Les TIC, chasse gardée de l'État français
Une enquête fouillée sur les secrets de la Ve République décrit la captation progressive par l'Etat des innovations technologiques.
Téléphone, Minitel, internet... En France, l'usage est de vanter les technologies de l'information. Mais derrière la version officielle, ce livre dévoile avec intérêt la manière dont furent menées au sommet de l'Etat les tractations aboutissant à ces chantiers industriels. Riche d'une masse de références documentaires, très structurée et parfaitement actualisée, cette fresque signée par sept auteurs devrait faire date. De la Seconde Guerre mondiale jusqu'aux premiers mois de 2006, l'ouvrage détricote les années où l'appareil étatique s'est étroitement mêlé aux acteurs industriels nationaux.Ainsi, en 1960, moins de sept foyers français sur cent sont raccordés au téléphone ?" soit moitié moins qu'en Grande-Bretagne. Selon les experts de l'époque, à investissements constants, il faudrait attendre 2030 pour rejoindre le taux d'équipement de la Suède. Les auteurs racontent comment, en 1969, la CGE et Thomson ont signé un Yalta de l'électronique, des télécommunications et de l'informatique pour s'arroger les subsides de l'Etat. Ils détaillent ensuite la façon dont Gérard Théry, un proche de Giscard d'Estaing, lancera en 1975 un plan de rattrapage pour moderniser à marche forcée les infrastructures de télécommunications. Et comment l'alternance de 1981 a suscité la fin de cette dynamique, le retour à la culture du filaire et l'avènement du plan Câble ?" un futur fiasco économique. Ou encore la révélation, en 1974, de lexistence du programme informatique Safari. Mené par la préfecture de police de Paris, ce projet visait à croiser la consultation des fichiers maison : permis de conduire, personnes recherchées, fiches de la police judiciaire et des renseignements généraux... Un scandale qui entraînera, en 1978, la création de la Cnil.