Les retombées économiques de l'open data viendront de la société civile, assure Gilles Babinet

Selon le président du Conseil national du numérique, c'est à partir d'une démarche citoyenne que fleurira l'écosystème économique de la libération des données publiques.
Une des causes de dysfonctionnement de notre pays tient au manque d’interpénétration de l’Etat et des citoyens. L’open data devrait en partie résoudre ce problème. » Pour Gilles Babinet, président du CNNum (Conseil national du numérique), la libération des données publiques n’a de sens que si ces données sont d’abord prises en main par la société civile : associations, universités et plus généralement citoyens. Cette appropriation génèrera les fameuses retombées économiques de l’open data, tant espérées et toujours attendues.
Pour une meilleure performance des acteurs économiques

En fait, plus que la commercialisation de nouveaux services ou l’émergence de jeunes pousses, l’exploitation de l’open data par la société civile pourrait induire une meilleure performance des acteurs économiques. « Si les citoyens disposent, par exemple, de la performance des hôpitaux acte par acte, les établissements de santé pourraient être incités à se renforcer dans les actes où ils sont les moins bons », avance-t-il.
Seulement voilà, nombre de données sociétales restent encore peu accessibles. Certes, Gilles Babinet en convient, les récentes initiatives comme le lancement de data.gouv.fr et plus récemment de dataconnexions, son écosystème économique, vont dans le bon sens. « Mais nous aimerions disposer de données sur le logement social, la performance scolaire, les coûts d’actes médicaux ou encore le fonctionnement de la justice. Elles manquent aujourd’hui. »
Une histoire de religion
Ce manque de transparence est culturel, selon Gilles Babinet. Pour l’expliquer, le président du CNNum ose une analogie (avec cependant un certain détachement ) en rapprochant open data et religion. « Les pays latins ont toujours été ancrés dans une culture hermétiste, explique-t-il. La religion catholique considérait en effet que le sacré devait être caché, à l’instar de la messe, initialement en latin. Un moyen de sacraliser le rapport au divin. Tout cela a été bouleversé avec la Réforme et Luther, qui a créé une société de la transparence. Il a ainsi fait émerger une société civile, certes individualiste, mais très active. » Et aujourd’hui, insiste-t-il, ce sont le pays de la Réforme (hors Allemagne) qui pratiquent l’open data le plus transparent : Angleterre, Danemark, Nouvelle-Zélande, Australie et, dans une moindre mesure, Etats-Unis. Dans ce contexte, l’open data est un pas supplémentaire vers le concept anglo-saxon de « big society », lequel veut que les citoyens deviennent des acteurs dominants dans une société où l’Etat et les entreprises le sont de moins en moins.
Un fonds spécial pour initier le mouvement
Comment, dès lors, booster l’open data en France, et lever cette opacité ? Principalement en stimulant la demande citoyenne. Le président du CNNum milite ainsi pour la création d’un fonds d’aide au développement d’applications et d’outils pour exploiter les données. « Ce fonds d’usage aiderait ainsi à initier le mouvement. D’autant que les associations et les particuliers n’auront parfois besoin que de quelques milliers d’euros pour bâtir leurs applications. »
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