4 millions d'euros de revenus ?" doit se restructurer pour atteindre la taille supérieure. Ses dirigeants hésitent alors à franchir le pas. Certains dans cette situation préfèrent
vendre ', décrit Pierre-Yves Dargaud.Autre typologie de société susceptible d'être phagocytée : la SSII spécialisée qui emploie entre 100 et 150 salariés. ' C'est la proie favorite des SSII généralistes de taille moyenne, qui doivent
s'adapter à la logique des référencements mise en place par les services achats des grands comptes ', juge Pierre-Yves Dargaud. Ce sont d'ailleurs ces sociétés de taille moyenne qui pèsent le plus sur le marché des
fusions-acquisitions en termes de capital transféré. ' Toute SSII généraliste de 500 à 1 000 salariés se pose la question de racheter ou d'être consolidée. Sans exception ',, affirme David
Salabi, directeur associé de Financière Cambon, cabinet de conseil en fusions-acquisitions de PME.Entre les grandes SSII nationales employant des milliers d'ingénieurs et leurs poursuivants, un fossé s'est creusé. Au sein de cet espace vierge, des opportunités existent pour des sociétés généralistes de taille moyenne
?" nombreuses sur le marché hexagonal ?" souhaitant atteindre la taille critique afin de coucher leur nom sur les matrices tarifaires des services achats.' En général, les grands comptes conservent une vingtaine de sociétés de services de référence. Derrière les six ou sept grandes SSII nationales, il y a des places à prendre ', confirme
David Salabi. Dès lors, la recrudescence des mouvements de consolidation observée en 2006 découlerait en partie de ce phénomène structurel. De nombreuses SSII cherchent à gonfler leur taille ou à se spécialiser sur des niches
technologiques.
Les résultats rassurent les investisseurs
Non négligeable, la dimension économique explique également cette augmentation des acquisitions. Le regain de confiance pousse les sociétés à prendre davantage de risques en matière de croissance externe. L'achat des uns répond au
rachat des autres, et le panurgisme reste ainsi la principale règle en vigueur.' Nous sommes dans un monde de moutons et de suiveurs, relève Pierre-Yves Dargaud. Les dirigeants de SSII n'échappent pas à la règle. ' Résultat : les sociétés
de services tendent à acheter davantage en période d'embellie économique, alors que la logique voudrait qu'elles fassent leur marché dans des périodes difficiles. Cette confiance et le désir d'émancipation des SSII ajoutés à la bonne volonté des
investisseurs composent un cocktail savoureux.Les investisseurs font, en effet, un retour remarqué sur le marché des services informatiques, redevenu - avec une croissance de 6 à 8 % par an - attrayant à leurs yeux. ' Le système bancaire est revenu sur
le secteur. La belle visibilité à moyen terme incite à financer les SSII désireuses d'opérer des rachats, observe David Salabi. L'acquisition de Projipe par Aubay a ainsi été financée en partie par emprunt. Ce que l'on n'avait
pas observé depuis longtemps. ' Après les sur-valorisations des années 1998-2001, puis la crise qui a suivi, l'industrie des services informatiques semble baigner dans des eaux plus calmes. L'assise financière des SSII s'est
affermie, leur capitalisation boursière a retrouvé un niveau convenable, sans être excessif, et elles génèrent du cash-flow. Autant de facteurs qui sécurisent les investisseurs.De fait, les fonds d'investissements pointent de nouveau le bout de leur nez, et se lancent dans quelques opérations. ' Le marché du capital-investissement est désormais structuré. Il a appris à se familiariser
avec les technologies ', juge David Salabi. Ainsi l'acquisition de Datem par le groupe Team Partners a-t-elle été financée pour une moitié par l'entrée du fonds Weinberg Capital Partners en tant qu'actionnaire de la SSII
acquéreur.Conscients de la structure du marché et de l'écart entre les SSII nationales et leurs poursuivants, ' certains fonds se sont aperçus qu'il y avait de la place pour monter de grosses SSII par build
up ', poursuit le directeur associé. Certaines sociétés se montent ainsi de toutes pièces, à grand renfort de croissance externe. C'est le cas d'Adelior, reprise par la société de services GFI en fin 2005.
De nouveaux profils d'acquéreurs émergent
Plus original, l'attelage entrepreneur et fonds d'investissement fait son apparition. Exemple emblématique : Alyotech. Cette société de conseil en innovation gérée par Carlos Bedran, ex-président de la société de conseil en
R&D Brime Technologies, est régie par un holding industriel, lui-même détenu par des fonds (BTIC Investissement, Aurel Nexstage, Galileo, Ace Management, et CB Partners).Alyotech s'est ainsi offert cette année la société Cril Technology, le groupe Quartz Data, ou encore la canadienne OSI. Les opérateurs, quant à eux, font leur retour sur le devant de la scène. Et notamment France Télécom, qui a
réalisé trois acquisitions depuis l'été dernier. Les sociétés de services indiennes désireuses de s'implanter sur le marché français pourraient aussi, à moyen terme, devenir des acheteurs crédibles.Enfin, un dernier facteur ?" plus secondaire ?" participe à cette accélération de la consolidation : l'âge du capitaine. Certaines ventes sont consécutives au départ à la retraite du dirigeant-fondateur de la
SSII. ' Entre 10 et 15 % des sociétés sont concernées par ce phénomène ', estime Pierre-Yves Dargaud. Certains acquéreurs profitent ainsi des conséquences du
' papy-boom ' chez les dirigeants de sociétés de services pour faire leurs emplettes.