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L'échange d'informations entre les salariés aide à améliorer la performance des entreprises, tant à court qu'à moyen terme. Ajouter une dimension transversale à un système d'information ne peut se faire sans une profonde transformation des méthodes de management.
Les réseaux sociaux professionnels manquent encore de maturité
L'engouement massif pour le web 2.0 grand public, qui enrôle les internautes par centaines de millions, fascine. D'autant que les grands réseaux sociaux comme Linkedin, Twitter et Facebook, s'immiscent dans la sphère professionnelle, qu'ils y soient invités ou non. Or le dynamisme de ces lignes de force transversales qui relient l'ensemble des membres de ces réseaux vient heurter la rigidité des structures verticales des entreprises. En structurant les organisations, l'informatique a également érigé des silos informationnels dont l'étanchéité fait l'unanimité contre eux. Le social computing, concrétisé par les réseaux sociaux d'entreprise (RSE), se propose de les combattre en facilitant la collaboration. Le prochain gisement à exploiter pour améliorer les performances de l'entreprise se trouve de fait dans “ l'intelligence collective ” produite par les salariés, et moins dans l'optimisation de processus, presque tous déjà optimisés. Les RSE n'en sont cependant qu'au tout début de leur exploitation en entreprise.Le cabinet d'études Gartner estime ainsi le chiffre d'affaires mondial du logiciel social d'entreprise à 770 millions de dollars en 2011. Même si ce chiffre résulte d'une croissance de 15 % par rapport à 2010, sa valeur absolue reste donc négligeable à l'échelle d'un marché mondial. Ce qui n'empêche pas Gartner de placer le social computing parmi les quatre tendances majeures qui transformeront l'informatique dans les dix ans à venir, juste derrière l'informatique en nuage. Gartner prédit ainsi que, d'ici à trois ans, les services de réseaux sociaux auront remplacé le courrier électronique comme vecteur principal de communication pour 20 % des utilisateurs professionnels.Emblématiques de cette transformation, les RSE ne s'invitent cependant pas si facilement en entreprise. Car à première vue, ils s'opposent à la fois à l'armature des systèmes d'information et à l'organisation hiérarchique des organisations. La tâche est donc ardue, mais ses partisans considèrent que cette opposition doit être dépassée pour le plus grand bien des sociétés.
Quelques grands comptes déjà convaincus
Cette année, rares sont les grands groupes français qui ne planchent pas sur un projet de réseau social interne. Les problématiques qui poussent à l'ajout d'une couche sociale dans le système d'information les concernent au premier chef. Le gigantisme de leurs organisations, leur dispersion géographique et culturelle, leurs méthodes de croissance externe se traduisent souvent par un manque de cohésion. A cela, s'ajoute le besoin de conserver et de diffuser les compétences à grande échelle. Chaque projet de réseau social tient compte du contexte particulier dans lequel il s'inscrit et vise des objectifs spécifiques.Certains s'adressent à un vaste ensemble des salariés ? comme à France Télécom, où Plazza cherche à renforcer les liens entre les salariés ?, d'autres se limitent à une partie d'entre eux dans une perspective bien précise : ainsi, à la Société générale, Sharing a été mis en place pour susciter des synergies transversales entre les services RH des différentes filiales.
Entretenir un sentiment d'appartenance
Dans le premier choix, celui fait par France Télécom, Ziryeb Marouf, responsable RH 2.0, insiste sur l'importance cruciale du sentiment d'appartenance. Activé fin 2010, le réseau interne Plazza peut déjà relier plus de 60 % des salariés du groupe ; 900 communautés ont vu le jour et 80 000 personnes se sont inscrites sur la base du volontariat. “ C'est nettement plus que les 10 % d'adhésion espérés au bout d'un an. ” Proposé en quatre langues (français, anglais, espagnol et polonais), Plazza poursuit deux objectifs : “ Permettre de mieux se connaître les uns les autres et favoriser les communautés d'intérêt général qui se créent à l'initiative de salariés. ” Ce déploiement est activement soutenu par la direction de France Télécom, dont les salariés sont engagés dans une profonde et complexe révolution culturelle et sociale. Pour l'instant, il n'est pas question d'attribuer au RSE un rôle opérationnel direct. L'outil reste à l'écart des processus et des applications métier de l'entreprise.A la Société générale, Franck La Pinta, qui porte l'intéressante double casquette de responsable marketing web et RH 2.0, a, lui, axé Sharing dans une perspective fonctionnelle directe. Banque franco-française il y a moins de dix ans, le groupe compte désormais 60 % de ses 157 000 salariés hors de l'Hexagone. Né d'un besoin évident d'intégration d'établissements d'origine disparate et de la volonté d'instaurer un esprit de collaboration et d'échange entre eux, ce réseau social interne s'adresse aux 2 800 salariés du groupe attachés à la gestion des ressources humaines (GRH). En un an, 1 800 d'entre eux se sont inscrits dans des communautés prédéfinies axées sur les métiers (recrutement, formation et paie) et sur le programme d'intégration des collaborateurs. Leurs échanges, avec pour langue véhiculaire l'anglais, portent sur le partage d'informations et la création en commun de documents. “ Sharing fait évoluer la culture d'entreprise vers la prise de parole. Nous aidons en douceur nos salariés à intégrer une mentalité 2.0. ” Comme chez France Télécom, le volontariat est la règle, mais la Société générale a clairement inscrit Sharing dans la panoplie des outils mis à disposition de la GRH. Son déploiement a d'ores et déjà permis d'accélérer la gestion de certains projets, comme le kit d'intégration proposé aux nouveaux collaborateurs.
Vers des RSE intégrés au système d'information
Ces deux expériences confirment que les RSE ont un rôle à jouer dans les entreprises, mais le pas qui reste à franchir pour en faire une composante à part entière du système d'information est immense. Jusque-là contourné, le principal écueil reste celui de l'adaptation des rapports hiérarchiques. Donner voix au chapitre aux salariés qui tous, détiennent une part d'expertise, réclame non seulement une adhésion au plus haut de la hiérarchie mais aussi un changement dans les méthodes managériales au quotidien. Les dix ans prédits par Gartner suffiront-ils pour mener cette tâche à bien ?
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