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Au-delà de la promesse d'une réduction de coûts, le royaume chérifien séduit les entreprises françaises par le bon niveau des compétences local et par les divers dispositifs d'incitation mis en place.
Bien sûr, il y a le soleil, les plages et la qualité de vie. Il y a aussi la proximité linguistique et géographique (trois heures de vol depuis Paris). Sans oublier une espérance de réduction des coûts de 30 à 40 %… Mais d'autres raisons ont fait du Maroc la première destination du nearshore francophone. Comme le niveau des compétences local ou le cadre juridique. La preuve par l'exemple à travers le retour d'expérience de trois pionniers.
Axa : une plate-forme d'appels à large couverture horaire
“ Bonjour, je m'appelle Fatima, de Rabat. ” Pas de francisation des noms au centre de services d'Axa à Rabat Technopolis. Les 800 employés du site se présentent sous leur vraie identité, ce qui n'est malheureusement pas le cas chez certains acteurs installés dans les pays du Maghreb. Pour l'assureur, présent dans le royaume chérifien depuis 2004, il ne s'agit d'ailleurs pas d'offshore. “ Vous êtes ici dans une succursale qui emploie des salariés d'Axa, déclare d'emblée François Clin, directeur général d'Axa Services Maroc. Elle vient en appoint des centres de services de Toulouse ou de Bordeaux. Les partenaires sociaux et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ont, bien sûr, été prévenus de sa création. Elle n'a pas conduit à des suppressions de postes en France. ”Organisé en centre d'appels, le site de Rabat fait de la vente, de l'aide à la vente et de la gestion de sinistres dans les métiers de l'épargne, de l'assurance vie et de la santé. Au-delà de la réduction de coûts, l'implantation au Maroc permet une plus large amplitude horaire, met en avant François Clin. Avec un temps de travail hebdomadaire de 42 à 44 heures, le centre fonctionne de 8 h 30 à 20 heures en semaine et de 9 à 16 heures le samedi. Un plus quand il s'agit de répondre aux appels d'automobilistes victimes d'un accident…En fonction de la disponibilité et des compétences des opérateurs, le système téléphonique route les appels vers la France ou le Maroc. Le centre emploie 70 % de femmes, “ y compris dans l'encadrement ”, précise François Clin, de niveau bac + 2 à + 4, pour un salaire de départ de 500 à 600 euros. Les recrues suivent entre trois et six semaines de formation dispensée par des collaborateurs locaux ou des Français détachés. Si le centre emploie une dizaine d'expatriés, le management est avant tout local. Ainsi, chef du plateau dévolu à la gestion des sinistres, Nabil est un ingénieur informaticien reconverti.Reliés au système d'information d'Axa, les salariés utilisent les mêmes outils et partagent les mêmes données que l'ensemble du groupe. “ Nous connaissons le patrimoine, voire la santé, de nos assurés, rappelle François Clin. Ils nous livrent ces informations en toute confiance. Et ils ont raison. Car il n'est pas question de brader la sécurisation de ces données. C'est aussi pourquoi nous avons créé cette succursale sans passer par des tiers. ”Pour transférer les données personnelles hors de l'Union européenne, Axa a dû procéder à 25 déclarations préalables auprès de la Cnil. Pour éviter cette “ complication ”, le royaume s'est doté d'une loi informatique et libertés l'an dernier et d'une commission sur le modèle de la Cnil fin août. Une fois que le pays aura bénéficié du statut dit d'adéquation de la Commission européenne, les entreprises françaises n'auront plus à faire de démarches auprès de la Cnil : la loi marocaine prendra le relais.
BNP Paribas : un centre captif associé à un site prestataire
BNP Paribas est doublement présent à Casablanca. La banque dispose de son propre centre captif, BNP Paribas Méditerranée IT, une filiale du groupe qui assure le développement et la maintenance applicative. BNP Paribas est aussi le premier client du centre de GFI basé à Casanearshore. Acteur spécialisé dans le développement et la tierce maintenance applicative (TMA) dans les environnements Java, C++ ou mainframe, GFI compte 130 personnes sur son site. Cinquante d'entre elles travaillent pour la banque française, un effectif appelé à doubler à terme.La répartition des travaux se fait selon le niveau de spécification fonctionnelle. Si cette tâche préparatoire est déjà réalisée, BNP Paribas recourt directement à son centre captif. A défaut, c'est le centre de services GFI de Lille ? 130 collaborateurs s'y consacrent à la banque ?, en proximité directe avec le client, qui prépare les spécifications fonctionnelles avant que le centre marocain ne prenne le relais. “ C'est le concept one team, explique Christophe Chauvin, directeur industriel du groupe GFI. Nos salariés marocains œuvrent pour les équipes françaises en contact avec le client. ”Certification ISO 9001, entrées sécurisées… le site GFI de Casa répond à des normes drastiques. “ Nous travaillons dans l'environnement mainframe de BNP Paribas en France. Pour éviter tout risque potentiel de fuites, les données sont automatiquement rendues anonymes par un robot ”, poursuit Christophe Chauvin. GFI Maroc travaille aussi pour France Télécom et Airbus. Mi-2009, BNP Paribas employait, lui, quelque 600 informaticiens au Maroc entre BNP Paribas Méditerranée IT et BDSI, une entité dévolue aux marchés émergents. Ces équipes permettent aussi de soutenir l'activité locale. Créée en 1964, la Banque marocaine pour le commerce et l'industrie (BMCI), filiale du groupe français, emploie plus de 2 600 collaborateurs.
Google : vente de mots clés aux PME françaises
Comme chez Axa, pas de francisation des noms : les 80 opérateurs d'Intelcia œuvrant pour Google appellent les PME françaises sous leur vraie identité. Ils les aident à comprendre les arcanes de Google Adwords, de la recherche du bon mot clé au montage d'une campagne de publicité en ligne.C'est en 2008 que le prestataire marocain a remporté l'appel d'offres du géant américain. Et la différence ne s'est pas faite sur le prix, jure Karim Bernoussi, PDG d'Intelcia. La rémunération de sa société serait notamment liée au chiffre d'affaires généré : “ Nous ne sommes pas sur un modèle low cost, avec une logique d'exécution de tâches basiques. Le métier exige une agilité intellectuelle. Nous recrutons non pas des téléconseillers, mais des ingénieurs commerciaux, de niveau bac + 4, formés au marketing ou à la finance, avec une bonne culture générale. ”De fait, le plateau d'Intelcia ne ressemble en rien à un plateau bruyant de télévente. Les salariés ne passeraient d'ailleurs que deux heures au téléphone par jour. Non seulement Intelcia se targue de respecter les normes de qualité de Google, mais il a essayé d'en recréer l'esprit “ cool ”. Avec une cafèt'et un espace de détente équipé de poufs géants. La maîtrise des langues a aussi été déterminante dans le choix du prestataire marocain : outre les entreprises françaises, il conseille les PME espagnoles. Et quelques employés couvrent aussi le Portugal.
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