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De la microstructure au grand compte, les préoccupations des entreprises sont identiques : que dit-on de mon entreprise sur les réseaux sociaux et comment limiter les buz négatifs ? Réponse avec les outils d'e-réputation.
A l'heure de la libre expression sur internet, les entreprises s'inquiètent de la façon dont elles et leurs produits sont perçus. Cette préoccupation grandit avec l'avènement des réseaux sociaux, des blogs et des forums ou des sites de consommateurs sur lesquels les clients, les utilisateurs et autres citoyens expriment leurs avis, leurs interrogations voire leur colère et leur frustration. Parmi les sources à surveiller, il convient bien sûr d'y ajouter les sites de presse ou d'experts et même les sites marchands. Conséquence : l'offre en matière d'outils de gestion de l'e-réputation est en pleine ébullition. Ils seraient plus de 150 en France, selon une étude du cabinet Oto Research. La moitié d'entre eux a moins de cinq ans d'existence. Pourquoi et comment les utiliser ? Sur quel périmètre ? Aspen RH, jeune cabinet spécialisé dans le recrutement, Auchan ainsi que le Crédit agricole témoignent.
Des tailles différentes, des besoins similaires
Le cabinet de recrutement souhaite préserver l'image qu'il se construit sur le marché en visualisant les informations déposées par les candidats ou les clients. Pour l'enseigne de la grande distribution, l'objectif est de mesurer le ressenti des consommateurs en termes de qualité et de disponibilité des produits ainsi que de confort des magasins et d'achalandage des rayons. La banque mutualiste, quant à elle, cherche à évaluer son empreinte numérique et surtout celle de l'ensemble de ses caisses régionales (une dizaine sont aujourd'hui concernées). Sa priorité consiste à sonder les blogs, les forums spécialisés ou les sites de consommateurs (tel Lesarnaques.com) pour éteindre au plus vite un éventuel buzz négatif et être en mesure de répondre aux questions des clients. “ Mais au-delà des alertes et de l'identification de crises potentielles, nous voulons évaluer la perception des actions que nous menons et nous inspirer des idées et des commentaires émis sur le web par les internautes ”, détaille Nathalie Paquet, qui est chargée de la communication internet de la banque. Point de départ de tous ces projets : le ciblage des sources. Que veut-on surveiller ? Pour qui et pour quoi faire ? Ces questions de base sont celles qui mobilisent le plus les équipes. Pour récolter et centraliser les remarques de ses clients, Auchan a ainsi formé le personnel (les employés à l'accueil et les chefs de rayon) de ses 128 magasins. “ Ils doivent poser des questions suffisamment précises aux clients pour faire remonter une information pertinente ”, explique Jérôme Desreumaux, directeur de la relation client d'Auchan. A ces commentaires récoltés sur le terrain s'ajoutent les e-mails et les courriers de consommateurs. Le tout alimente une base de l'application de CRM (gestion de la relation client). A noter que l'enseigne, à la différence des deux autres entreprises, ne surveille ni ne catégorise les contenus présents sur le web.Le Crédit agricole s'est, lui, d'abord appuyé sur les sources proposées en standard par son éditeur Digimind, réputé pour la richesse de son panel. Il a parallèlement installé sa présence sur les réseaux sociaux et sur les sites de partage (Twitter, Facebook, Dailymotion, Youtube, Flick ou encore Slide share). Il s'agissait de drainer le maximum de commentaires d'internautes sur des espaces maîtrisés.Cependant le ciblage de certaines sources spécifiques (agriculture, particuliers, épargne, associations…) requérait des compétences humaines. “ Nous avons demandé aux différents responsables de marché quels sites et surtout quels champs lexicaux il apparaissait pertinent de surveiller ”, rapporte Fabien Denais, chef de projet internet en charge du dossier e-réputation. Ces éléments ont notamment permis à l'équipe projet de bâtir la structure dans laquelle sont classées les sources. “ Dans un premier temps, les informations remontées par l'outil sont juste catégorisées par type de source : presse, vidéo, blog, avis de consommateur… Après avoir validé leur pertinence, je les range manuellement dans le plan de classement qui se décline par marché, par thématique et, enfin selon la tonalité du message, positive, négative ou neutre ”, poursuit-il.
Analyse sémantique ou étude de tonalité
Pour Auchan, l'alimentation du plan de classement est également manuelle. “ Les opérateurs d'un centre de contact associent les contenus à des rayons de magasin et à des motifs tels que la qualité des produits, leur disponibilité ou encore le confort d'achat ”, précise Jérôme Desreumaux. Une fois les contenus classés dans les dossiers, le rôle du moteur de l'outil de gestion de l'e-réputation est de détecter les récurrences, les associations de termes ou les concepts. Chez Auchan, le moteur fourni par Proxem réalise une analyse sémantique. “ Nous l'avons retenu pour sa capacité à identifier des concepts aussi précis que les régimes sans sucre ou la consommation d'aliments sans sel ”, détaille Jérôme Desreumaux. Autre argument décisif : la finesse de l'outil en matière de détection de sens selon les contextes, ou son aptitude à comprendre, par exemple, qu'Orange est un opérateur, un fruit ou une couleur. Avec plus de 100 000 références en magasin, l'enseigne ne voulait pas déployer ni maintenir un lexique. Son moteur sémantique repose uniquement sur une approche statistique.Ces considérations de ciblage de source, de plan de classement et de paramétrage ne concernent pas Aspen RH, dont le besoin est plus ciblé : “ parle-t-on de nous ? Et en quels termes ? ”, résume Jean-Philippe Zupancie, associé chez Aspen RH. D'où l'importance pour lui de l'analyse de tonalité proposée par son éditeur Zen-réputation. Globalement, la catégorisation automatique des sources est bien effectuée, “ même si, parfois, certains résultats ne sont pas pertinents ”, précise-t-il. Dans ce cas, ils peuvent être manuellement supprimés lors de la consultation des bilans.Sur le terrain de la visualisation des résultats, Jean-Philippe Zupancie “ apprécie le score d'e-réputation que livre l'outil. C'est un bon indicateur de notre notoriété et de son évolution dans le temps, qui peut également être appliqué aux autres acteurs de notre marché. ” Effectivement, rien n'empêche de surveiller de la même façon la réputation de ses concurrents. Techniquement parlant, ce score est une combinaison du nombre d'occurrences, de sources jugées négatives et du ranking (référencement de la source par les moteurs). La plate-forme expose également des courbes qui retranscrivent l'évolution dans le temps du volume de citations. Elle propose par ailleurs de consulter la matière première cachée derrière les courbes, sous la forme d'une extraction de textes. “ Bien souvent, j'exploite la plate-forme d'e-réputation en remplacement de Google pour surveiller, outre notre société, des thèmes tels que l'e-commerce, le secteur de l'IT ou encore des domaines où nous recrutons. Grâce à elle, je visualise les résultats par type de source : blog, chat, site de presse… ”
Du constat à l'intervention
Les plates-formes d'e-réputation d'Auchan et du Crédit agricole disposent globalement des mêmes outils de visualisation. Celle de la banque mutualiste, Digimind, présente des caractéristiques supplémentaires, dont la pondération des sources. Toutes n'ont pas, en effet, la même influence. D'où l'intérêt de minimiser, ou de grossir, leur poids dans les résultats affichés. “ Dans Digimind, cette pondération est ajustable manuellement ”, explique Fabien Denais. Autre service additionnel : la finesse des restitutions graphiques. Potentiellement, chaque dossier du plan de classement (selon une arborescence épargne, blog, avis négatif, par exemple) donne lieu à un graphique (courbe, histogramme, camembert). “ Pour aller plus loin, il est possible de croiser ces dossiers et de déterminer ainsi si les propos échangés sur notre entreprise dans un domaine comme celui de l'agriculture sont plutôt positifs dans la presse ou sur les blogs. ” Un bémol cependant : le référencement et la gestion des dossiers du plan de classement (plus d'une centaine au Crédit agricole), des tâches longues et complexes, sont à la charge de l'utilisateur. Comme le sont les requêtes manuelles nécessaires pour expliciter le rendu graphique résultant des dossiers. Une valeur ajoutée au niveau des utilisateurs : ils reçoivent dans leur newsletter les analyses graphiques et les sources associées, en fonction des dossiers auxquels ils sont abonnés.Bien sûr, l'analyse de l'e-réputation doit déboucher sur une action, sous peine d'être stérile. Chaque semaine, chez Auchan, une note de synthèse est présentée à la réunion de la direction générale. Et les magasins accèdent à des synthèses personnalisées sur l'intranet du groupe. Aspen RH n'a pas encore eu à intervenir. En cas de problème, le cabinet ne s'interdit pas d'utiliser le service de suppression de contenu web proposé par l'éditeur de son outil. Enfin, côté Crédit agricole, Fabien Denais s'est inscrit sur de nombreux forums de consommateurs. Il rentre en contact avec les personnes exprimant doute ou colère, puis il joint, via un annuaire d'e-réputation développé pour l'occasion, la personne adéquate dans la caisse régionale concernée. “ Nous ne résolvons pas la problématique du client, insiste Nathalie Paquet. Mais nous faisons le lien avec la caisse. Il est important, lors d'un cas négatif, de montrer qu'on le prend en charge tout de suite. ”
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