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En dépit d'offres matures, les éditeurs de solutions spécifiques peinent à s'imposer en France. Leur réactivité plus faible que celle d'une équipe de développeurs en interne rebute.
La vague du progiciel touche toutes les solutions d'entreprise ?" des outils de gestion aux applications web ?", les solutions de gestion de contenu... et les plates-formes d'e-commerce. Pourtant, bien peu de
cybermarchands s'appuient sur ces offres packagées. Les grands sites d'e-commerce préfèrent disposer de leurs propres développeurs et bénéficier ainsi d'une grande souplesse dans le choix des développements et d'une grande réactivité par rapport à
leurs concurrents.Les sites les plus modestes, eux, ont plébiscité les offres Saas. Oxatis, Powerboutique, Cybershop, et quelques autres se partagent ce marché. Les éditeurs de plates-formes ciblent plus haut, les entreprises pouvant investir de
100 000 à plusieurs centaines de milliers d'euros. Un positionnement difficile à tenir lorsqu'on regarde le classement des plus grands sites français. Ceux qui ont fait le choix d'une solution d'éditeur représentent l'exception, comme le
déplore Jean-Claude Noguès, directeur associé de Data Solution et partenaire d'Intershop en France : ' Nous, ce que nous proposons c'est une approche industrialisée. En Allemagne, six des dix plus gros sites d'e-commerce
fonctionnent avec Intershop. Alors qu'en France il y a une vraie culture SSII, et chacun croit pouvoir faire mieux que son voisin. ' Stéphane Berger, directeur du conseil en nouvelles technologies chez Sopra, confirme cette
singularité française : ' Il y a une véritable culture du spécifique en France. Par exemple, Microsoft Commerce Server a été très largement intégré au Royaume-Uni et très difficilement dans
l'Hexagone. 'L'industrialisation défendue par les éditeurs trouve écho auprès des grands comptes. Intershop a été retenu par Saint-Gobain et Pechiney, et son concurrent Broadvision revendique une vingtaine de clients en France. Fahem Ben Messaoud,
directeur commercial pour l'Europe du Sud, le Moyen-Orient et l'Afrique de Broadvision souligne néanmoins que le positionnement de l'éditeur a évolué : ' On est passé de plusieurs millions d'euros en 2000 pour un grand
projet à quelques centaines de milliers d'euros aujourd'hui. Notre tarification actuelle n'a plus rien à voir avec celle de l'époque. ' Alexandre Delbarre, ingénieur d'affaires e-business chez Business&Décision, explique
cette situation : ' La question du coût de ces plates-formes est cruciale, c'est vrai, mais il ne faut pas négliger celle des spécificités des projets de nos clients. ' Intégrateur des solutions
Intershop et Microsoft Commerce Server, Business&Décision a réalisé ses plus gros projets en développements spécifiques. ' Pour un besoin classique, les solutions des éditeurs sont pertinentes, mais dès qu'il s'agit d'un
projet complexe, on s'oriente vers du spécifique ', ajoute Alexandre Delbarre.Castorama, avec ses deux millions de visites par mois et ses 30 000 références en ligne, fait partie des quelques grands sites français ayant fait le choix d'une plate-forme d'éditeur : ATG Dynamo. Ce choix, Jean-François
Kleinpoort, directeur du e-commerce de Castorama, l'explique par des raisons stratégiques : ' Il s'agissait d'un choix opéré par le groupe Kingfisher. Nous souhaitions aller très vite et c'est tout l'avantage d'une
solution intégrée prépackagée. '
Les plates-formes sur mesure privilégiées
Ce choix est une exception, la quasi-totalité des grands sites d'e-commerce français ont internalisé leurs équipes de développement. C'est le cas de Cdiscount, site dont Frédéric Chauvat assure la direction de l'informatique :
' Nous avons lancé la première version de Cdiscount en 1998, développée en trois semaines en technologie Microsoft ASP. A cette époque, Java arrivait tout juste et Microsoft Commerce Server n'était qu'une boîte à outils. Avec
les offres commerciales, il est très difficile de tester la capacité de l'outil à tenir la charge : une architecture peut en être capable pour 5 000 ou 10 000 visites par jour, mais pas pour un million de
visiteurs/jour. 'La stratégie est similaire chez Fotovista, société qui édite le site Pixmania. Laurent Pierre, directeur de production IT de Fotovista, fait le même constat de pauvreté de l'offre en 2000, lors du démarrage du site. Mais, il souligne
également la perte de réactivité qu'entraîne le choix d'une solution packagée : ' Avec un éditeur, on se serait retrouvé dans des cycles de développement longs avec des versions majeures tous les six mois seulement,
impliquant du consulting lourd pour intégrer la solution. Du point de vue stratégique, cela signifie qu'on devient tributaire d'un prestataire sur notre c?"ur de métier. ' Ces développements maison qui rivalisent désormais
avec les offres des éditeurs... et se posent maintenant en concurrence directe avec elles ! Ainsi, c'est Fotovista qui a réalisé la boutique en ligne de Bouygues Telecom, un appel d'offres emporté au nez et à la barbe des éditeurs.Outre des montées en charge beaucoup plus sévères qu'en environnement d'entreprise, les cybermarchands réclament des plates-formes avec une grande richesse fonctionnelle pour leur permettre de se distinguer sur le marché. Stéphane
Berger, directeur du conseil en nouvelles technologies chez Sopra, croit à un retour au premier plan des offres d'éditeurs dans l'e-commerce : ' Commerce Server et IBM Websphere Commerce montent en gamme et sont désormais
capables de répondre aux attentes de 80 % du marché. ' Cette montée en flèche de la complexité qui, a priori, joue en faveur des offres d'éditeurs (qu'elles soient en mode Saas ou en vente de licence) du fait de la
mutualisation des développements, au détriment des développements spécifiques.A cette montée en puissance, les SSII et les agences web ont déjà répondu par la création de frameworks maison en capitalisant sur leurs développements antérieurs, mais aussi en ayant recours à des briques logicielles open source. OS
Commerce, avec près de 13 000 sites enregistrés, est certainement la solution la plus utilisée dans le monde, même si son aura a du mal à franchir le cercle des PME.
Les grands du logiciel cherchent encore leur voie
Si, formellement, Oracle est en mesure de répondre à un appel d'offres pour un site marchand grâce aux solutions issues de Siebel, il peine à trouver, tout comme SAP, une légitimité sur ce marché en dehors de sa base installée. IBM,
pionnier du e-business et présent très tôt sur ce marché avec Net. Commerce, et aujourd'hui Websphere Commerce, y enregistre des résultats décevants en France. L'Américain revendique 1 500 clients dans le monde... mais pas plus d'une
dizaine en France. Jean-Michel Glaudeix, spécialiste Websphere, défend l'offre d'IBM : ' Websphere Commerce présente deux gros avantages. D'une part, c'est une offre centrée sur les lignes métier avec des interfaces de
gestion et, d'autre part, une solution Websphere robuste et capable de monter en charge. Un client qui choisit Websphere Commerce va pouvoir croître et rester maître d'une plate-forme qui va monter de 10 commandes/jour à 100, puis 1 000 et
au-delà. 'IBM est devancé par Microsoft, lequel, par son positionnement midmarket, parvient à tirer son épingle du jeu. Eric Ortiz, chef de produit chez Microsoft remarque : ' La France aime le spécifique et a une
forte population de développeurs, ce qui ne nous a pas empêchés de décrocher énormément de contrats, notamment l'an dernier. SQLI a ainsi implémenté la boutique SFR construite sur Commerce Server avec un frontal Flash. '
L'éditeur annonce 11 000 sites marchands fonctionnant dans le monde. En France, Marionnaud, Cegos, Okaidi, Norauto, ainsi que Mistergooddeal et Surcouf ont choisi sa solution. La commercialisation de la version 2007 de Commerce Server a
redynamisé l'Américain qui a dévoilé la ' feuille de route ' de Commerce Server jusqu'à l'horizon 2010. Surfant sur la vague Web 2.0, Microsoft va miser sur les synergies de son offre avec sa solution
RIA Silverlight, comme l'éditeur vient de le démontrer avec le lancement du site de Quicksilver.
Le web 2.0 redistributeura-t-il les cartes ?
Stéphane Berger, directeur du conseil en nouvelles technologies chez Sopra, souligne le dynamisme retrouvé du secteur e-commerce français : ' Il y a les projets de nouveaux sites en France mais aussi les
projets de renouvellement. Par exemple, les sites dans la grande distribution sont aujourd'hui peu différenciés. Nous travaillons pour eux sur la virtualisation de l'espace de vente sur de nouvelles expériences utilisateurs, ce qui va nécessairement
entraîner un renouvellement des plates-formes. ' Les éditeurs spécialisés pourraient profiter de cette nouvelle vague, à l'image de Broadvision. La Poste vient de retenir sa solution sur son appel d'offres de boutique en
ligne. L'éditeur espère faire prochainement son apparition dans le hit-parade des plus gros sites de commerce électronique français : ' Nous avons en ce moment même des discussions avec l'un des sites du top 10 français
qui pourrait remplacer ses développements spécifiques par notre plate-forme ', conclut Fahem Ben Messaoud de Broadvision.
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