Microsoft, les entreprises françaises et le Big Data

Pluie d'annonces et témoignages clients. Microsoft mise aussi sur le Big Data. Certaines entreprises témoignent d'un usage avancé de leurs données.
« Depuis 2010, il y a deux fois plus de données stockées sous forme numérique sur terre que de litres d'eau salées dans l'ensemble des océans », lançait Bernard Ourghanlian, directeur technique et sécurité de Microsoft lors d’un événement dédié au Big Data à Paris cette semaine.
Et entreprises et chercheurs sont en train d’apprendre à exploiter cette masse de données, en grande partie non structurées, qu’ils récupèrent des réseaux sociaux, de capteurs, ou de n’importe quelle autre source.
« Grâce au Big Data, nous avons la capacité de trouver des corrélations entre tout un tas de phénomènes ce qui ne signifie pas qu’on peut en induire les causes » explique Bernard Ourghanlian.
Autrement dit, il est inutile de comprendre pourquoi en influençant certaines données d’une entreprise l’on provoque une augmentation des ventes pour le faire et s’en réjouir.
Si la stratégie de Microsoft tient en une phrase « Cloud First, mobile first », l’éditeur ne néglige pas pour autant le Big Data. En trois mois, Microsoft a réalisé cinq annonces dans le secteur du Big Data.
D’abord, Power BI, l’outil de Business intelligence intégré au sein d’Excel et d’Office 365. Ensuite, SQL server 2014, lancé il y a un mois en présence du patron de l’éditeur, Satya Nadella. L’occasion pour ce dernier d’exposer sa vision de la donnée en entreprise.
Au niveau Hadoop, Microsoft a aussi annoncé l’intégration à Azure de la dernière version du Framework Big Data le plus utilisé et a ainsi réalisé sa plus grosse contribution au projet Open Source. Et l’outil APS (Analytics plateform system) réalise la fusion entre Hadoop et SQL. Enfin, le 15 avril, Microsoft annoncé la beta de la plateforme Azure intelligent system service orienté internet des objets.
Les fonctions centrales et de support en première ligne du Big Data

Si les outils sont de plus en plus nombreux, tout comme les données, la majorité des entreprises françaises se limitent encore à des usages standards selon une étude IDC commandée par Microsoft sur la valorisation du Big Data.
« Elles font de l’analytique sur des données de comptabilité ou de finance pour prendre des décisions » explique Sébastien Lamour, manager conseil pour IDC.
Les entreprises ayant une approche plus avancée sont capables de collecter différents types de données (réseaux sociaux, capteurs, systèmes embarqués), d’utiliser de nouveaux outils et de nouvelles méthodes (pour croiser de données et faire de l’analyse prédictive) et de diffuser au bon moment, voire en temps réel, la connaissance produite à de nombreux collaborateurs internes et externes à l’entreprise.

Selon IDC, les entreprises les plus avancées devraient (bien sûr) dans les prochaines années engranger beaucoup plus de bénéfices que les autres mais pas nécessairement là où on l’attend.
Les processus orientés clients (support, acquisition, etc) seraient ceux qui apporteront le moins de bénéfices à l’entreprise dans les quatre prochaines années. Les fonctions centrales et de support comme les ressources humaines et la finance, seraient au contraire les meilleures élèves, suivies de près par les processus opérationnels qui vont de la logistique à la gestion du risque en passant par la maintenance des usines et des équipements.
Autre surprise, le secteur d’activité qui pourrait capter le plus de bénéfices est le secteur industriel en améliorant la chaîne de production pour éviter les coupures par exemple. Puis, viennent les secteurs de la finance, des télécommunications et des médias.
La nécessaire évangélisation des équipes voire des clients
Au final, IDC prédit que dans les quatre prochaines années, les entreprises ayant un usage avancé de leurs données pourraient récolter 54 milliards d’euros en plus que celles ayant un usage standard. Si les bénéfices peuvent être énormes, se lancer vraiment dans le Big Data n’est pas neutre pour une entreprise quel que soit son profil (startup ou grande entreprise).
« Il y a deux ans nous avons recruté un analytic manager qui a imposé la culture de la donnée dans l’entreprise et à évangéliser les équipes en interne », raconte ainsi Alexis de Charentenay, director of business development de la startup Adictiz spécialisée dans les jeux sur Facebook et sur mobile, éditeur notamment de Paf le chien.
Et la tâche n’est pas simple. « Il faut faire comprendre à des collaborateurs plutôt créatifs que la donnée ne ment pas…», ajoute Alexis de Charentenay. A l’aide du Big Data, Adictiz cherche à améliorer l’acquisition de joueurs rentable, la viralité pour aller chercher de nouveaux joueurs et la rétention des joueurs.
« Avec 4 millions d’utilisateurs actifs par mois, nous devons traiter de gros volumes de données pour freiner certains type de joueurs à certains niveau et en accélérer d’autres. L’objectif est de trouver les zones de frustration qui poussent les gens à passer à l’acte d’achat » raconte Alexis de Charentenay.
Chez Cofely, les données servent à évaluer la performance énergétique des bâtiments
Même son de cloche chez Cofely Services du groupe GDF Suez. « Il y a deux ans quand j’ai créé l’activité, il était difficile de dire que nous allions mettre des données à disposition des clients en toute transparence » se souvient Thierry Bouzigues, directeur de Vertuoz de Cofely services.
Il a fallu évangéliser pour expliquer qu’il s’agissait d’apporter un nouveau service au client en valorisant avec lui ses actifs. L’outil Vertuoz, basé sur Microsoft Sql server et Sharepoint, aide les gestionnaires de patrimoine immobilier à avoir une vision et à optimiser l’efficacité énergétique de leur bâtiment qu’il soit public comme une école ou une mairie ou privé comme une entreprise.
Dans le cas de Cofely, même les clients ont parfois rechigné à donner leurs données. « Il faut réaliser un travail d’évangélisation, expliquer que les données ne sont pas utilisées pour faire du ciblage commercial, et qu’elles sont anonymisées quand c’est nécessaire » explique Vincent Bryant, responsable du Big Data chez Cofely.
De fait, les données sont notamment utilisées pour réaliser des benchmark et aider les entreprises à comparer la performance énergétique de leur bâtiment par rapport à des bâtiments similaires. Les données sont collectées soit manuellement, soit via des factures ou par télé-relevés de compteurs et sont parfois croisées avec des données extérieures de météorologie ou issues de l’INSEE.
Elles servent pour l’instant uniquement à réaliser des corrélations entre la consommation électrique et les caractéristiques d’un bâtiment. « Mais, nous pourrions imaginer de nouveaux services sur des champs d’activité où nous ne sommes pas encore » anticipe Thierry Bouzygues. Avec un système d’acquisition en temps réel de données, des alertes pourraient par exemple être mise en place lorsqu’un occupant d’un appartement change de comportement par exemple dans son utilisation de l'eau.